Être bien assuré en Suisse ne signifie pas automatiquement l'être à l'étranger. Un accident ou une maladie peut très vite creuser un trou béant dans le porte-monnaie, même non loin de la frontière suisse. Heinrich Fasel de Tafers (FR) en a récemment fait la douloureuse expérience.
Lors de ses vacances à ski à la station de Kühtai en Autriche en décembre dernier, Heinrich a fait une chute et s'est cassé l'épaule. Heureusement, il se fait rapidement opérer dans le Tyrol et peut reprendre son travail peu après son retour en Suisse. Mais la deuxième mauvaise nouvelle ne tarde pas: son assurance accident ne prend en charge que 530 des quelque 7200 francs de frais d'opération – et ce uniquement parce que Heinrich ne s'est pas fait soigner dans un hôpital répertorié par ladite assurance. Il déplore: «Personne ne m'a prévenu! Au contraire: on m'a dit qu'il n'y avait jamais eu de problèmes avec la Suva auparavant».
Même pas 10% des coûts pris en charge
Heinrich est assuré contre les accidents par son employeur auprès de la Suva. Dans une décision, celle-ci justifie la maigre prise en charge des coûts par un accord entre la Suisse et l'Autriche. Celui-ci garantit aux citoyens de l'Etat partenaire la même assurance-accidents standard qu'à ses propres citoyens. Dans le cas de Heinrich, cela signifie que même pas 10% de ses frais d'opération lui seront remboursés. «C'est horrible ce qu'ils me font» s'exclame le Fribourgeois.
Heinrich s'était d'ailleurs fait opérer en Autriche pour que son temps de guérison soit le plus court possible, les indemnités journalières versées par la Suva auraient ainsi été très basses. «Les douleurs étaient supportables. Mais mon médecin m'a dit qu'à mon retour en Suisse, je devrais probablement attendre au moins deux semaines avant de pouvoir me faire opérer.»
Heinrich ne sait pas comment la Suva est arrivée à une prise en charge des coûts de moins de 10%. Malgré plusieurs demandes, il n'a pas reçu de réponse à ce sujet. Il ironise: «S'ils peuvent me prouver que la même opération n'aurait coûté que 530 francs en Suisse, je m'excuserai et paierai volontiers le reste moi-même. Mais cela n'arrivera pas». Il a demandé à un ami médecin suisse et celui-ci estime les coûts de l'opération dans notre pays à au moins 11'000 francs.
Les assurances ne dévoilent rien
Malgré la levée du secret professionnel, Blick n'a pas reçu non plus de calcul détaillé de la Suva. L'assurance n'en aurait pas elle-même, car il aurait été établi par la caisse de santé autrichienne ÖGK. Mais cette dernière ne veut pas non plus fournir de décompte précis. Elle écrit toutefois que le remboursement des frais de Heinrich correspond aux tarifs. «Si Fasel avait fait réaliser son opération par un partenaire contractuel de ÖGK (par exemple un hôpital public), le traitement aurait été facturé directement (à l'exception d'éventuelles quotes-parts).»
Selon Heinrich, la clinique lui a été recommandée par le premier médecin qui l'a soigné. «La Medalp Sportclinic est spécialisée dans les accidents de ski. Même les skieurs professionnels y sont opérés.» Et effectivement, cinq mois après l'accident, on ne voit plus qu'une petite cicatrice sur l'épaule de Heinrich. Le Fribourgeois explique qu'il avait également parlé au préalable de son assurance avec le médecin autrichien. «Il m'a dit qu'il n'avait jamais eu de problème de prise en charge des frais avec la Suva.»
Des mois d'attente et de mauvaises informations
Le résultat final du décompte n'est pas la seule raison pour laquelle Heinrich se dit déçu par la Suva. «Tout le processus a duré des mois et j'ai toujours dû moi-même insister pour obtenir des mises à jour.» De plus, il aurait été mal informé à plusieurs reprises. «Ils disaient qu'ils prendraient en charge les coûts, mais pas du tout. Ils disaient qu'ils allaient retarder les factures – puis soudain les rappels sont arrivés.»
Selon la Suva, c'est à nouveau l'ÖGK qui est responsable de la longue durée de traitement. «Nous n'avons malheureusement pas d'influence directe sur ce point.» Elle présente néanmoins une excuse globale: «Si nous avons commis des erreurs et que les personnes accidentées ne se sentent pas soutenues de manière optimale, nous le regrettons». Pas assez pour Heinrich. Il questionne: «Pourquoi est-ce qu'on prélève autant d'argent sur mon salaire?»