Les partis partagent leurs recettes
Pas d'extension aux autoroutes: la Suisse en a-t-elle fini avec la croissance?

Une partie de la population est sceptique face à la croissance. Le non à l'extension de l'autoroute l'a montré. Désormais, la peur d'une Suisse à 10 millions d'habitants plane sur Berne et influence l'agenda politique. Que font les partis? Blick leur a posé la question.
Publié: 26.11.2024 à 13:19 heures
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Dernière mise à jour: 26.11.2024 à 14:17 heures
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Malgré les embouteillages, les Suisses ne veulent pas d'extension des autoroutes. Un signe de scepticisme vis-à-vis de la croissance?
Photo: keystone-sda.ch
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Lucien Fluri, Joschka Schaffner et Ruedi Studer

La croissance! Autrefois considérée comme la panacée, la clé de la prospérité et le signe de mondes économiques florissants, elle ne fait plus autant rêver les Suisses. Depuis plusieurs années, le doute s'est installé. Les inconvénients corollaires à la croissance tels que le gaspillage des terres, les loyers plus élevés ou les trains bondés en valent-ils encore la peine? C'est aussi dans cette optique que les citoyens ont voté dimanche contre l'extension des autoroutes, et ce, jusque dans les cercles bourgeois.

Comment continuer? Que faut-il faire? Peut-on contrer le scepticisme à l'égard de la croissance? Cette question va prendre de l'importance à Berne. Le dossier européen sera bientôt à nouveau d'actualité. Et les électeurs voteront sur l'initiative de l'UDC contre une Suisse à 10 millions d'habitants. Celle-ci touche pleinement au scepticisme à l'égard de la croissance.

Le sujet est également d'actualité au Conseil fédéral. La semaine dernière, le ministre socialiste de la Justice Beat Jans a présenté au gouvernement national un bouquet de propositions sur la manière de lutter contre l'initiative de l'UDC. Ses propositions ont été mises en pièces. Le sujet reste à l'ordre du jour.

Quelles sont les recettes des parlementaires? Comment veulent-ils faire face au scepticisme ou résoudre les problèmes? Blick leur a posé la question.

Le Centre: «Une application rigoureuse des lois sur l'asile»

La conseillère nationale du Centre Elisabeth Schneider-Schneiter cite deux points pour contrer le scepticisme de la population. «Dans le domaine de l'asile, les lois existantes doivent être appliquées avec rigueur, par exemple en ce qui concerne le regroupement familial». Elle demande par ailleurs à l'économie d'assumer davantage de responsabilités. «L'industrie doit utiliser davantage le potentiel des travailleurs locaux, engager à des âges plus avancés et voir à ce que les temps partiels soient augmentés.» Ce faisant, la politicienne de Bâle-Campagne reste opposée à une taxe sur l'immigration, jugée inapplicable pour les petites entreprises.

Mais à plus long terme, le problème se résoudra de lui-même, affirme Elisabeth Schneider-Schneiter: «La population suisse diminue. En 2050, le pic sera atteint et nous n'augmenterons alors plus globalement, même avec l'immigration.»

USS: Allocations familiales et protection contre le licenciement

Le président de l'Union syndicale suisse et conseiller aux États socialiste Pierre-Yves Maillard voit dans la critique de la croissance une explication au moins partielle du non à l'extension des autoroutes: «L'initiative de l'UDC ne résout aucun problème, mais elle trouve des sympathies dans de larges cercles», observe-t-il. «Ce qui est donc décisif, c'est que tout le monde profite de la croissance. Pour cela, nous devons renforcer le pouvoir d'achat.»

Pierre-Yves Maillard plaide pour des mesures de politique salariale telles que des allocations familiales plus élevées. De même qu'une meilleure protection contre le licenciement pour les travailleurs âgés. Et il considère la protection des salaires comme une clause de protection efficace. «Il est important que les employeurs ne puissent pas se servir des nouveaux travailleurs pour évincer les anciens. Nous pourrons alors convaincre.»

PLR: Les Suisses doivent augmenter leur taux d'occupation

«Aujourd'hui, les grands projets sont devenus impossibles», déclare le conseiller national PLR bernois Christian Wasserfallen. Selon lui, ce n'est pas seulement le cas pour les autoroutes, mais aussi pour les chemins de fer et le secteur de l'énergie. Une extension du siècle, comme par exemple pour Rail 2000? «Malheureusement impensable aujourd'hui.» La lenteur du développement du photovoltaïque et de l'éolien le montre également.

La peur de l'immigration y contribuerait pour une part importante. «Dans mon entourage, c'était l'argument le plus souvent exprimé», dit Christian Wasserfallen. Libérer la population de cette peur devrait donc être une priorité. Mais certainement pas de la manière dont le conseiller fédéral Beat Jans, par exemple, s'y est essayé: «Ses propositions sont contre-productives par rapport à ce que l'on veut vraiment atteindre.»

Christian Wasserfallen déclare: «Cette forte immigration est le résultat de l'économie et du regroupement familial. C'est là qu'il faudrait freiner.» Par exemple en accordant moins de permis de longue durée à la main-d'œuvre étrangère. «Si l'on donne un permis B à tout le monde, cela aura un effet d'attraction.» Et les Suisses ainsi que les étrangers vivant ici devraient en contrepartie augmenter à nouveau leur taux d'activité.

En ce qui concerne la question de l'asile, il faut par ailleurs veiller à ce que l'accord de Dublin fonctionne à nouveau mieux. «Grâce à Dublin, on peut renvoyer la plupart des cas vers d'autres pays», déclare Christian Wasserfallen. L'UDC, justement, qui s'engage pour une sortie de l'espace Dublin, ne veut pas comprendre cela.

UDC: Mettre fin à la libre circulation des personnes

L'UDC s'est prononcée en faveur de l'extension de l'autoroute… et a perdu. Le chef du groupe parlementaire Thomas Aeschi voit toutefois la politique de son parti confirmée en ce qui concerne le scepticisme sur la croissance. «Nous avertissons depuis des années que la Suisse est bétonnée, que trop de gens viennent en Suisse et que les infrastructures comme les routes et les transports publics sont à l'étroit». Selon le Zougois, «de nombreux citoyens ne voient plus l'utilité de la croissance par l'immigration. La classe moyenne se porte moins bien aujourd'hui qu'il y a quelques années.» C'est pourquoi la Suisse doit «limiter l'immigration de manière autonome», même si cela entraîne des conflits avec l'Union européenne.

Les Vert'libéraux: Pas de projets démesurés

La cheffe du groupe parlementaire Corina Gredig énumère les précédentes initiatives sur la protection de la nature que les Suisses ont acceptées. «Les Suisses veulent une croissance durable, mais pas un arrêt radical de la croissance», résume la Zurichoise. Quelle leçon tire-t-elle de ce dimanche de votation? «Il faut des projets largement soutenus. Un camp ne peut pas imposer des projets unilatéraux et démesurés.»

Et sinon? «Il faut plus d'honnêteté», demande Corina Gredig. De nombreux emplois ne pourraient pas être occupés sans l'immigration. Chez les plâtriers, par exemple, 75% proviennent de l'étranger. «Construirons-nous nous-mêmes nos maisons s'il n'y a plus d'immigration?», demande-t-elle. Corina Gredig demande une politique familiale «que l'on peut aussi appeler politique familiale». Cela permettrait aux parents de travailler davantage. «Le souci numéro 1 des entreprises est qu'elles ne trouvent pas de personnel, nous avons un taux de natalité historiquement bas et de nombreux travailleurs partent à la retraite. Mais nous en faisons beaucoup trop peu.»

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