Le conseiller national UDC Nicolas Kolly
«La gauche antinucléaire met en danger la population suisse»

Après le grand oui de la population suisse à la loi sur l'électricité, le conseiller national de l'Union démocratique du centre (UDC) fribourgeois Nicolas Kolly plaide pour le nucléaire. Selon lui, la Suisse ne pourra pas faire sans et la gauche doit le reconnaître.
Publié: 09.06.2024 à 17:32 heures
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Dernière mise à jour: 09.06.2024 à 17:36 heures
Pour le conseiller national de l'Union démocratique du centre (UDC) Nicolas Kolly, «soit le monde entier est bête, soit la gauche suisse est dogmatique».
Photo: Keystone
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Antoine HürlimannResponsable du pôle News et Enquêtes

Avec près de 70% des voix, la loi sur l’électricité a passé sans tension l’épreuve des urnes, ce dimanche 9 juin. «La Confédération, qui vise la neutralité carbone d’ici 2050, se dote ainsi d’une loi dont les principaux objectifs sont d’éviter d’éventuelles pénuries d’électricité, notamment en hiver, et de garantir un approvisionnement suffisant pour le pays, afin de ne plus être autant dépendant de ses voisins», résume swissinfo.ch.

Sur le papier, c’est une claque pour l’Union démocratique du centre (UDC) puisqu’elle était opposée au texte. Mais c’est aussi une caresse: cette proposition était portée par son conseiller fédéral Albert Rösti, qui gagne ainsi ses galons de ministre de premier plan.

Au-delà de cette petite cocasserie politique, la lumière se braque désormais sur la question du nucléaire. Les résultats définitifs n’étaient pas encore tombés que le lobby Sortir du nucléaire appelait dans un communiqué à tirer la prise de la centrale de Beznau (AG). Plus ou moins simultanément, le conseiller national UDC fribourgeois Nicolas Kolly déclarait sur X que la Suisse ne pourrait pas se passer de l’atome si elle désire réellement sortir des énergies fossiles. Alors, qui croire? Interview du survolté élu conservateur pas encore quadragénaire.

Nicolas Kolly, l’UDC était contre la loi sur l’électricité, mais elle se félicite aujourd’hui du succès de ce texte dans les urnes puisqu’il a été porté — probablement dans un souci de collégialité — par son conseiller fédéral Albert Rösti. On ne comprend pas très bien: cette initiative votée ce dimanche par la population, c’est une bonne ou une mauvaise chose?
C’est une excellente chose! Je respecte la position de mon parti. Je pense toutefois que cette loi, c’est vraiment la loi Rösti. Elle rendra la Suisse plus souveraine dans son approvisionnement énergétique et je m’en réjouis.

Le socialiste Roger Nordmann, à l’instar du lobby Sortir du nucléaire, voit dans cette victoire «le dernier clou sur le cercueil du nucléaire». Vous, sur X, vous affirmez l’inverse. À vos yeux, la Suisse ne pourra pas s’en passer. Qui croire?
Je me base sur des chiffres: aujourd’hui, le besoin de la Suisse en électricité est de 60 TWh. La décarbonation par l’électricité, ce sont à terme 24 TWh qui nous manqueront, selon le Conseil fédéral, qui prend en compte l’effort de sobriété énergétique dans ses projections. Le renouvelable ne suffira pas, en particulier le solaire qui produit déjà trop en été, alors qu’on manque cruellement d’électricité en hiver!

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«L’apport du nucléaire est indispensable si l’on veut réellement sortir des énergies fossiles»
Nicolas Kolly, conseiller national UDC
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Attendez, sortons la calculette…
Si tout se passe bien avec la loi sur l’électricité acceptée aujourd’hui, on devrait réussir à produire 6 TWh. C’est à peine plus que ce que produisait la centrale nucléaire de Mühleberg (BE), définitivement à l’arrêt depuis 2019. En clair: si cette nouvelle loi doit bel et bien compenser son arrêt, il nous manquera toujours environ 24 TWh au final! Et cette vision inquiétante ne considère pas les 26 TWh nécessaires en cas de sortie du nucléaire. On le voit, l’apport du nucléaire est indispensable si l’on veut réellement sortir des énergies fossiles. La seule question qui se pose est: serons-nous dépendants de nos voisins ou produira-t-on en Suisse?

Et que répondez-vous à cette question?
Qu’il faut produire en Suisse. Pour une question de coûts, bien sûr. Mais aussi parce que laisser les nuisances — la problématique des déchets notamment — à d’autres tout en profitant des ressources est hypocrite.

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À vous entendre, contrairement à ce qu’appuie le lobby Sortir du nucléaire, il est donc toujours impossible de se passer de la centrale de Beznau (AG), la plus vieille du monde…
Totalement. Paradoxalement, la gauche antinucléaire met en danger la population. Comme on ne construit plus de centrale mais qu’on ne peut factuellement pas se passer de l’atome, on tire en longueur des infrastructures vieillissantes. Plus le temps passe, plus le risque augmente. Aujourd’hui, il est urgent d’examiner le renouvellement du parc nucléaire.

D’après vous, la population suisse est en danger à cause des centrales existantes?
Non. Mais elle le sera peut-être dans 15 ou 20 ans si on continue de prolonger hiver après hiver ces vieilles centrales.

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«Soit le monde entier est bête, soit la gauche suisse est dogmatique; j’ai ma petite idée»
Nicolas Kolly, conseiller national UDC
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Vous faites de la sculpture sur nuage avec des risques hypothétiques. Les risques concernant un accident ou encore les déchets nucléaires, eux, sont réels.
Comme le montre par exemple la société genevoise Transmutex, qui affirme pouvoir réduire la durée de stockage des déchets nucléaires d’un million d’années à cinq cents ans, la technologie nous apporte des solutions concrètes. Il faut les évaluer sans dogmatisme!

Selon vous, s’il ne s’agit que d’une question de pragmatisme, pourquoi la gauche s’y refuse?
Parce qu’elle s’est historiquement construite — surtout les Vert-e-s — contre le nucléaire. Il lui est très difficile de reconnaître qu’elle se trompe de cible depuis des décennies. Mais regardez autour de nous: tous les pays, y compris les Émirats arabes unis qui ne manquent pourtant ni de pétrole ni de soleil, envisagent le nucléaire. Alors soit le monde entier est bête, soit la gauche suisse est dogmatique. J’ai ma petite idée…

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