La guerre déclenchée par l’assaut terroriste du Hamas sur les populations civiles israéliennes est désormais mondiale. Je ne parle pas, bien sûr, de l’aspect militaire de ce conflit. Celui qui oppose aujourd’hui l’une des armées les plus puissantes du monde à un groupe palestinien retranché dans les entrailles d’un territoire de 360 km2 (à peine plus grand que le canton de Genève) où la population civile se retrouve prise en otage, à la veille d'un assaut qui pourrait se solder par d'énormes pertes humaines.
Drapeau palestinien brandi partout
Je parle d’une autre guerre: celle que les centaines de milliers de personnes à travers le monde mènent en manifestant chaque jour leur soutien à la cause palestinienne. Regardez les images en provenance de pays aussi différents que le Canada, l’Italie, le Maroc, l’Argentine ou le Sénégal. Partout, les keffiehs noirs et blancs et le drapeau palestinien sont hissés avec colère. La Palestine, que l’on croyait oubliée, est de nouveau dans toutes les têtes.
En images, le discours de Joe Biden à Tel Aviv
Cette équation est de très loin, pour Israël, la plus compliquée à résoudre. Certes, les images insoutenables de civils massacrés par les commandos du Hamas ont fait le tour du monde et des réseaux sociaux.
Certes, les visites organisées par les responsables israéliens dans les tunnels du Hamas – pour bien montrer la sophistication de ce mouvement adepte de la guerre de la terreur – prouvent qu’une démocratie, même armée jusqu’aux dents, sera toujours vulnérable aux attaques suicides et impitoyables.
Certes, les informations sur la frappe meurtrière dont a été victime l’hôpital de Gaza semblent éloigner la responsabilité de Tsahal.
A lire sur la guerre Hamas-Israël
Israël peut aussi se féliciter d’avoir, depuis l’assaut du 7 octobre, consolidé le soutien des pays occidentaux, et même verrouillé celui des États-Unis, comme l’a montré la visite éclair de Joe Biden à Tel Aviv, puis son appel aux Américains jeudi soir à Washington. La sécurité israélienne est donc garantie.
Et après? Partout, y compris dans les pays où les manifestations pro-palestiniennes sont interdites comme en France, la rue gronde. L’antisémitisme honni est relancé. Le mot «génocide» est crié. Gaza est, pour beaucoup, le nom d’un territoire martyr avant d’être la base opérationnelle d’une milice terroriste téléguidée par l’Iran, prête à engloutir une partie de son peuple au service de sa cause. Or c’est cette guerre-là qui décidera aussi du sort de ce conflit. Pour l’État hébreu, comme pour tous ceux qui soutiennent à juste titre son droit à la sécurité.
Rêve d’apartheid
Le pire, pour le gouvernement de Benyamin Netanyahu, serait d’ignorer cet avertissement mondial en niant la cause palestinienne. L’apartheid dont rêvait une partie de la coalition au pouvoir en Israël n’est pas plus acceptable maintenant qu’il l’était hier. Le jeu redoutable qui consistait, pour Benyamin Netanyahu, à doper le Hamas pour affaiblir l’Autorité palestinienne face aux colons de Cisjordanie s’est rétrospectivement avéré être un crime impardonnable. L’État hébreu a tout à perdre s’il reste prisonnier de cette logique de prédation et de revanche aussi implacable qu'aveugle.
Ce qui se passe à Gaza maintenant nous concerne tous. Le pire serait, en ignorant cet enjeu humanitaire et politique, de permettre aux terroristes du Hamas, même militairement anéantis, de sortir victorieux de cette guerre-là: celle de l'opinion et de la cause palestinienne, relégitimée comme jamais.