Les pelleteuses et les grues de chantier font aujourd'hui partie du panorama des régions alpines suisses au même titre que les pylônes de remontées mécaniques et les canons à neige. Les millionnaires ne manquent pas pour assurer un avenir lucratif aux montagnes suisses. Des Egyptiens ou des Thaïlandais construisent dans nos Alpes des complexes touristiques à plusieurs millions de dollars, mais ce sont surtout les Américains qui s'en chargent actuellement.
Vail Resorts, par exemple, a placé ses deux premiers complexes européens en Suisse. Depuis 2022, Andermatt (UR) fait partie du portefeuille, et depuis 2024, Crans-Montana (VS). Les attentes qui y sont liées sont presque aussi élevées que les investissements. A Crans-Montana, Vail Resorts offre un avenir, selon le directeur du tourisme Bruno Huggler. L'investisseur américain fait de la station de ski valaisanne une «région modèle pour un tourisme durable toute l'année», a commenté Bruno Huggler devant les médias ce mercredi.
Des millions injectés
La commune investit 60 millions de francs pour l'année en cours, Vail Resorts investit 30 millions de francs supplémentaires jusqu'en 2028. L'argent sera principalement utilisé pour la modernisation des infrastructures existantes: les remontées mécaniques, les liaisons de transport ou les réservoirs d'eau. Tout cela pour attirer de nouveaux hôtels.
Après l'ouverture du premier «Winter-Resort» de la chaîne thaïlandaise Six Senses à Crans-Montana en 2023, une nouvelle zone industrielle et commerciale est en train de voir le jour pour 10 millions de francs. La maison de mode italienne Fendi réalisera d'ici 2026 un projet immobilier de résidences privées dans le village.
Andermatt transformé
Le village de montagne uranais d'Andermatt n'est pas en reste. Deux décennies après l'arrivée du milliardaire égyptien Samih Sawiris, un nouveau quartier prospère avec 42 bâtiments, 650 appartements, 25 villas, un centre sportif et de loisirs, une salle de concert, un terrain de golf et les hôtels cinq étoiles Chedi et Radisson Blu.
Samih Sawiris n'est pas encore rassasié. D'ici 2027, un autre hôtel de 66 chambres et 164 appartements verra le jour. De plus, avec Andermatt Swiss Alps AG, Samih Sawiris développe également la partie grisonne du domaine skiable, près de Sedrun (GR): Pour 170 millions de francs, la station de Dieni s'agrandit avec 13 nouveaux bâtiments. Et au-dessus de Sedrun, un nouveau restaurant de montagne a ouvert ses portes juste à temps pour le début de la saison le week-end prochain.
A cela s'ajoute un investissement de 20 millions de Vail Resorts dans l'infrastructure d'Andermatt pour améliorer l'enneigement, les remontées mécaniques et les restaurants. Les hôtes étrangers, mais aussi les Suisses, devraient en profiter. Andermatt est devenu un hotspot alpin, mais pas encore au même niveau que Saint-Moritz (GR) ou Zermatt (VS).
Les Suisses s'y mettent aussi
Mais on pourrait se passer des Américains et des Egyptiens. Le Tessinois Stefano Artioli investit actuellement 300 millions de francs à San Bernardino (GR) pour faire de ce village du Misox un pôle d'attraction touristique des sports d'hiver. Dans la première phase du projet, Artiolis San Bernardino Swiss Alps a investi 80 millions de francs pour la remise en état des remontées mécaniques, la rénovation de l'hôtel Brocco & Posta et la construction de 30 nouveaux appartements. Un investissement qui a permis de créer 30 emplois fixes, a précisé une porte-parole à Blick.
Dès cette saison hivernale, de nouveaux services s'ajoutent: cabinet d'urgence médical, coiffeur, studio de cosmétique et de massage, terrain de padel et deux nouveaux hôtels avec un total de 75 chambres et 24 appartements. D'ici 2032, des investissements seront réalisés dans une installation d'enneigement, un nouveau Resort & Spa, des parkings et d'autres infrastructures.
Le premier hiver depuis la relance de la destination aurait été positif. Avec 3500 nuitées et un total de 40'000 visiteurs, San Bernardino est encore un petit hotspot. Mais il est ambitieux.
Des stations valaisannes dans le collimateur
Et il en existe d'autres en Suisse. Par exemple, le petit village de 1500 habitants d'Hérémence (VS). L'entrepreneur Philippe Lathion y ouvrira le Dixence Resort en décembre. Celui-ci devrait générer 80'000 nuitées par an. Dans les années à venir, Philippe Lathion veut établir cinq autres complexes touristiques similaires en Suisse.
Dans le village d'Obergesteln (VS), qui compte 209 habitants, l'entrepreneur Jean Claude Bregy prévoit de construire un complexe touristique de 130 appartements à louer pour 100 millions de francs. L'investisseur français Christian Mars souhaite injecter 7 millions de francs dans le domaine skiable valaisan de Saas-Grund. Ce ne sont là que quelques exemples, d'innombrables nouveaux projets ne sont pas encore connus.
Le point commun de ces projets est leur approche globale. Les domaines skiables deviennent de plus en plus des destinations touristiques à l'année. Cela augmente le potentiel de recettes. La demande est assurée par des hôtels modernes, des remontées mécaniques et des attractions ainsi que par de nouveaux logements.
Or, ces derniers sont pour la plupart des résidences secondaires onéreuses qui peuvent être sous-louées de manière lucrative. «Les prix des résidences secondaires ont augmenté de 48% depuis 2015, et de 14% rien qu'en 2023», explique Donato Scognamiglio du conseiller immobilier IAZI à Blick. Un terrain attractif pour les investisseurs. Pour les locaux et les saisonniers, en revanche, il manque souvent des logements, ce qui pourrait devenir un problème avec cette croissance effrénée.