Après les torrents de boue dans le Val-de-Ruz en 2019 et à Cressier en 2021, des rafales tourbillonnantes mesurées à 217 km/h à La Chaux-de-Fonds, ce lundi 24 juillet, à 11h30. Durant moins de cinq minutes, un toit s’envole, un pylône s’écrase, des voitures se retournent. Plus de trains. La mythique — et vétuste — patinoire des Mélèzes est dévastée. Nouvelle vision d’apocalypse. Bilan: un mort et une quarantaine de blessés.
Le jour d’après, le trafic ferroviaire est toujours interrompu. Plusieurs centaines de personnes sont à pied d’œuvre et sécurisent le retour à la vie normale. Une trentaine de foyers demeurent néanmoins sans électricité et parfois sans eau, communiquent les autorités vers 16h. Celles-ci «demandent à la population de rester prudente, de ne pas se rendre en forêt et d’éviter la proximité des toitures endommagées».
Le libéral-radical Laurent Favre, conseiller d’Etat neuchâtelois à la tête du Département du développement territorial et de l’environnement, est au four et au moulin. Ce mardi, peu après 14h, l’édile a pris le temps de faire le point avec Blick. Selon lui, le Canton ne serait pas opposé à aider financièrement la Ville de La Chaux-de-Fonds, mais il incombe d’abord à l’Etablissement cantonal d’assurance et de prévention (ECAP) de prendre ses responsabilités.
En outre, comment protéger au mieux la population face à des catastrophes météorologiques qui risquent d’être de plus en plus fréquentes avec le dérèglement climatique? Pour Laurent Favre, il faudra évaluer si de nouvelles dispositions sont à prendre pour «d'autant mieux protéger la population» à l'avenir.
Laurent Favre, où étiez-vous au moment de la tempête, ce lundi à 11h30, et comment avez-vous appris la catastrophe?
J’étais au bureau, à Neuchâtel. Je l’ai apprise par le biais de mon secrétaire général.
Comment vous êtes-vous senti?
C’était choquant. On n’a pas l’habitude de voir des images d’une telle violence, à travers une ville, dans notre canton et dans notre pays. Je suis en pensées avec les familles sinistrées.
Quelle est la situation sur le terrain ce mardi après-midi?
À La Chaux-de-Fonds, mais aussi au Locle, plusieurs centaines de femmes et d’hommes sont à l’œuvre. Pour sécuriser les voies de mobilités, les bâtiments, abattre et tailler les arbres endommagés. Les différents acteurs de la protection de la population ainsi que le personnel des communes mais aussi de plusieurs services cantonaux ou des privés sont sur place. C’est l’occasion de les remercier chaleureusement pour leur engagement de tous les instants. Certaines de ces personnes sont revenues de vacances exprès. La situation devrait revenir à une relative normalité dans ces prochains jours.
Vous parlez de quelques jours. Avez-vous un horizon plus précis?
L’Organe de conduite de crise régional est en train de l’établir avec l’appui des services cantonaux. Pour certaines personnes, la vie a repris aujourd’hui déjà, pour d’autres, chez qui les bâtiments ont été endommagés, ça va encore prendre quelques jours, voire quelques semaines.
Quid du bilan humain?
Le bilan humain est lourd (ndlr: un mort et une quarantaine de blessés), mais n’a heureusement pas évolué plus négativement. Nos pensées vont aux familles touchées par cette catastrophe.
Avez-vous déjà pu chiffrer les dégâts?
L’inventaire des dégâts est en cours, c’est l’Etablissement cantonal d’assurance et de prévention (ECAP) qui s’en charge au niveau des bâtiments. Peut-être aurons-nous des chiffres d’ici à la fin de la journée, mais ils seront encore approximatifs (ndlr: les dégâts coûteront entre entre 70 et 90 millions de francs, selon une première estimation).
Le Canton est-il prêt à débloquer des fonds pour venir en aide à La Chaux-de-Fonds, ville dont les finances ne sont pas réputées des plus solides?
Sur le principe, nous n’y sommes pas opposés, mais c’est encore prématuré pour le déterminer. C’est l’ECAP et les assurances mobilières qui devront d’abord terminer leur inventaire. Tous les biens mobiliers et immobiliers sont en principe assurés ou assurables. Chacun devra jouer son rôle et ce sera donc d’abord aux assurances d’assumer la plus grande partie des coûts.
Vous êtes allé au contact de la population. Comment la sentez-vous?
La population est fragilisée, choquée. On le serait pour moins. Aujourd’hui, nous leur apportons notre soutien moral, mais aussi opérationnel avec nos équipes communales et cantonales.
Vous êtes à la tête du Département de l’environnement. Plusieurs événements dramatiques se sont produits dans le canton ces dernières années. Après le Val-de-Ruz en 2019, Cressier en 2021, La Chaux-de-Fonds en 2023. Le Canton est-il bien armé pour faire face à des événements météorologiques toujours plus violents?
Je l’ai dit hier (ndlr: lundi) en conférence de presse. C’est le troisième événement météorologique violent en quatre ans. Ce n’est pas le fruit du hasard. En bonne partie à cause du réchauffement climatique, ces épisodes violents vont être de plus en plus fréquents. Nous devons nous y préparer. La protection contre les dangers naturels est une politique déjà en place et même renforcée par le plan climat cantonal accepté en ce début d’année par le Grand Conseil. Mais il est vrai qu’à un certain niveau les tempêtes de vent ne sont pas maîtrisables.
Comment allez-vous vous y prendre?
Aujourd’hui, plus que jamais, il faut faire respecter nos normes de construction, déjà particulièrement exigeantes en Suisse.
Nous avons quand même vu des toits s’envoler…
D’une part, il faut aussi accepter que le risque zéro n’existe pas. Et, d’autre part, évaluer, dans le cadre de nos politiques cantonales et fédérales, si de nouvelles dispositions — notamment en termes de normes, de ressources et de planification — sont encore à prendre pour d’autant mieux protéger notre population.