Les relations entre la Suisse et l'Europe s'annoncent plus tendues que jamais. D'abord parce que les syndicats ne comptent pas relâcher la pression en ce qui concerne la protection des salaires dans le cadre des Bilatérales III, ce qui complique les négociations avec l'UE.
Sur le mandat de négociations avec l'UE
Ensuite, à cause l'initiative des 10 millions portée par l'UDC. Celle-ci exige des mesures pour limiter l'immigration si la Suisse devait compter plus de dix millions d'habitants en 2050. Cette initiative cible également la libre circulation des personnes dans le cadre d'accords bilatéraux.
Depuis l'acceptation de l'initiative contre l'immigration de masse en 2014, on sait au Palais fédéral à quel point de telles initiatives de l'UDC en matière d'immigration sont féroces. La pénurie de logements et autres signes de «stress de densité» ont aujourd'hui remplacé la peur de la concurrence et des travailleurs étrangers souvent plus rentables, car moins bien payés sur le marché du travail.
Beat Jans se montre ouvert à un contre-projet
Un oui à l'initiative «La Suisse à 10 millions» réduirait à néant tous les efforts visant à rétablir des relations stables avec l'UE. Dans les couloirs du Palais fédéral, on évoque donc déjà le montage d'un contre-projet. Et c'est l'actuel ministre de la migration Beat Jans qui devrait s'y coller: «Il faut s'attaquer aux problèmes que pose l'immigration», a déclaré à Blick le conseiller fédéral en charge du dossier. «Par exemple, il faut s'intéresser à l'aggravation de la pénurie de logements dans les villes ou la forte pression sur les infrastructures. Nous travaillons déjà à une meilleure utilisation du potentiel de main-d'œuvre en Suisse.»
Le résultat des négociations autour des Bilatérales III, complété par d'autres mesures, pourrait faire office de contre-projet. Certains proposent de coupler directement le dossier européen à l'initiative de l'UDC. Enfin, les négociateurs suisses à Bruxelles évoquent également une clause de sauvegarde au cas où l'immigration en provenance de l'UE dépasserait un niveau supportable.
Les discussions avec la gauche vont bon train
L'objectif est en tout cas de couper l'herbe sous le pied de l'initiative, qui demande une telle clause. Si l'on ajoute à cela des mesures visant à protéger des salaires et encourager la construction de logements neufs, le Conseil fédéral devrait avoir le soutien de la gauche. Et d'après les informations de Blick, les conseillers fédéraux essayent aussi de se mettre les syndicats dans la poche. Beat Jans les a ainsi rencontrés et le ministre de l'Économie Guy Parmelin multiplient les discussions en marge de certaines rencontres.
Une récente décision du Conseil fédéral indique également que certaines décisions se préparent. Bien qu'il s'y soit longtemps opposé, Guy Parmelin a en effet décidé d'agir contre la hausse des loyers avec un paquet de quatre points.
Les partis bourgeois ne comptent pas se laisser faire
Les partis bourgeois ne devraient pas apprécier ces manœuvres contre l'initiative de l'UDC et travaillent déjà, eux aussi, sur un contre-projet. Ils misent sur une idée que le conseiller aux Etats PLR Andrea Caroni a introduit une taxe sur l'immigration dans le processus politique.
Celle-ci avait d'abord été proposée par l'économiste Reiner Eichenberger, proche de l'UDC et le Conseil des Etats s'y est déjà montré favorable. Différentes parties s'efforcent à présent de trouver comment aménager une telle taxe, de manière à ce qu'elle n'enfreigne pas la libre circulation des personnes.
La feuille de route pour un contre-projet n'est toutefois pas encore claire. Reste également à savoir ce qu'il faudrait exactement charger sur un tel train pour qu'il arrive à destination. Contrairement à l'initiative contre l'immigration de masse en 2014, quelque chose se passe maintenant chez les opposants.