Le temps est bon, le ciel est (enfin) bleu. En pleine période de vacances, l'occasion est parfaite pour faire le point sur le tourisme en Suisse. Martin Nydegger, directeur de Suisse Tourisme, revient pour Blick sur un début d'été compliqué, marqué par les intempéries en Valais et au Tessin. Il fait aussi le point sur l'évolution du marché et sur la menace du tourisme de masse. Interview sous le soleil zurichois.
Martin Nydegger, quelle est la définition des vacances parfaites selon vous?
Quand je rentre et que j'ai vraiment le blues pendant deux ou trois jours. Si je peux repartir le lundi comme si de rien n'était, c'est que ce n'était pas de si bonnes vacances.
À lire aussi sur les vacances et le tourisme
Où préférez-vous voyager?
J'ai la chance de pouvoir voyager souvent en Suisse grâce à mon travail. Parfois, j'y ajoute un week-end à titre privé. La Suisse est un pays tellement varié. Quand je suis en Suisse romande, par exemple, je deviens un citadin. Je trouve que Genève est une ville fabuleuse. Sinon, je suis plutôt du genre montagnard. C'est lié à mon passé. Je suis un fils de paysan. Je suis surtout à l'aise dans la nature.
Mais vous partez aussi de temps en temps en vacances à l'étranger?
Bien sûr. Je trouve cela normal. Ma partenaire vient du Brésil, de Rio de Janeiro. Nous y sommes allés l'automne dernier. C'est une ville incroyablement belle et impressionnante. Et il y avait beaucoup moins de touristes que prévu.
Lorsque vous voyagez en Suisse à titre privé, parvenez-vous à vous déconnecter ou réfléchissez-vous constamment à ce qui pourrait encore être amélioré dans les endroits où vous allez?
Je suis totalement prisonnier de ma «déformation professionnelle». Mais ce n'est pas un problème. Ce n'est pas comme si mon travail était un sujet difficile. Il s'agit de loisirs et de vacances. En outre, il serait arrogant de ma part de dire à un hôtelier qu'aujourd'hui, nous ne parlons pas de tourisme, mais que je suis simplement un touriste. Cela ne me viendrait pas à l'esprit.
Le Valais et le Tessin ont été récemment secoués par des intempéries dramatiques. Vous êtes-vous rendu sur place pour vous faire une idée de l'ampleur du phénomène?
Non, je ne me suis jamais rendu sur place, et ce volontairement. Je pense que la dernière chose dont ils avaient besoin, c'était d'un professionnel du tourisme qui vient pointer le bout de son nez. La logistique, l'organisation et la remise en état des bâtiments étaient du ressort des autorités. Mais j'étais en contact étroit avec les professionnels du tourisme des régions concernées. Ils ont fait un travail formidable et ont veillé à ce que les touristes reçoivent les bonnes informations.
Que faut-il maintenant pour attirer à nouveau des visiteurs dans ces régions?
La rapidité avec laquelle le tourisme a réagi est tout à fait étonnante. Il y a certainement eu des annulations, mais les gens savent faire preuve d'abstraction. Ils ont vite remarqué où l'on pouvait quand même passer des vacances dans ces régions. Ce n'est pas comme si tout le Valais ou tout le Tessin avait été touché. C'est l'avantage des canaux numériques: on peut localiser très précisément où quelque chose s'est produit et où cela ne pose pas de problème.
Quel est l'impact de la météo capricieuse sur le tourisme suisse?
Le printemps a été très fluctuant, jusqu'en juin. Chaque nuitée non vendue est perdue. Nous ne pouvons compenser cela que plus tard. Mais désormais, l'été est là. Et il fait si chaud que les gens veulent aller à la montagne. Les visiteurs étrangers aiment aussi venir en Suisse pour fuir quelque peu les vagues de chaleur dans de nombreux endroits en Europe. Je suis convaincu que beaucoup de ceux qui n'ont pas réservé de vacances en Suisse à cause du mauvais temps au printemps vont se rattraper en automne.
De quels pays proviennent la plupart des touristes cet été?
45% de nos lits d'hôtel sont toujours occupés par des Suisses. Il est important d'avoir sa propre population comme visiteur. Les étrangers viennent surtout d'Europe. L'Allemagne est le marché numéro 1, suivie de la France, de l'Italie et de la Grande-Bretagne. L'Amérique vient ensuite. Nous avons eu 23% de croissance sur ce marché l'année dernière. C'est de la folie. Il est tout à fait possible que les Américains dépassent les Allemands d'ici peu. Ce serait une première historique.
Pourquoi un tel intérêt?
Il y a 320 millions d'Américains et l'économie se porte bien. Le pays est extrêmement cher et de nombreux Américains estiment qu'il est plus intéressant pour eux, en termes de prix, de passer des vacances à l'étranger que dans leur propre pays. C'est étonnant.
Y a-t-il des touristes qui agacent?
Bien sûr. Un sur mille. Partout où il y a des gens, il y a les fantastiques, les médiocres et justement les quelques-uns qui agacent. Malheureusement, ce sont eux qui reçoivent le plus d'attention. C'est sur eux que l'on s'acharne. C'est très dommage.
L'overtourism ou le tourisme de masse est aujourd'hui un problème dans le monde entier: villes bondées, prix en hausse, forte pollution de l'environnement. La Suisse est-elle aussi concernée?
Non. Le tourisme de masse n'est pas généralisé. Mais il existe dans certains endroits du monde. Bien entendu, personne ne le souhaite. En Suisse, nous n'avons que des goulets d'étranglement ponctuels. À quelques endroits, à quelques jours seulement.
Où?
Ce sont les endroits connus de l'Oberland bernois. Je viens moi-même d'aller à Lauterbrunnen. Et oui, il y avait du monde. Mais l'overtourism ne se mesure pas. Il s'agit d'une sensibilité des gens qui y vivent et d'une sensibilité des visiteurs. Ces derniers ont bien entendu un seuil de tolérance plus élevé, car ils savent à quoi ils s'exposent. Mais nous prenons ce sujet très au sérieux. C'est notre travail en tant que professionnels du tourisme de veiller à ce que l'équilibre entre la sensibilité de la population locale et le tourisme soit respecté.
Le conseiller national PS lucernois David Roth en a assez du tourisme de masse, il demande une interdiction des valises à roulettes en ville et l'interdiction de construire de nouveaux hôtels. Que pensez-vous de telles mesures?
C'est l'été. C'est le moment idéal pour se pencher sur le thème du tourisme. Il y a toujours beaucoup d'idées et de souhaits qui sont présentés. À Dubrovnik, on a déjà réfléchi à l'interdiction des valises à roulettes, mais on ne l'a jamais appliquée. Et si on ne construit plus d'hôtels, les gens iront dans des Airbnbs. Ce n'est certainement pas une solution. Au contraire: les hôtels garantissent des emplois et ont des règles d'hygiène et de sécurité claires.
Quel est le plus gros problème de l'overtourism?
Les bateaux de croisière. Ils déversent des milliers de visiteurs en une heure. Et inondent les villages, les villes et les îles. Les gens ne passent pas la nuit, emportent généralement leur déjeuner et laissent leurs déchets sur place.
En 2022, Suisse Tourisme a lancé l'initiative «Swisstainable» afin de rendre la Suisse plus durable en tant que destination touristique. Top ou flop?
En l'espace de deux ans, nous avons amené près de 3000 entreprises touristiques à travailler de manière durable. Nous venons de franchir la ligne de départ et nous sommes loin d'avoir terminé. Faire des affaires et être durable n'est pas contradictoire. Cela fonctionne.
Quelles sont les tendances de voyage à la mode?
Cela est banal, en fait: les gens veulent toujours de la nature, de beaux paysages et des montagnes.
Qu'est-ce qui ne fonctionne plus?
Ignorer la durabilité. Aujourd'hui, une entreprise touristique doit pouvoir répondre à son client à la question de savoir ce qu'elle fait pour un tourisme durable. Cela fonctionne aussi bien pour les grandes que pour les petites entreprises. Dire que cela ne nous intéresse pas, ce n'est plus possible.
Votre objectif est-il d'attirer le plus de touristes possible en Suisse?
Non. Ce n'est pas une question de beaucoup ou de peu, c'est une question d'équilibre. Sur l'année, nous avons un taux d'occupation des hôtels de 50%. Seul un lit sur deux est occupé. Ce n'est pas très bon. Nous n'avons pas besoin de pousser la haute saison, cela fonctionne. En revanche, nous voulons établir solidement l'automne. Car c'est une saison forte et indépendante. C'est pourquoi un nouveau spot publicitaire sera diffusé en septembre – à nouveau avec Roger Federer et une autre célèbre star. Mais je ne vous dirai pas encore de qui il s'agira (il sourit).