À la TV, à la radio, dans les journaux: il est partout, Philippe Bauer. Le conseiller national neuchâtelois n'avait jamais été aussi exposé que durant cette campagne référendaire contre l'aide aux médias. Un paradoxe, puisque le libéral-radical s'emploie à les torpiller, ou du moins le modèle de subvention temporaire de sept ans, concocté par le Parlement. Un paquet mal ficelé, grommelle à qui veut l'entendre l'avocat de la Grande Béroche.
Pourquoi un tel engagement dans ce dossier? C'est un peu un hasard, rétorque Philippe Bauer. Tout est parti d'une invitation du président de l'UDC Vaud, Kevin Grangier, à la conférence de presse du comité référendaire. Et comme le conseiller national neuchâtelois n'a «pas peur de passer pour le grand méchant», il a accepté de s'afficher en première ligne.
Trois ans après le rejet de l'initiative «No Billag», les médias doivent à nouveau affronter un vote populaire. Les Suisses diront ce dimanche s'ils soutiennent une augmentation de 151 millions de francs par année de l'aide à une branche mise à mal par la diminution de ses recettes publicitaires. Ce soutien financier est en ballottage défavorable, selon les derniers sondages.
Au fil des années, les recettes des médias traditionnels ont fondu au profit des plateformes numériques et des médias sociaux. La conséquence en est un appauvrissement du paysage médiatique suisse. Plus de 70 journaux, dont l'Hebdo en Suisse romande, ont disparu depuis 2003.
La couverture des événements suisses s'est affaiblie, provoquant une carence d'informations, notamment régionales et locales, affirme la ministre de la communication Simonetta Sommaruga. Et de rappeler que le paquet d'aide aux médias «garantit que les habitants de toutes les régions continuent d'être informés de ce qui se passe à proximité de chez eux».
Pour le comité référendaire «Non aux médias contrôlés», ces aides étatiques décrédibilisent les médias. Ils perdent leur indépendance et ne peuvent plus jouer leur rôle de quatrième pouvoir.
Trois ans après le rejet de l'initiative «No Billag», les médias doivent à nouveau affronter un vote populaire. Les Suisses diront ce dimanche s'ils soutiennent une augmentation de 151 millions de francs par année de l'aide à une branche mise à mal par la diminution de ses recettes publicitaires. Ce soutien financier est en ballottage défavorable, selon les derniers sondages.
Au fil des années, les recettes des médias traditionnels ont fondu au profit des plateformes numériques et des médias sociaux. La conséquence en est un appauvrissement du paysage médiatique suisse. Plus de 70 journaux, dont l'Hebdo en Suisse romande, ont disparu depuis 2003.
La couverture des événements suisses s'est affaiblie, provoquant une carence d'informations, notamment régionales et locales, affirme la ministre de la communication Simonetta Sommaruga. Et de rappeler que le paquet d'aide aux médias «garantit que les habitants de toutes les régions continuent d'être informés de ce qui se passe à proximité de chez eux».
Pour le comité référendaire «Non aux médias contrôlés», ces aides étatiques décrédibilisent les médias. Ils perdent leur indépendance et ne peuvent plus jouer leur rôle de quatrième pouvoir.
Une posture courageuse en Suisse romande, où les parlementaires ont plutôt affiché leur soutien à la loi. Même des Libéraux-radicaux soutiennent le paquet d'aide aux médias, comme Laurent Wehrli (VD) ou Johanna Gapany (FR). Pas de quoi ébranler le Neuchâtelois, résolument opposé à cette «pompe à subventions».
Philippe Bauer, quand des médias mourront parce que vous aurez combattu victorieusement le paquet censé leur venir en aide, vous leur direz quoi? Que c'est la dure loi du marché?
Je ne pense pas que les médias vont disparaître. La presse écrite a poussé les mêmes cris d’orfraie lors de l’arrivée de la radio et de la télévision, et les journaux sont pourtant toujours là et bien portants. C’est une question de modèle économique: certains voudraient faire entrer les médias locaux dans le giron du service public, moi je défends le libéralisme économique.
Reste que le secteur est en difficulté: les rentrées publicitaires sont en chute libre au moment où les médias font leur transition numérique.
Pourquoi mes impôts devraient-ils financer la transition numérique des médias? Tous les secteurs économiques font face à ces enjeux. Moi-même, j’ai dû me séparer d’un collaborateur en raison des changements dans mon étude. C’est triste, mais c’est ainsi.
Sans vouloir faire injure à votre activité professionnelle, ne pensez-vous pas que les médias sont essentiels pour la société démocratique?
Aujourd’hui, on entend partout les médias considérer qu’ils ont créé la démocratie. C’est faux! La démocratie existait avant les médias, qui sont simplement un élément qui participe à la formation de l’opinion — au même titre que bien d’autres, les discussions au bistrot, sur les réseaux sociaux ou les fascicules de votation.
Le paysage médiatique s’est beaucoup rétréci ces dernières années. Cela vous laisse insensible?
Je comprends que la profession lutte pour sa survie. Il y avait à un moment donné beaucoup de sabotiers, et il y en a presque plus aujourd’hui parce que le monde change. Pour ce qui est des médias, il y a toutefois un modèle économique qui fonctionne, c’est le numérique.
Pourquoi ne voulez-vous pas de cette aide ponctuelle et de transition?
Parce que le numérique touche tous les domaines! Pourquoi devrions-nous aider les médias et pas les autres secteurs? Vous savez, dans mon étude, nous passons à Justitia 4.0 (ndlr: un programme de numérisation de la justice suisse). Je suis bien obligé de m’adapter et d’employer mes gros doigts gourds sur mon clavier d’ordinateur. Je ne remets pas en cause le soutien existant aux médias, mais les aides dans le domaine du numérique, c’est la ligne rouge.
Pourquoi?
Parce que ce serait un oreiller de paresse! Au moment où, après des années à gagner de l’argent, les médias doivent se réinventer et adapter leur modèle, on veut les arroser de subventions à hauteur de plus d’un milliard de francs. Je suis favorable au soutien existant à la distribution postale ou matinale des journaux, mais en voulant doubler les aides et ajouter le numérique, le Parlement est allé trop loin.
Vous acceptez de prendre le risque qu’il n’y ait plus de médias locaux?
Il y en a, et ils fonctionnent! Regardez les périodiques gratuits, comme «GHI» ou «Biel/Bienne» par chez moi. Ils arrivent très bien à tourner avec la publicité, et ils rendent compte de la vie de la société. On y trouve les débats du Conseil général de La Grande Béroche ou les résultats de la 2e équipe du FC Colombier.
Vous estimez que ce paquet est «mal ficelé». Pourquoi?
Parce qu’on y a mis n’importe quoi. Il y a des choses que je peux tout à fait m’imaginer sauver. Par exemple une répartition différente de la redevance radio/TV qui inclurait les médias locaux. J’ai pris l’engagement vis-à-vis de RTN et de Canal Alpha que je déposerais quelque chose en ce sens. Le modèle médiatique évolue, avec des radios et TV locales toujours plus importantes et des programmes de qualité.
À vous entendre, vous visez donc plutôt la SSR?
Je soutenais l’initiative «No Billag», mais je respecte le choix du peuple qui n’en a pas voulu et a voté deux fois en faveur de la loi sur la radio-télévision (LRTV). On a souhaité maintenir le service public et j’en prends acte, je vis avec et je dois désormais, en tant qu’élu, faire en sorte qu’il soit le plus performant possible. Comment? Je pense que les agences de presse ont un grand rôle à jouer. Je suis favorable au fait de les aider. Dans mon esprit libéral, j’ai beaucoup plus de peine avec l’aide à la formation permanente des journalistes, par exemple.
Vous brandissez enfin le spectre d’une perte d’indépendance. Vous pensez vraiment qu’une aide transitoire portant sur une petite partie du budget des médias va museler les journalistes?
Dans d’autres domaines, on estime qu’un actionnaire qui représente 10% du capital peut faire valoir des droits. Si l’État participe à une part de cet acabit d’un média, je pense que l’indépendance des médias est déjà en péril. Il faut absolument la préserver de tout risque d’influence.