Il a défié les «bourgeoisies»
Il défie une puissante organisation qui contrôle sa commune et le paie cher

En Suisse, de nombreuses terres, maisons et forêts appartiennent à des «bourgeoisies» locales, souvent inconnues. Ce qui déplaît à Gian Von Planta. L'homme s'est récemment opposé à l'une d'entre elles. Quitte à en payer le prix fort aujourd'hui.
Publié: 22.07.2024 à 20:59 heures
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Dernière mise à jour: 23.07.2024 à 10:29 heures
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Gian von Planta de Baden se bat contre des «bourgeoisies» locales qui font la pluie et le beau temps dans sa commune.
Photo: Beat Michel
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Beat Michel

De nombreux Suisses n'ont encore jamais entendu parler des «bourgeoisies». Pourtant, elles continuent de jouer un rôle important en Suisse. Ces structures datent d'avant l'invasion française de 1798, mais existent toujours dans 1500 communes.

Leurs membres ont un statut légèrement supérieur à celui du citoyen suisse ordinaire. Pour être membre, il faut soit avoir des liens de parenté dans les structures, soit avoir été élu lors d'un vote à bulletin secret.

Gian von Planta, un homme respecté de Baden (AG), s'est attaqué à cette puissante structure. Il dirige une des plus grandes entreprises de tuyauterie de Suisse, est député Vert'libéral au Grand Conseil et a été membre du Parlement de la ville de Baden pendant plusieurs années. Aujourd'hui, il s'attaque à tout un système. Car selon lui, «les bourgeoisies locales freinent la démocratie».

«Ce n'est plus possible aujourd'hui»

À Baden, les droits et privilèges varient selon les habitants. L'un d'entre eux est la participation aux décisions concernant les énormes propriétés, principalement les forêts, les terres et les biens immobiliers. Certains ont par ailleurs un accès facilité aux logements adaptés aux personnes âgées.

Les membres des bourgeoisies ont également une influence sur la politique communale et ils ont déjà fait échouer à plusieurs reprises certaines décisions. «Ce n'est plus possible aujourd'hui», déclare Gian von Planta. «En tant que membre élu d'un Parlement, je veux pouvoir décider dans le sens du peuple, sans que l'on bloque la mise en œuvre de décisions judicieuses.»

Gian Von Planta poursuit: «J'étais persuadé que tout le monde pouvait devenir citoyen local sans problème. Mais c'est une erreur.» L'ingénieur en génie mécanique a lui-même souffert de certaines injustices. Et c'est probablement la raison de ses prises de position et de ses critiques envers les membres des bourgeoisies, il a essuyé un refus lors de la votation du 22 juin. Il n'a pas non plus été naturalisé lors de l'assemblée des citoyens locaux.

«Ils sont 5% environ de la population, mais possèdent 60% du territoire communal!»

Il y a un peu moins d'un an, il avait déposé une intervention au Parlement de Baden. Il demandait alors au Conseil municipal d'examiner la possibilité d'une fusion de la bourgeoisie locale avec la commune, de manière à créer des synergies au sein de l'administration. Il espérait aussi comprendre cette structure et ses prises de décision.

Mais le conseil des habitants a rejeté l'intervention et la réputation de Gian von Planta, fauteur de troubles en croisade contre un pouvoir secret, s'est fortement ternie: «A Baden, un service complet à la collectivité n'est possible que si l'on fait partie de la bourgeoisie locale» confie aujourd'hui Gian Von Planta.

Gian Von Planta critique surtout le manque de transparence dans cette concentration du pouvoir. «Ils sont 5% environ de la population, mais possèdent 60% du territoire communal. Il s'agit d'un pouvoir important qui ne peut pas être contrôlé par les électeurs» résume Gian von Planta, qui poursuit: «J'ai été très surpris par la force du vent contraire qui m'a balayé lors de l'assemblée.»

Certains bravent l'interdit pour le soutenir

Le fait qu'il n'ait pas été naturalisé n'était plus arrivé à Baden depuis 1910. Son rejet est mal perçu, même dans ses propres rangs. Sander Mallien, un citoyen local et ancien président du conseil municipal, a même écrit dans une lettre de lecteur publiée dans l'hebdomadaire régional «Rundschau Süd»: «Un citoyen de Baden émérite s'est vu refuser la naturalisation. Tout ça parce que certains citoyens ont été contrariés par ce député engagé, membre du Parlement, qui a posé au Conseil municipal des questions tout à fait justifiées concernant certaines organisations, ainsi que le fonctionnement de la bourgeoisie.»

Gian Von Planta a fait usage de son droit de recours contre le refus de naturalisation. En raison de la procédure en cours, la bourgeoisie n'a pas pris position.

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