Le 26 mai, le Conseil fédéral mettait abruptement fin aux négociations sur l’accord-cadre avec l’UE. Depuis, le silence le plus complet règne à Berne. Les partis ont préféré éviter la question, source d’embarras. Seule l’UDC a célébré la rupture des négociations par une série de feux de joie.
Le Conseil fédéral n’était pas non plus pressé de trouver un plan B. Le ministre des Affaires étrangères Ignazio Cassis a expliqué en août qu’il ne fallait pas s’attendre à une «définition commune de nos relations» avant 2024. Trois ans sans que le Conseil fédéral n’ait de stratégie de politique européenne? Cela paraît long.
Cette semaine, une nouvelle a fait irruption dans la salle du Conseil fédéral: la Suisse est menacée d’une pénurie d’électricité durant l’hiver, et ce à partir de 2025. Une conséquence concrète de la rupture de l’accord-cadre.
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Le PLR se dédouane
Le PLR considère le Conseil fédéral comme le premier responsable. «Il doit analyser ce qui n’a pas fonctionné dans ce processus de négociation — de huit ans — et pourquoi l’UE refuse de nous entendre», tonne Damian Müller, membre du Conseil des États. «Et après, il doit venir avec de nouvelles propositions.»
Il ne sert à rien que chaque parti fasse des propositions sur la manière de façonner la relation avec l’Union européenne, souligne Damian Müller. «Cela rendra la situation aussi confuse qu’avec l’accord-cadre».
N’est-ce pas là fuir ses responsabilités en tant que parti pour tout mettre sur le dos du Conseil fédéral? Le conseiller aux Etats le réfute et se réfère au «plan d’action à trois piliers» du parti, qui prévoit, entre autres, la conclusion d’un troisième paquet bilatéral, dont un accord sur l’électricité.
Le Centre veut un pied d’égalité avec l’UE
Contrairement au PLR, le Centre fait des propositions audacieuses depuis cette semaine. Son président Gerhard Pfister a évoqué l’idée d’étendre les lignes à haute tension de Bâle à Chiasso, dans une interview accordée à l'«Aargauer Zeitung».
Le but? Exiger en contrepartie d’être traitée «sur un pied d’égalité» par l’UE en matière de sécurité d’approvisionnement et créer de la bonne volonté avec celle-ci.
Nécessité d’un accord sur l’électricité
Cependant, les enquêtes menées auprès du gestionnaire de réseau Swissgrid montrent que ce scénario est plutôt irréaliste. Notamment parce que l’Italie et l’Allemagne devraient étendre leurs lignes pour qu’un tel réseau électrique soit réalisable. Et le délai de 30 ans avant la mise en service de nouvelles lignes à haute tension ne permet pas non plus de s’en servir comme monnaie d’échange.
Comme le PLR, le Centre préconise une solution sectorielle au blocage avec l’UE. En d’autres termes, la négociation d’un accord sur l’électricité abordant la question du règlement des différends.
Le problème est que l’UE a jusqu’à présent refusé catégoriquement la conclusion de nouveaux accords tant que les questions institutionnelles ne sont pas réglées. Il est peu probable que Bruxelles s’adapte soudainement à la Suisse.
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Le PS resserre les rangs
Le Parti socialiste estime que le moment est venu de resserrer les rangs après avoir choqué une grande partie de son propre électorat en dédaignant l’accord-cadre.
Il y a deux mois, le PS, ainsi que ses partis frères d’Allemagne, d’Autriche, de France et d’Italie, ont envoyé un appel à Berne et à Bruxelles. «C’est la première fois qu’un parti suisse développe une position commune avec ses partis frères sur la politique européenne», déclare le conseiller national socialiste Jon Pult (Grisons), soulignant l’importance de cette déclaration.
Sous sa direction, un groupe de travail interne au parti élabore actuellement des propositions sur la manière de résoudre le blocage de la relation avec l’UE. Des solutions concrètes ne sont pas encore disponibles. Au début de l’année 2022, le groupe de travail veut soumettre ses résultats à la direction du parti. En octobre, tout le parti s’y attellera.
La grande table ronde d'Ignazio Cassis
Si le PS veut réapparaître comme une force constructive sur la question européenne, on ne peut pas en dire autant du ministre des affaires étrangères Ignazio Cassis. Jusqu’à présent, il n’a pas fait de propositions détaillées. Le Conseil fédéral dans son ensemble est également réticent à remettre les questions européennes sur la table.
Le chef du DFAE va prochainement s’entretenir avec les tous acteurs suisses de la politique européenne. Un premier échange sous forme de table ronde sur les relations Suisse-UE est prévu avec des représentants de l’économie, de la science et de la société civile, dont l’Action pour une Suisse indépendante et neutre (ASIN), le groupe Compass/Europe et Swissuniversities.