Les conseillers d'État vaudois Rebecca Ruiz et Vassilis Venizelos, chargés respectivement de la Santé et de la Jeunesse, réagissent à une tribune publiée par Blick. Signée par d'éminentes personnalités du monde du droit et de la médecine, elle s'oppose au placement d'un bébé en foyer. La tribune affirme que la petite souffre. Les ministres assurent qu'elle va très bien.
Tout commence le 30 mai dernier. Une Lausannoise accouche au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) d'une petite fille, aboutissement d'une procréation médicalement assistée (PMA) entreprise au Danemark.
Possibles problèmes psychiques de la mère
La maman de 39 ans s'est vue retirer son nourrisson après quelques jours. Des désaccords entre elle, les soignants et les sages-femmes sont cités par sa sœur. Le cas est dénoncé auprès de l'autorité de protection de l'enfant et de l'adulte (APEA). Un psychiatre signale de possibles problèmes psychiques de la mère, qui ne montre guère d'émotions envers sa fille.
Depuis le 6 juin, le bébé vit à l'Abri, un foyer des hauts de Lausanne. Sa maman peut la voir une fois par semaine, une heure et demie, sous surveillance. La famille n'est pas autorisée à visiter la petite. La tante de cette dernière, psychologue, chargée de cours à l'Université de Lausanne, alerte la presse.
Dépression liée à la séparation
La tribune publiée le 4 mars par Blick réunit 23 signataires, dont l'ancien sénateur vaudois Eric Rochat, médecin, et des universitaires de Suisse et d'Europe. Ils tancent les autorités, choqués du placement en foyer d'un nourrisson par la Direction générale de l'enfance et de la jeunesse (DGEJ).
La tribune dénonce les agissements du «CAN team» du CHUV (ndlr: Child Abuse and Neglect Team, dont la mission est notamment de dénoncer des cas de maltraitance). En outre, la mère aurait été jugée, notamment pour son choix de recourir à la PMA. Et surtout, le bébé serait en mauvaise forme et aurait été retrouvée en état de mort apparente à l'Abri, le 22 juin.
La tribune développe: «L’hospitalisme est un phénomène de dépression et de régression psychophysique des bébés séparés précocement de leur mère (...), lit-on dans cette tribune. La séparation maternelle risque de conduire un nouveau-né à se laisser mourir par manque de contact avec le premier objet d’attachement (la mère)».
«Ce bébé se porte bien»
Contacté par Blick, le ministre vaudois de la Jeunesse, de l’Environnement et de la Sécurité (DJES) Vassilis Venizelos tient tout d'abord à contredire l'idée que le bébé irait mal. «Je demande régulièrement des renseignements sur l’évolution de ce cas et je peux vous assurer que ce bébé se porte bien, qu’il est bien pris en charge et que son évolution est très positive, contrairement à ce qui est affirmé dans cette tribune, assure l'élu Vert. Son bien-être et son bon développement sont au cœur de l’action de mon département depuis le signalement fait par le 'CAN-Team'.»
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Par ailleurs, affirme le DJES, «si un enfant est placé, c'est qu’après une pesée des intérêts, il a été jugé que le maintien au sein de sa famille et l’importance de préserver les liens familiaux ne suffisaient pas en regard de son besoin de protection accru.» Le placement, rappelle le Département, est une mesure d'ultime recours, qui concerne environ 13% des situations par année, et assez peu de bébés.
Prodiguer «les soins nécessaires»
Du côté du Département de la Santé et de l'Action sociale, la ministre socialiste Rebecca Ruiz a chargé le médecin cantonal d'enquêter sur la mesure de placement. Ce qu'elle confirme, parlant d'une «situation très complexe» et «considérée avec beaucoup d'attention». Dans la tribune, les signataires lient ce mandat à l'aspect «alarmant» de la situation. Or, il s'agirait d'une pratique courante.
«Comme c’est le cas systématiquement lors de signalements concernant des professionnels de la santé ou des institutions sanitaires, j’ai mandaté le médecin cantonal pour une investigation sur les aspects sanitaires de la prise en charge de cette situation, indique la conseillère d'État. Cette procédure est usuelle et non pas exceptionnelle. Celle-ci a mis en lumière que les soins nécessaires ont été prodigués à la petite fille.»
La procédure n'est pas encore terminée. En effet, la mère du bébé a fait recours auprès du Tribunal fédéral contre la décision de la justice cantonale, rendue en mesures provisionnelles, de placer l'enfant en foyer. «Par ailleurs, la décision de placement doit être prochainement examinée sur le fond par la Justice de Paix, notamment à la lumière d’une expertise qui doit être rendue ces prochaines semaines», complète le Département de la jeunesse.