Tir de trophées de bouquetins
Des Américains font de la pub pour chasser à Zermatt

Il y a deux ans, le Valais a interdit la chasse aux trophées de bouquetins, très appréciée des riches touristes étrangers. Malgré cela, des Américains font à nouveau la promotion de la pratique. Les gardes-chasse locaux, eux, ne respectent pas toujours la loi.
Publié: 25.09.2022 à 08:31 heures
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Dernière mise à jour: 25.09.2022 à 11:33 heures
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L'organisateur de chasse américain Global Pursuit utilise cette photo prise en Valais pour promouvoir l'abattage de bouquetins près de Zermatt.
Photo: Global Pursuit
Daniel Kestenholz

«Aventures de chasse en montagne sur mesure»: voilà la promesse de l’organisateur de parties de chasse américain, Global Pursuit, pour attirer les touristes dans nos Alpes valaisannes. Le trophée à la clé? Des bouquetins de la région de Zermatt.

Le problème, c’est que le canton a tout simplement interdit la pratique il y a deux ans: la chasse aux trophées de bouquetins et de chamois a été prohibée. Cet obstacle ne semble pas freiner les riches chasseurs étrangers friands de cette cruelle activité, comme l’a remarqué la «SonntagsZeitung».

Promesse de «guides de chasse locaux»

Sur son site Internet, Global Pursuit fait de la publicité pour ses activités, photos d’animaux abattus (les fameux «trophées») à l’appui. Parmi les clichés, celui d’un bouquetin abattu près de Zermatt se distingue. L’arrière-plan de la photo ne laisse pas de place au doute: les montagnes Castor, Pollux et Breithorn sont reconnaissables, tout comme le petit Cervin à droite de l’image.

L’entreprise affirme que la Suisse est «LE pays» pour chasser dans les Alpes… avant de reconnaître que l’obtention d’un permis de chasse est «assez compliquée». Il faut poser sa candidature au moins un an avant la chasse pour le système de loterie d’attribution des licences. Les permis sont également achetés par des équipementiers et vendus aux enchères par des organisateurs. L’obtention d’un permis pour un bouquetin peut être un processus long, alors que pour le chamois, c’est «assez simple».

La chasse en Suisse est très bien organisée et dure en général deux jours. Les clients peuvent compter sur les «guides de chasse locaux». Ceux-ci «connaissent les lieux de séjour des animaux et guident leurs chasseurs vers des trophées très âgés ou extrêmement grands».

Peu regardants sur la loi

Interrogées à ce sujet, les autorités valaisannes disent avoir les mains liées. Elles ne peuvent pas prescrire aux compagnies de voyage ce qu’elles peuvent promouvoir sur leur site. En principe, les personnes venant de l’étranger ne peuvent plus effectuer de tirs, assure le service de la chasse, de la pêche et de la faune, interrogé par le média alémanique. «Seules les personnes domiciliées en Valais et titulaires d’une patente d’un autre canton ou les chasseurs titulaires d’une patente valaisanne sont autorisés à chasser.»

Malgré ces affirmations, la réalité est tout autre: des gardes-chasse valaisans ont déjà dû comparaître devant la justice parce qu’ils n’avaient pas respecté la loi à la lettre. Certains ont même été condamnés. L’interdiction cantonale de la chasse aux trophées n’a d’ailleurs pas empêché un Américain de publier il y a un an un reportage filmé sur son abattage de bouquetins près de Saint-Maurice en Valais.

Une pratique controversée

Cette saison, l’autorisation a été donnée de tirer 583 bouquetins dans le canton. Soixante-quinze d’entre eux sont des tirs dits «tirs clients». Dernièrement, les contingents autorisés n’ont plus été épuisés, indique le canton. Ce sont souvent les animaux les plus âgés et les plus grands qui sont abattus. Ce sont eux qui rapportent le plus d’argent au canton. Plus les cornes sont grandes, plus le montant dû est élevé. Pour un bouc de 90 centimètres de long, on paie par exemple 3750 francs.

Mais la résistance contre la chasse aux trophées se fait entendre au sein même du Valais. La biologiste et députée valaisanne Brigitte Wolf s’est elle-même rendue à la haute chasse en tant qu’accompagnatrice. Les critères les plus importants pour les tirs devraient être de «nature biologique» pour la régulation, estime Brigitte Wolf. La plupart du temps, les boucs importants pour la reproduction sont aussi les plus âgés. «Autoriser leur abattage uniquement parce qu’ils rapportent le plus d’argent est une erreur», déplore la biologiste.

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