Les fabricants de tabac savaient que les cigarettes pouvaient causer le cancer du poumon. Ford savait que son modèle «Pinto» pouvait exploser. Les informations circulaient à l'interne, mais les entreprises se sont tues pour des raisons financières, voire ont violemment fait campagne pour nier les faits scientifiques.
Les multinationales du pétrole ont fait pareil. Cela fait plus de cinquante ans qu'elles savent que les groupes pétroliers connaissent l'impact que leur production peut avoir sur le climat. Les produits des 20 plus grandes compagnies pétrolières sont responsables de plus d'un tiers des émissions mondiales de gaz à effet de serre depuis 1965. «Big Oil» aurait pu jouer un rôle dans une transition énergétique salutaire durant ce demi-siècle. Au lieu de cela, les prospections ont continué et continuent, et la production de pétrole à doublé entre 1970 et 2000.
1971: la mis en garde contre la crise climatique
Selon «Global Environmental Change», la société française Total, septième plus grande multinationale pétrolière en termes de ventes en 2020, a lancé un premier avertissement en 1971. Selon l'étude, la direction de Total aurait même publié un magazine maison, il y a cinquante ans, détaillant les craintes de leurs chercheurs. Ils prévoyaient qu'en 2010, on atteindrait un niveau de CO2 si impressionnant que les conséquences seraient «catastrophiques». Ce niveau a été franchi en 2015.
Les huiles de Total se sont mis d'accord: il faut agir. Mais pas pour avertir la population. Non, pour semer le doute sur la recherche climatique. Total a activement tenté de brouiller les pistes. Selon le «Spiegel», un groupe de travail a été mis en place en collaboration avec d'autres multinationales. Un responsable pétrolier aurait recommandé d'utiliser les incertitudes des chercheurs sur le climat et de mettre surtout l'accent sur les coûts de la protection du climat.
Associations de déni du climat
En 1988, des scientifiques du géant anglo-néerlandais Shell (troisième compagnie pétrolière en 2020) ont préparé une étude publiée par «Climatefiles». Selon eux, la combustion de combustibles fossiles va bouleverser le climat, plus que n'importe quel autre phénomène météorologique des 12'000 dernières années. Le changement climatique provoqué par l'homme ferait fondre la glace polaire, favoriserait les tempêtes, rendrait des régions inhabitables et la nourriture rare. Les chercheurs ont mis en garde: Puisque quatre pour cent des émissions de CO₂ proviennent de Shell, cette dernière doit s'attaquer au problème du climat.
Mais Shell a préféré dépenser environ 22 millions de dollars par an en 2015 – 27 ans plus tard – pour s'opposer à la protection du climat, selon le «Correspondant» (NL). Alors qu'un film produit par Shell sur le danger climatique avait été publié en 1991 (voir la vidéo).
Shell a été jusqu'à fonder une sorte d'association de climato-sceptiques. Exxon, le sixième géant du «Big Oil» en 2020, en faisait également partie. En 1997, Exxon annonçait qu'elle en savait trop peu sur les augmentations de température dues à l'homme pour agir. Alors que, d'après des révélations de «Inside Climate News», les chercheurs d'Exxon ont si bien prédit cette hausse de température dès 1982 que des chercheurs de Harvard eux-mêmes ont été étonnés de l'exactitude de leurs confrères.
Aujourd'hui, il est reconnu
La liste pourrait s'allonger encore et encore. BP, le cinquième producteur mondial de pétrole en 2020, avait réalisé un film il y a trente ans. La radio «Bayerischer Rundfunk» en citait récemment un passage: «Si les émissions continuent d'augmenter, l'effet de serre deviendra encore plus fort - et une hausse de température de quelques degrés seulement aurait des «conséquences dévastatrices». Mais BP n'a rien fait non plus.
Aujourd'hui, les compagnies pétrolières ne nient plus le réchauffement climatique. Selon des experts, ce n'est nullement à cause d'un revirement moral: les faits sont à présent si indéniables que continuer à nier nuit à leur image – et à terme, à leur portemonnaie. Exxon, par exemple, a été poursuivie aux États-Unis parce que la dissimulation des faits climatiques avait coûté aux investisseurs jusqu'à plus d'un milliard de dollars américains. Et si le tribunal s'est prononcé en faveur d'Exxon dans cette affaire, Shell a été condamnée par un tribunal néerlandais, l'obligeant à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 45% d'ici à 2030. Et cela ne surprendra pas nos lecteurs: Shell a fait appel.