Les investisseurs aiment le cash. Selon des sondages, environ 70% des investisseurs privés dans le monde détiennent une partie de leur fortune en espèces, par exemple sous la forme d'un compte bancaire. Seule la moitié d'entre eux placent leur argent sur le marché boursier national, tandis qu'un tiers environ est actif sur les places boursières internationales. Des sondages récents montrent en outre que les investisseurs de certains pays souhaitent même augmenter leur part de liquidités.
La raison de cette tendance? Les taux d'intérêt plus élevés de ces dernières années ont à nouveau accentué une certaine «aversion pour les actions» et fait des liquidités une classe d'actifs privilégiée. Aux États-Unis par exemple, les comptes bancaires rapportent jusqu'à 5% d'intérêt, dépassant ainsi le taux d'inflation.
Et en Suisse? Dans notre pays, les gens ne portent pas les actions dans leur cœur. Un classement de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) montre que les ménages suisses n'investissent que 13% de leur patrimoine financier dans des actions. Seuls l'Allemagne et le Japon affichent une valeur (légèrement) inférieure. Parallèlement, deux Suisses sur trois ont de l'argent liquide à la maison et plus de 80% possèdent un compte privé ou un compte d'épargne.
L'argent liquide n'est pas aussi sûr qu'il n'y paraît
Daniel Kalt, économiste en chef à l'UBS, estime que le niveau «trop élevé» des liquidités est un problème pour les portefeuilles suisses: «Même si des montants élevés de liquidités donnent à de nombreux investisseurs un sentiment de sécurité, ils ne sont pas si sûrs que cela.»
L'expert calcule que le pouvoir d'achat réel de 100 francs suisses sur un compte d'épargne a diminué d'environ 6% depuis 2017. Si l'on tient compte de l'inflation, la fortune placée sur les comptes d'épargne faiblement rémunérés a donc baissé au cours des dernières années. La situation ne devrait pas changer fondamentalement dans un avenir proche. Certes, l'inflation a de nouveau baissé. Mais les taux d'intérêt sur les dépôts d'épargne restent bas, voire nuls.
La recommandation de l'économiste en chef de l'UBS est la suivante: «Maintenez les liquidités à un niveau raisonnable, mais pas excessif.» Du point de vue de l'investisseur, le problème est qu'il n'existe pas de règle empirique simple pour déterminer le niveau optimal de liquidités. Son niveau dépend notamment de l'âge, de l'horizon de placement, de la tolérance au risque et des besoins financiers pour des achats importants à venir.
Combien d'argent puis-je placer?
Un calcul type avec le calculateur de liquidités de l'UBS donne un point de repère pour savoir combien d'argent liquide est approprié. Il travaille avec quatre grandeurs: les liquidités actuelles, c'est-à-dire l'argent liquide et les avoirs en compte disponibles, les dépenses mensuelles, les réserves de métal et les dépenses prévues pour les cinq prochaines années.
Dans le modèle de calcul, les dépenses pour trois mois, la réserve de métal et les dépenses prévues sont déduites des liquidités disponibles. La différence correspond aux liquidités pouvant être investies. Voici quatre exemples:
| Exemple | Réserves plus élevées | Dépenses mensuelles plus élevées | Dépenses prévues plus élevées |
Liquidités actuelles | 100'000 | 100'000 | 100'000 | 100'000 |
Dépenses dans trois mois | 15'000 | 15'000 | 24'000 | 15'000 |
Réserves | 20'000 | 30'000 | 20'000 | 20'000 |
Dépenses prévues | 25'000 | 25'000 | 25'000 | 40'000 |
Liquidités recommandées | 60'000 | 70'000 | 69'000 | 75'000 |
Liquidités pouvant être placées | 40'000 | 30'000 | 31'000 | 25'000 |
Source: UBS (données en CHF)
Dans l'exemple, un montant de 40'000 francs est réservé pour les investissements. Ce montant fond lorsque les dépenses mensuelles, la réserve ou les dépenses planifiées augmentent. Et c'est aussi vrai inversement: les liquidités pouvant être investies augmentent dès que les plans pour les cinq prochaines années sont réduits, par exemple.
Reste à sacoir dans quels placements le solde doit être investi. L'UBS conseille en général d'avoir un portefeuille bien diversifié. Outre des liquidités, ce dernier devrait contenir des actions, des obligations ainsi que des matières premières ou de l'immobilier – et représenter différents secteurs et régions du monde.
La banque JP Morgan conseille en particulier de réinvestir dans les obligations de base et les actions. L'établissement bancaire étasunien se montre optimiste quant à la poursuite de la croissance sur les marchés des actions, malgré les sommets atteints récemment. Car dans le passé, un sommet historique a souvent été suivi d'un nouveau sommet historique. De ce point de vue, les actions semblent pratiquement incontournables lorsqu'il s'agit d'investir des liquidités excédentaires. Mais les avis divergent.
À long terme, les actions rapportent
Mathias Binswanger, économiste à la Haute école spécialisée du Nord-Ouest de la Suisse, précise: «On peut se demander ce qu'est une trésorerie trop importante. C'est une décision personnelle. Les investisseurs averses au risque s'en sortent mieux avec des liquidités élevées qu'avec des actions, parce que la sécurité est plus importante pour eux que le rendement.»
Pour les actions, l'horizon temporel joue un rôle important: «L'expérience montre que celui qui investit à long terme réalisera des bénéfices. Mais à court terme, il peut aussi y avoir de grosses pertes.» Un coup d'œil sur le passé le prouve: investir sur le marché mondial des actions depuis le début du millénaire peut rapporter un rendement de 150%. Mais les deux dernières décennies et demie ont aussi été marquées par de longues périodes de vaches maigres: entre 2003 et 2009, entre 2007 et 2016 et entre avril 2021 et début 2024, on a pratiquement fait du surplace.
Les cryptomonnaies et l'immobilier comme alternatives
«Au lieu d'actions, les investisseurs peuvent placer leur argent dans l'or, les cryptomonnaies ou l'immobilier», explique Mathias Binswanger. Un vaste champ s'ouvre ainsi aux investisseurs: outre les actions, d'autres classes d'actifs peuvent être intéressantes. L'immobilier devient plus attractif en raison de la nouvelle baisse des taux d'intérêt. Les fonds immobiliers constituent des alternatives à l'acquisition d'un logement – trop coûteux pour un nombre croissant de particuliers. Les meilleurs d'entre eux ont connu une croissance à deux chiffres au cours des dix dernières années. Mais il y a aussi eu des baisses, notamment en 2022.
Les cryptomonnaies comme le bitcoin ont certes eu le vent en poupe cette année, notamment grâce à l'autorisation des ETF aux États-Unis. Mais l'expérience montre que les crypto-valeurs sont sujettes à des fluctuations.
Et qu'en est-il de l'or?
L'or ne rapporte quant à lui pas de dividendes. Mais son prix est passé de 280 à 2350 dollars depuis le début du millénaire, soit une multiplication par plus de huit. Selon les prévisions de l'UBS et de Goldman Sachs, le prix du métal précieux atteindra 2700 dollars dans les mois à venir. L'or ne convient pas seulement à la préservation du patrimoine, mais aussi à une certaine augmentation de la valeur du patrimoine: une hausse du prix de l'or de 350 dollars correspond à une augmentation d'environ 15%.