Credit Suisse s'est retrouvé dans la tourmente mi-mars, après l'écroulement de la Silicon Valley Bank. Ses titres ont chuté en Bourse, menant à son rachat par UBS. La Confédération et la Banque nationale suisse (BNS) ont actionné plusieurs instruments pour encadrer la fusion. La BNS a mis à disposition des deux banques 150 milliards de liquidités qui ne sont pas soumis au Parlement.
L'État a lui apporté sa garantie pour un montant de 109 milliards de francs. Un premier crédit de 100 milliards permet de garantir les prêts octroyés par la BNS à Credit Suisse. Le second de 9 milliards est destiné à UBS. Ce sont ces deux enveloppes qui ont été rejetées par 102 voix contre 71, grâce à une alliance contre-nature de la gauche et de l'UDC au National.
La décision n'est toutefois pas définitive. Le projet doit repasser devant les sénateurs du Conseil des États. Même si ces derniers retournaient leurs vestes et refusaient finalement les crédits qu'ils ont initialement acceptés mardi, l'impact du vote serait quasi inexistant, car les montants ont déjà été engagés au titre du droit d'urgence. Le rejet des députés résonne plus comme un désaveu du gouvernement.
L'UDC a rejeté d'entrée de jeu les crédits. «Dans le sillage du sauvetage d'UBS, nous avons réclamé une solution à la problématique des 'too big to fail'. Mais l'alliance du PLR et du Centre a fait échouer le projet», a accusé Thomas Aeschi (ZG). Et d'estimer que des banques trop grandes pour faire faillite ne devraient plus exister en Suisse.
Garde-fous supplémentaires rejetés
Le camp rose-vert aurait pu accepter les crédits, sous conditions. Il a exigé des garde-fous plus stricts pour les grandes banques. Les bonus doivent notamment être réduits et le ratio de fonds propres relevé. «L'idée n'est pas de régler tous les détails déjà maintenant. Il s'agit de fixer des filets de sécurité plus élevés pour la place financière», a expliqué Mattea Meyer (PS/ZH), critiquant l'inaction passée de la majorité bourgeoise du Parlement.
Un compromis sur le sujet avait été trouvé en commission. Mais il a échoué au plénum. Pour la droite, la législation «too big to fail» doit bien être revue, mais sans hâte. Il faut d'abord avoir une bonne vue d'ensemble de la situation.
Et Damien Cottier (PLR/NE) d'appeler à ne pas jouer aux apprentis sorciers. Il ne faut pas créer un chaos et une excitation supplémentaires dans des marchés déjà fébriles, a plaidé le Neuchâtelois, rejetant toutes critiques. La crise est due à la culture de la banque, aux managers surpayés qui ont pris des risques inconsidérés: «C'est moralement inacceptable.»
Meilleure option
La gauche a donc rejoint l'UDC dans le camp des opposants. D'autant plus que les Vert-e-s avaient également lié leur aval à des critères de durabilité.
«Le crash total de Credit Suisse aurait certainement été la pire des solutions. Mais le crash total du climat conduit au pire des avenirs», a insisté Balthasar Glättli (Vert-e-s/ZH). Des critères durables, sociaux et économiques ne sont pas exagérés, a-t-il plaidé. Ils n'ont pas non plus passé la rampe.
La ministre des Finances, Karin Keller-Sutter, a de son côté dit comprendre les critiques. Mais il fallait engager la garantie de l'État pour rétablir la confiance. Vu les circonstances, un rachat de Credit Suisse par UBS était la meilleure option, selon elle.
(ATS)