Elle a les yeux humides et un bouquet de fleurs dans les mains, à la sortie de l'Hôtel-de-Ville de Genève, ce dimanche 12 novembre. Les premiers résultats de l'élection au Conseil des États, tombés à 12h45, laissaient peu de place au suspense pour le reste de la journée. La sortante verte Lisa Mazzone ne retournera pas à la Chambre haute. Une défaite confirmée par le second décompte en milieu d'après-midi.
L'écologiste arrive en effet en troisième position, après le champion du Mouvement citoyens genevois (MCG) Mauro Poggia et le sortant socialiste Carlo Sommaruga. Lors des dernières élections fédérales, il y a quatre ans, elle était pourtant la mieux élue du Canton.... «C'est fini pour moi», a-t-elle lâché concernant sa carrière politique, en direct sur le plateau de la chaîne de télévision Léman Bleu. N'ayant pas concouru pour la Chambre basse cet automne, son aventure bernoise s'arrête donc ici.
Son score confirme la tendance à la baisse de son parti: le 22 octobre dernier, les Vert-e-s genevois ont déjà perdu un siège au Conseil national. Blick a donc interpellé une Lisa Mazzone attristée et déçue. Interview à chaud.
Lisa Mazzone, vous n'avez pas été réélue aujourd'hui. Quels sont vos premiers mots, face à cette défaite?
Je remercie tout d'abord les électrices et les électeurs qui m'ont accordé leur confiance, et m'ont permis de me représenter à cette élection. J'ai représenté une Genève engagée pour les générations futures, que ce soit sur les questions écologiques ou sur celles liées à l'égalité.
Ce sont le MCG Mauro Poggia et votre colistier socialiste Carlo Sommaruga qui représenteront désormais Genève à Berne. Qu'est-ce que le canton a perdu, en vous perdant?
Ça change en effet beaucoup de choses. Cela faisait trente ans que Genève était représentée par au moins une femme à la Chambre haute. Et, qui plus est, par une jeune femme, en ce qui me concerne. Aujourd'hui, c'est une dynamique différente: les scores de ce dimanche montent une délégation genevoise plus traditionnelle (rire nerveux).
Plus «traditionnelle», c'est-à-dire constituée de deux hommes de plus de soixante ans, comme vous l'avez souligné — avec une pointe de cynisme — en direct sur le plateau de Léman Bleu?
Oui, c'est ça.
Que dit votre défaite du climat socio-politique? Aujourd'hui, avec l'inflation et la guerre en Europe, tout le monde s'en fiche du climat, à Genève?
Je pense que les Vert-e-s vivent, en ce moment, un retour de bâton, après notre succès en 2019. La tendance observée lors des élections cantonales, et du premier tour des Fédérales, se répète en effet aujourd'hui. Et cela devrait agiter les mouvements féministes et les protecteurs du climat, qui doivent continuer à faire valoir leur voix.
Les Vert-e-s, de manière générale, blâment beaucoup la conjoncture pour leurs dernières défaites. Mais, si cette dernière législature et cette campagne politique étaient à refaire, vous referiez vraiment tout pareil?
Honnêtement, je suis fière du travail que j'ai accompli à la Chambre haute. J'ai pu développer mes compétences. J'ai réussi à trouver des compromis avec des élus de l'Union démocratique du centre (UDC), du Parti libéral-radical (PLR), et avec ceux du Centre… Et cela sur des sujets aussi ardus que les énergies renouvelables, une nouvelle définition du viol, l'accès des sans-papiers à la formation professionnelle — pour ne donner que quelques exemples.
Pas de regrets quant à la campagne électorale non plus, donc?
J'ai surtout mis en avant et valorisé le travail déjà effectué à Berne pendant la précédente législature, lors de l'entre-deux-tours.
Parlons postérité: y a-t-il un grand dossier, grâce auquel on se souviendra de vous, à Berne?
Ce serait le développement de la stratégie énergétique sur laquelle j'ai travaillé avec un collègue de l'Union démocratique du centre (UDC) thurgovienne. Nous avons réussi un compromis équilibré, entre un développement des énergies renouvelables très ambitieux, et la protection de la nature. Un projet approuvé presque à l'unanimité par le parlement.
Vous l'avez dit en direct sur le plateau de Léman Bleu: «C'est fini, pour moi.» Vous vous retirez vraiment de la politique pour de bon?
La politique est un moyen, pas un fin en soi. C'est un moyen d'exprimer des idées, de défendre des valeurs, des projets pour les générations futures… Mais tout cela peut aussi se faire par d'autres biais!
C'est-à-dire?
(Rires) Je ne le sais pas encore.