C’est le «New York Times» qui l’écrit. Dimanche 27 octobre au Madison Square Garden de New York, Donald Trump s’est livré, à «un carnaval d’attaques personnelles, de misogynie et de racisme».
On connaît bien entendu le biais politique du grand quotidien américain, qui soutient la candidature de la vice-présidente sortante Kamala Harris. Il suffisait, ce week-end, de lire la Une de son supplément «Opinion». Lequel, sur une pleine page, affichait l’avertissement suivant: «Donald Trump dit qu’il va traduire ses ennemis en justice, ordonner des déportations massives, recourir aux soldats contre les citoyens, exploiter politiquement les catastrophes. Il faut le croire!»
Chaque matin jusqu’à la mi-novembre, je prends pour vous le pouls de l’Amérique. Un rendez-vous écrit sur le terrain, là où se joue le duel entre Donald Trump et Kamala Harris.
Et pas n’importe quel terrain: d’ici au 5 novembre, date de l’élection présidentielle, c’est sur les routes, entre Chicago, où Kamala Harris a été investie par la convention démocrate à la mi-août, et Mar-a-Lago, le fief de Donald Trump en Floride, que je rédigerai ces chroniques matinales en cinq points. En plus: une série de reportages à ne pas manquer et des vidéos et photos de mon collègue Pierre Ballenegger.
Vous faites partie de ceux qui pensent que notre avenir se joue aussi le 5 novembre, de l’autre côté de l’Atlantique? Alors ne ratez pas ces chroniques. Partagez-les. Et réagissez!
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Plus de limites
La réalité est pourtant bien celle que le «New York Times» décrit. Le candidat républicain et ses alliés les plus proches et les plus médiatiques, comme le milliardaire Elon Musk, le catcheur Hulk Hogan, l’ex-candidat indépendant Robert Kennedy, le polémiste Tucker Carlson ou l’avocate Alina Habba, font exploser dans ces derniers jours de campagne les limites habituelles du débat public.
Il s’agit pour Donald Trump de dénoncer «l’ennemi de l’intérieur» (the enemy within). Une stratégie risquée, voire insensée au moment où son adversaire démocrate le traite de «fasciste» et s’apprête, ce mardi 29 octobre, à prononcer un discours à Washington DC sur les lieux mêmes de l’assaut du 6 janvier 2021 contre le Capitole? Pas certain. Voici pourquoi:
Quand Trump insulte, il parle comme ses électeurs
Il faut d’abord s’entendre sur les mots. Oui, Donald Trump emploie un langage vulgaire, agressif et multiplie les attaques personnelles, ce qui est déplorable pour le débat démocratique. Mais il n’y a là rien de nouveau. Il faut se souvenir qu’en 2016, l'année de sa victoire face à Hillary Clinton, son slogan préféré, repris par des centaines de milliers de ses partisans était «Lock her up!» (Enfermez-là!).
L’ex président parle, en fait, comme ses électeurs. Il fait, avec ses mots, un bras d’honneur répété aux élites libérales, aux médias (dans lesquels les Américains ont de moins en moins confiance) et à tous ceux qui voudraient le voir changer de registre. Il suffit d’avoir entendu, comme cela a été le cas plusieurs fois depuis notre arrivée aux États-Unis le 10 octobre, des militants pro-Trump désigner ouvertement devant nous Kamala Harris comme that bitch (cette salope) pour se faire une idée du niveau ambiant.
Quand Trump insulte, il répond aux Démocrates
Ses adversaires sont aussi dans l’escalade verbale. Ils le traitent de «fasciste». Plusieurs anciens généraux de l’armée, qui ont travaillé avec lui, disent son admiration pour Hitler et pour la capacité du chef du IIIe Reich à s’entourer de chefs militaires «loyaux».
Ce mardi au pied du Congrès, Kamala Harris va de nouveau le désigner comme premier responsable de l’assaut du 6 janvier 2021. La Commission d’enquête parlementaire a qualifié cet événement de «tentative de coup d’État», puisqu’il s’agissait d’empêcher l’ex vice-président Mike Pence de valider la victoire électorale de Joe Biden. Ne rien changer à ses outrances revient donc, pour Trump, à tout nier en bloc.
Le candidat Républicain est à la fois capable d’applaudir l’humoriste Tony Hinchcliffe au Madison Square Garden lorsqu’il qualifie Porto-Rico de «d’île flottante d’ordures au milieu de l’océan», et de répéter contre toute évidence que le 6 janvier était «a day of love» (un jour d’amour). Pour lui, les mots sont des armes. Et chacun de ses meetings est une riposte. «Ils m'ont traité de tous les noms, de savant fou cherchant à conquérir le monde, mais aussi de personne très très stupide», a déclaré Donald Trump lors d'un meeting en Géorgie lundi. «Je ne suis pas un nazi. Je suis le contraire d'un nazi», s'est-il défendu.
Quand Trump insulte, il cible ses ennemis
Donald Trump ne distribue pas les insultes à tout-va. Son premier objectif est de discréditer et de déstabiliser Kamala Harris avec des réflexions blessantes sur ses origines indiennes (par sa mère) et jamaïcaines (par son père). Sa deuxième stratégie consiste à diaboliser les migrants qui vont jusqu’à «manger des chats et des chiens» à Springfield, dans l’Ohio. Troisième cible enfin: les élites et l’Etat profond, y compris au sein de l’armée, qu’il considère comme les «ennemis de l’intérieur».
Là aussi, rien de neuf. On se souvient qu’auparavant, ses attaques portaient en priorité sur l’état de santé de Joe Biden, et cela a sans doute contribué à augmenter la pression sur l’actuel président, contraint de se retirer fin juillet de la course à la Maison Blanche après son désastreux débat télévisé.
Attention toutefois: le camp démocrate n’est pas en reste du côté des attaques personnelles. Kamala Harris a ainsi plusieurs fois répété que Trump était instable, et son colistier Tim Walz répète à chaque meeting que les Trumpistes sont des gens «bizarres». Leurs clips télévisés sont à l'unisson.
Quand Trump insulte, il sature les médias
Il n’y a qu’à voir le résultat de son meeting dominical au Madison Square Garden de New York. Toute la presse mondiale l'a commenté!
Résultat: exit ou presque la prestation de Michelle Obama aux côtés de Kamala Harris la veille à Kalamazoo, dans le Michigan, l’un des sept États clés du scrutin du 5 novembre. Trump sature les médias. Et il le fait car tous ses conseillers en opinion lui affirment qu’il a fait le plein d'électeurs.
Il ne s’agit donc plus pour lui de convaincre d’éventuels indécis. Il s’agit de galvaniser son camp et d’adresser un message au monde entier avec l’aide du réseau social X, possédé par son ami Elon Musk. Les insultes s’adressent aussi à un public masculin, viril, prêt à en découdre. La marque Trump en sort renforcée: lui seul, pensent ses électeurs, peut parler comme ça.
Quand Trump insulte, il joue double jeu
Il ne faut jamais oublier cette dimension, bien plus perceptible aux Etats-Unis qu’en Europe: beaucoup d’électeurs de Donald Trump n’écoutent pas ses harangues et ses insultes, faites selon eux pour le show électoral et pour les médias. Ils votent pour les politiques qu’il propose, à savoir le retour d’un protectionnisme massif, une réindustrialisation fantasmée, la mise des alliés européens sous pression pour qu’ils dépensent plus et achètent davantage de matériel militaire américain, et bien sûr la chasse aux migrants par tous les moyens.
Trump a l’avantage d’être perçu par beaucoup de ses compatriotes comme «bon pour l’économie». Peu importe son style et son langage puisqu’il va «défendre l’Amérique et les Américains». Et tant pis, pour ces électeurs trumpistes, si cela devait faire beaucoup de casse sociale et humaine.