4 conseils pour accepter l'échec comme les pros
Comment les athlètes vivent-ils la déception d'une 4e place?

Écoper d'une 4e place aux JO, c'est aussi décevant que rater de justesse une opportunité professionnelle ou un concours. Un psychologue du sport nous donne sa perspective sur l'après-performance olympique. Et ses propos s'appliquent aussi aux non-athlètes!
Publié: 13.08.2024 à 19:08 heures
Le judoka argovien Daniel Eich a perdu le bronze de justesse, face à l’Israélien Peter Paltchik, le 1er août 2024. Une grande déception.
Photo: Keystone
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Ellen De MeesterJournaliste Blick

«J’échangerais toutes mes médailles mondiales et européennes, mes podiums en Coupe du monde, contre cette médaille de bronze que j’étais venue chercher aujourd’hui», déplorait la navigatrice vaudoise Maud Jayet, inconsolable après avoir obtenu la 4e place à la Medal Race des JO, le 7 août.

On peut imaginer des émotions semblables chez Daniel Eich, judoka argovien ayant perdu le bronze de justesse, lors de la petite finale des moins de 100kg. Ou encore chez Marianne Vos, Lotte Kopeky et Blanka Vas, qui ont vu l'Américaine Kristen Faulkner les dépasser en flèche sur les derniers kilomètres de la course en ligne féminine. Tous ces athlètes sont désormais rentrés chez eux, peut-être emplis de lancinants regrets. 

Bien sûr, la déception est immense lorsque l'objectif qui nous obsédait depuis des mois nous file entre les doigts. Et pas besoin d'être sportif d'élite pour en faire l'amère expérience: toute personne ayant déjà reçu une réponse négative après trois entretiens ou grimpé les étapes d'un grand concours pour échouer tout près du but, pourrait imaginer la peine des athlètes ayant frôlé la médaille dont ils rêvaient. 

«Peu d’athlètes se préparent à la potentialité d’une quatrième place, qui peut s’avérer d’autant plus frustrante, analyse Dr. Olivier Schmid, psychologue FSP spécialisé en psychologie du sport à l’Hôpital de La Tour (GE). Même celles et ceux qui ont mentalement anticipé tous les scénarios possibles peuvent ressentir une sensation de vide, le lendemain de la compétition. Cela peut aussi créer pas mal de confusion et une dissonance douloureuse par rapport à ce qu’ils avaient prévu, au niveau de leur performance.» 

Plus d'échecs que de victoires

On ne peut évidemment généraliser ce phénomène, dans la mesure où tout dépend de chaque personne et de sa situation. Ainsi que le rappelle notre expert, certains athlètes (comme la Grisonne Annik Kälin, par exemple) sont ravis d'une quatrième place: «Peut-être la personne a-t-elle fait de son mieux et ne regrette rien. Peut-être étaient-ce ses premiers Jeux et qu’une simple participation était déjà une étape grandiose dans sa carrière.» 

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Le Dr. Schmid souligne par ailleurs qu'une carrière sportive est forcément composée de plus d'échecs que de victoires. Or, ces expériences doivent inévitablement être vécues, même si on voudrait plutôt se hâter de passer à la suite: «Il est important de digérer ce vécu et les émotions difficiles qui en découlent, avant de se remettre en route!», souligne notre intervenant. Si vous peinez à accepter la déception, voici quelques points de réflexion qui pourraient vous inspirer: 

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Vivre les émotions difficiles

«La période durant laquelle les athlètes peuvent célébrer leur victoire ou ruminer leur déception est très éphémère, constate le Dr. Schmid. Durant la cérémonie de clôture, après l’hommage aux participants médaillés, on est très vite passés à la perspective des Jeux de 2028. Certains sportifs déçus sont déjà amenés, malgré eux, à considérer la suite, même s'ils ne se sentent pas forcément prêts à le faire.»

Ce type d’émotions doit néanmoins être vécu et digéré, sans pour autant se laisser paralyser. Elles peuvent en effet s'avérer lourdes et nécessitent donc un peu de temps: «Qu’on ait essuyé un échec ou décroché une médaille d’or, cela implique forcément des attentes et de la pression pour la suite, explique le psychologue. D'ailleurs, pour de nombreux athlètes, il est difficile de revenir à la réalité après les Jeux, de retrouver la routine et les entraînements. Or, le fait de vivre l'expérience des émotions associées à la défaite fait partie du processus de résilience.»

En effet, dans le cas de Maud Jayet, la navigatrice se demandait même si elle aurait la force de continuer après sa grande déception: «Il faudra du temps pour peut-être considérer les choses différemment», nous confiait-elle.

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Se demander si on a vraiment visé la lune

Voilà une question complexe, qui mérite toutefois d'être méditée: a-t-on vraiment tout fait, sincèrement, pour atteindre le sommet? «On peut constater que certains athlètes n’osent pas aller décrocher une médaille d’or, car cet objectif leur semble trop élevé, les engagerait à fournir une performance très haute et renforcerait la pression subie», poursuit le spécialiste.

En d'autres termes, on préfère alors placer l’objectif plus bas pour minimiser les risques et se prémunir contre l’échec: «Mais cela risque de créer des pensées de type 'qu’est-ce qu’il se serait passé si j’avais visé plus haut?' Rares sont celles et ceux qui décrochent une médaille sans s’être fixé l’objectif d’aller jusqu’au bout.»

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Analyser nos erreurs

Puisque les athlètes doivent encaisser davantage d'échecs que de victoires, les erreurs constituent une base d'apprentissage inestimable, sur laquelle ils peuvent se baser. Même – et surtout – quand l'objectif se trouvait à bout touchant! «Cela passe aussi par le fait d’apprendre de cet échec, plutôt que de le voir comme un affront, de perdre confiance en soi ou d'estimer que sa valeur dépend d'une place au classement», estime notre expert. 

Pour endiguer ces réactions normales et faciliter la reprise, il s'agit d'encourager les athlètes à tendre vers une optique d'apprentissage, afin de viser l'excellence malgré tout: «Même si le parcours est parsemé d’échecs, il s’agit d’apprendre pourquoi on a échoué, d’acquérir une connaissance de son propre fonctionnement et de prendre conscience de ce qui pourrait être fait différemment.»

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Cultiver le «growth mindset»

Cela paraît infiniment plus difficile à dire qu'à faire, mais l'état d'esprit est absolument essentiel. Pour les athlètes, il s'agit de développer le growth mindset, que le Dr. Schmid caractérise comme la capacité à se focaliser sur l’évolution, l’apprentissage et la croissance. «Il faut toutefois en prendre conscience et l’adopter de façon délibérée», pointe-t-il. «Comme il ne s’agit pas de notre mode de pensée 'par défaut', il faut constamment se remettre dedans par soi-même.»

En effet, notre société occidentale adopte plutôt un état d'esprit «figé», basé sur l’égo, caractérisé par le besoin de faire nos preuves, de se comparer aux autres et d’être le meilleur: «Ce mindset de supériorité n’est pas mauvais en soi, les athlètes en ont notamment besoin pour rester dans l’esprit de la compétition et se surpasser, tempère le spécialiste. Mais il ne devrait pas prendre trop de place: le focus devrait être placé sur l’apprentissage, la progression et la maîtrise de ses compétences.» 

Pour y parvenir, le Dr. Schmid conseille de développer le courage d’avancer malgré les échecs et de persévérer: «On peut faire la liste des valeurs qui sont importantes pour nous et qu’on peut laisser prendre le dessus sur la peur et la frustration.» Courage, persévérance... C'est le moment de saisir une feuille et un stylo pour noter vos principales sources de motivation – comme le feraient les plus persévérants des champions. 

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