C'est bien connu, les machines sont à l'arrêt dans de nombreuses entreprises le dimanche. En Suisse, tout tourne au ralenti le 7e jour de la semaine. Cela a des répercussions énergétiques sur le pays: la consommation d'électricité un dimanche est en moyenne 10% inférieure à celle d'un mercredi par exemple.
Si la pénurie d'énergie tant redoutée devait se produire cet hiver, l'interdiction de travailler le dimanche pourrait devenir un problème pour les entreprises. C'est du moins ce que pense la conseillère aux Etats Andrea Gmür (Le Centre). «En cas de pénurie d'énergie, il peut s'avérer indispensable pour les entreprises d'effectuer des travaux de maintenance lorsque la consommation d'énergie est moindre. C'est typiquement le cas la nuit et le dimanche», estime la Lucernoise. L'élue demande donc un assouplissement temporaire de la loi sur le travail en cas de pénurie d'électricité ou de gaz.
Briser les pics d'énergie
Cela signifie non seulement que les employés des shops de stations-service, les pasteurs ou les conducteurs de train (conformément à leurs habitudes), mais aussi les employés d'usine et les employés de bureau devraient travailler temporairement le dimanche ou la nuit, si nécessaire. Cela permettrait de «briser les pics» de consommation d'énergie, argumente la conseillère aux Etats. Un black-out pourrait ainsi être évité. Elle estime en outre que les entreprises ont besoin de plus de flexibilité dans la gestion du temps de travail de leurs collaborateurs en cas de contingentement.
«Il ne s'agit pas d'annuler la protection des travailleurs, souligne la politicienne du Centre. Il s'agit plutôt d'une mesure visant à garantir les emplois et à contrecarrer l'inflation.» Selon Andrea Gmür, travailler le dimanche pendant une courte période est toujours mieux que de perdre son emploi à long terme. Sa proposition prévoit que les entreprises doivent déposer une demande si elles souhaitent faire travailler leurs collaborateurs en dehors des horaires habituels. Cet assouplissement ne s'appliquerait qu'en cas de pénurie d'énergie.
Large soutien
Cette revendication bénéficie d'un large soutien. Vingt-cinq conseillères et conseillers aux Etats de droite ont signé l'intervention. Une majorité à la Chambre basse est donc certaine.
Même la gauche ne semble pas totalement opposée à cette idée. «Nous sommes tous d'accord: si une situation d'urgence devait effectivement se produire, il faudrait alors des solutions pragmatiques», déclare la conseillère nationale saint-galloise des Verts Franziska Ryser.
Elle estime toutefois qu'il ne sera pas forcément nécessaire de légiférer. En effet, le travail dominical temporaire peut déjà être autorisé dans certaines situations. L'employeur doit toutefois payer une prime de travail dominical de 50% à ses employés. «Je doute que les entreprises, qui sont déjà confrontées à des prix plus élevés et à des demandes d'augmentation des salaires, puissent encore payer un supplément pour le travail de nuit ou du dimanche. Cela représenterait des coûts importants», fait remarquer Franziska Ryser.
Pression sur le Conseil fédéral
Il serait bien sûr possible de supprimer, ou du moins réduire, ces suppléments en cas de situation d'urgence. Andrea Gmür confirme que l'option est envisagée. Elle estime qu'il est important de définir une réglementation spécifique pour une situation de pénurie, à l'image de ce qui a été mis en place pendant la pandémie. Elle craint que les oppositions soient trop véhémentes si la possibilité de travailler le dimanche et la nuit n'est pas explicitement inscrite dans la loi.
Malgré ce large soutien, il est impossible que la modification de la loi demandée entre en vigueur avant cet hiver. Andrea Gmür en est consciente. Elle espère que l'intervention sera un signe suffisamment fort adressé au Conseil fédéral pour qu'il agisse désormais de son propre chef.
(Adaptation par Thibault Gilgen)