Cette déclaration de Reto Gurtner, chef du groupe Weissen Arena, fait froncer les sourcils. «Dans dix ans, le forfait journalier coûtera entre 200 et 300 francs», a-t-il récemment déclaré à la radio et à la télévision romanche RTR. A Flims-Laax, les amateurs de sports d'hiver ont payé en moyenne 97 francs la saison dernière pour s'amuser dans la neige.
Les prévisions de Reto Gurtner signifieraient une augmentation des prix de 100 à 200%. Mais comment le roi de la montagne arrive-t-il à une telle conclusion? Et qui pourra débourser une telle somme pour aller skier? Blick s'est entretenu avec un expert du tourisme.
Pourquoi les domaines skiables deviennent-ils si massivement plus chers?
Au cours des dix dernières années, le prix d'une carte journalière de ski a augmenté en moyenne de 15%. Les modèles de prix dynamiques – appelés Dynamic Pricing – des domaines skiables ont notamment contribué à cette hausse des prix. Le patron de Flims-Laax, Reto Gurtner, justifie la hausse des prix par l'inflation générale.
Jürg Stettler, directeur de l'Institut de tourisme et de mobilité à la Haute école de Lucerne, juge réaliste l'estimation de Reto Gurtner concernant le prix d'un abonnement. «La tendance va très probablement dans cette direction», lance-t-il.
Mais pour lui, d'autres facteurs jouent un rôle dans cette hausse. Les domaines skiables ont des coûts beaucoup plus élevés que par le passé en raison du climat. «Cela inclut l'enneigement artificiel, qui devient nécessaire parce que nous avons des hivers de plus en plus chauds. La préparation des pistes coûte de plus en plus cher», explique le directeur de l'institut.
Les abonnements de ski vont-ils aussi coûter plus cher?
Non. «L'évolution des prix des forfaits journaliers est nettement plus élevée (15%) que celle des abonnements de ski saisonniers. Il en sera de même à l'avenir», pronostique Jürg Stettler. Dans les domaines skiables qui font partie du Magic Pass, le prix des forfaits saisonniers a même brièvement baissé depuis son introduction. Le prix a à nouveau augmenté, mais dans une proportion beaucoup plus faible que pour les cartes journalières.
Quelle est la gravité de la disparition des domaines en Suisse?
Le changement climatique entraîne chez nous aussi des mois d'hiver de moins en moins enneigés. Aux altitudes inférieures à 800 mètres, le nombre de jours d'enneigement a diminué de moitié depuis 1970, selon Météo Suisse. Même à des altitudes supérieures à 2000 mètres, on constate un recul d'environ 20%. Pour les domaines skiables situés à basse altitude, cette situation est problématique. Les experts estiment que les domaines skiables situés entre 1000 et 1500 mètres d'altitude ne seront plus rentables à l'avenir et pourraient donc disparaître en grande partie.
«Avec l'introduction des modèles de prix dynamiques, de nombreux domaines skiables ont pu améliorer leur situation», explique Jürg Stettler. De plus, les remontées mécaniques ont une importance systémique et sont essentielles pour l'économie suisse, car «la Suisse a une réputation de nation de skieurs». De plus, l'État est prêt à compenser le manque à gagner par des subventions ou des prêts sans intérêts. «La question est de savoir combien de temps et dans quelle mesure cela va encore durer», estime Jürg Stettler.
La mort des domaines entraîne-t-elle une hausse des prix?
En principe, oui. Mais selon Jürg Stettler, l'intervention de l'Etat freine les effets de la hausse des prix. «L'évolution est moins rapide que si le marché était libre. Mais elle a tout de même lieu.»
Les amateurs de sports d'hiver seront-ils prêts à payer ces prix?
L'expert en tourisme estime que les consommateurs du pays sont encore prêts à payer. Mais selon Jürg Stettler, il y aura peu à peu une division du marché. À savoir entre «ceux qui peuvent se le permettre et ceux qui skient avec passion, qui sont souvent sur les pistes et investissent donc dans une carte de saison pour économiser des frais».
Jürg Stettler compare la future culture du ski suisse à celle des États-Unis. Selon lui, l'imaginaire selon lequel chaque Suisse dévale les pistes en hiver appartient de plus en plus au passé. Certes, plus de 30% des Suisses pratiquent encore régulièrement le ski, ce qui n'est pas comparable aux 4 à 7% des Américains. Mais dans notre pays aussi, le ski devient de plus en plus un produit haut de gamme.
Le ski devient-il donc un sport d'élite?
Jürg Stettler trouve le terme «élite» inapproprié. Il est néanmoins d'avis que «la devise 'tout le monde skie' n'existera plus en Suisse. À l'avenir, seuls les gens aisés ou les passionnés de ski pourront encore skier.» Les autres ne pourront plus se le permettre.