Monaco est connue pour ses casinos, ses yachts – et ses loyers exorbitants. Dans la ville-État de la Côte d'Azur, un appartement de 100 mètres carrés coûte facilement 8000 euros par mois.
«Si nous ne voulons pas devenir Monaco, il faut que l'industrie du bâtiment et la politique se secouent», prévient Donato Scognamiglio, président du prestataire de services immobiliers CIFI. Ce dernier a présenté vendredi après-midi de nouveaux chiffres qui dressent un tableau sombre de la situation sur le marché du logement suisse – et ce pour tous les acteurs concernés.
Les locataires sont les premiers touchés
En premier lieu pour les locataires. La construction de logements ne suit plus depuis longtemps le rythme de la croissance démographique. «La Suisse, pays à succès, affiche complet», déclare Donato Scognamiglio, faisant ainsi allusion à la «Suisse à 10 millions» qui s'est muée en slogan pendant la campagne électorale. Actuellement, la population est d'environ 9 millions d'habitants – et l'espace se fait de plus en plus rare.
Selon l'enquête de CIFI, les loyers proposés ont augmenté de 6,4% l'année dernière dans toute la Suisse. La situation est particulièrement précaire à Zurich (+7%). «A l'avenir, les gens resteront plus longtemps chez leurs parents parce que c'est moins cher», prédit l'expert en immobilier. Les chiffres montrent en outre que de plus en plus de personnes s'installent dans des colocations au lieu de s'offrir un logement seul.
Mais les investisseurs aussi!
Mais – et cela peut surprendre – la situation du marché immobilier n'est pas seulement insatisfaisante pour les locataires. Elle l'est aussi pour les investisseurs! On a souvent l'impression que «les investisseurs immobiliers réalisent des rendements de rêve, mais les chiffres actuels montrent une toute autre réalité», concluent les experts de CIFI.
Concrètement, les immeubles d'habitation ont eu un rendement de 2,9% l'année dernière. Pour les immeubles de bureaux et commerciaux, cette recette s'est même réduite à un maigre 1,4%. «C'est un rendement comparable à celui d'un bon livret d'épargne», explique Donato Scognamiglio.
Dans le même temps, les obligations suisses ont enregistré une performance de +6,4% et les actions de +4,7%, selon l'analyse. Autrement dit: «Sur le marché des actions, je peux gagner trois fois plus, et ce sans aucun stress», explique Donato Scognamiglio. L'argent ne va plus automatiquement vers le marché immobilier. La baisse des rendements freine le flux d'argent dans l'immobilier et donc l'activité de construction, ce qui explique pourquoi les loyers continuent d'augmenter.
La fête est finie, pour l'instant
Les locataires qui souffrent des prix exorbitants doivent envier les générations d'avant, qui avaient moins à dépenser pour payer leurs logements. Donato Scognamiglio l'admet lui aussi: «Nous avons eu une ambiance de fête sur le marché immobilier pendant 22 ans. C'est la fête la plus longue que je connaisse.»
Toujours est-il que cette fête n'est suspendue qu'à court terme. CIFI qualifie la baisse du taux directeur par le président de la BNS Thomas Jordan jeudi de «lueur d'espoir à l'horizon» pour le secteur immobilier.
Mais les locataires attendent toujours. Une solution pourrait être la transformation de bureaux en logements. Grâce au télétravail, les bureaux sont de plus en plus désertés. Dans toute la Suisse, le taux de vacance dans ces locaux est de 5,9%. Dans l'agglomération zurichoise, c'est parfois beaucoup plus, à Wallisellen, par exemple, plus de 25% des surfaces de bureaux sont vides selon CIFI. A titre de comparaison, le taux de vacance des logements dans la ville de Zurich est de 0,06% selon les statistiques officielles.