Droite ou extrême droite?
Les cinq révolutions allemandes qui peuvent sortir des urnes ce dimanche

Les élections législatives allemandes se sont achevées ce dimanche à 18 heures. Elles sont assurées de transformer le pays. Surtout avec le score record de l'extrême droite.
Publié: 18:29 heures
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Dernière mise à jour: 19:15 heures
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60 millions d'électeurs allemands étaient convoqués pour ces législatives.
Photo: U. Baumgarten via Getty Images
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Richard WerlyJournaliste Blick

L’Allemagne sortira transformée des législatives qui ont eu lieu ce dimanche 23 février. C’est un fait indéniable. Tous les regards sont en effet braqués, en RFA, sur le score que l’AfD, l’Alternative für Deutschland, le parti d’extrême droite. S’il obtient les 20% que lui prédisaient les sondages et les premières projections (19,8% pour l'instant), il s’agira d’un record de suffrages depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, avec d’importantes conséquences politiques. 

Cinq révolutions allemandes peuvent sortir des urnes. Et elles auront un impact sur tous les voisins de ce pays, Suisse incluse.

La révolution de l’AfD

Au-dessus de 20%, score qui serait déjà historique, l’AfD deviendra le parti incontournable de la vie politique allemande, même si toutes les autres formations ont promis de ne pas gouverner avec cette formation d’extrême-droite. Une AfD qui flirterait avec les 25% des suffrages talonnerait, dans les faits, le parti chrétien-démocrate (droite traditionnelle) donnée victorieuse depuis des semaines. Le débat sur l’immigration, obsession de l’AfD deviendrait encore plus empoisonné. Le sujet du soutien allemand à l’Ukraine, militaire et civil, se retrouverait mis en cause, car l’AfD est aujourd’hui un allié de l’administration Trump. Difficile, enfin, de faire croire aux électeurs allemands que ce parti ne gouvernera jamais le pays alors que son score pourrait représenter le double de celui du SPD, le parti social-démocrate qui dirigeait la coalition au pouvoir à Berlin depuis 2021.

La révolution libérale

Le mot «libéral» est d’ordinaire réservé en Allemagne au parti qui porte ce nom: le parti libéral FDP dont le chef, Christian Lindner, était ministre des Finances dans la coalition sortante avec le SPD et les «Grünen» (les Verts). Seulement voilà: l’AfD, poussée par le vent trumpiste, préconise aussi aujourd’hui une réduction massive des normes et du rôle de l’Etat dans l’économie. Le chef de la CDU Friedrich Merz, donné vainqueur du scrutin par les sondages et considéré comme le prochain Chancelier, est lui aussi partisan d’une approche beaucoup plus libérale, même s’il est originaire de Rhénanie, patrie du fameux «Capitalisme rhénan» cher à Helmut Kohl. L’Allemagne a besoin d’un renouveau de sa culture entrepreneuriale. La question du gaz russe pas cher va aussi se reposer. Idem pour le retour possible au nucléaire, abandonné par Angela Merkel en 2011.

La révolution européenne

Deux partis en lice sont ouvertement hostiles à l’Europe communautaire. Le premier est l’AfD. La formation d’extrême droite a été fondée en 2013 par des économistes hostiles à la monnaie unique. Une AfD puissante, même si elle ne gouverne pas, pourrait compliquer la tâche du nouveau gouvernement s’il veut faire avancer l’idée française d’un nouvel emprunt au niveau européen pour financer les efforts de défense. L’autre parti est celui de Sarah Wagenkencht, classé «gauche radicale». Son programme de rapprochement avec la Russie de Poutine est assumé. S’il entre au Bundestag (il lui faut pour cela plus de 5% des voix), ce parti renforcera l’europhobie ambiante d’une partie de la classe politique allemande.

La révolution migratoire

Oublié, le «Wir Schafen Das» (nous y arriverons) prononcé en 2015 par l’ex Chancelière Angela Merkel, alors que des centaines de milliers de réfugiés syriens (mais aussi d’autres nationalités du moyen orient) franchissaient les frontières allemandes. Une révolution est à attendre. Plus de police dans les rues. Des frontières davantage verrouillées. Des expulsions bien plus fréquentes. Il faudra suivre, notamment, les votes des prochaines lois migratoires au Bundestag. On a vu, ces dernières semaines, que la droite traditionnelle est prête à mêler ses voix à celles de l’AfD sur ce sujet. Pour faire simple: finie, la générosité allemande et le sentiment d’un pays «sûr» où l’intégration fonctionne (ce qui est largement le cas). Les récentes attaques au couteau revendiquées par des jeunes islamistes sont passées par là.

La révolution atlantiste

Comment peut-on être allemand sans compter sur les Etats-Unis pour garantir la sécurité de la République fédérale, y compris avec les armes nucléaires américaines présentes sur les bases allemandes de l’OTAN. Deux scénarios sont possibles. Le premier, improbable à en croire les sondages, est une poussée forte de l’AfD qui conforterait les ingérences de l’administration Trump pour obliger Berlin à suivre en tous points les ordres de Washington. La seconde option est, pour la première fois depuis 1945, une prise de distance avec l’Oncle Sam. Pour l’heure, cela reste de la fiction. Mais être allemand ne signifie plus être aligné à 100% sur la Maison-Blanche. A moins que Donald Trump se fâche…

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