Ces dernières semaines, Marcel Ottiger a passé quelques nuits blanches. La raison: les nouveaux tarifs d'électricité, qui mettent sa PME au bord du gouffre. Mais le pire a pu être évité.
Depuis peu, ce cuisinier de formation a rejoint l'entreprise familiale. Il travaille pour l'entreprise et auberge Landgasthof Kreuz, à Lucerne, ainsi que dans la production de mélanges d'épices qui y est rattachée. Il devrait un jour diriger l'entreprise familiale, succèdant ainsi à son grand-père et à son père. «Notre entreprise existe depuis plus de 45 ans. Nous employons actuellement 20 personnes. Mais aujourd'hui, nous sommes confrontés à un gros problème qui menace notre existence.» C'est en ces termes dramatiques qu'il se présente à Blick.
De l'électricité pour un quart de million
Ces dernières années, l'entreprise payait 19 centimes par kilowattheure. Depuis le début de l'année, le montant est passé à la coquette somme de 69 centimes par kilowattheure. Cette hausse de prix est très importante. Avec les coûts du réseau, la PME doit soudain débourser un quart de million de francs pour l'électricité — au lieu de 65'000 francs l'année dernière.
«Je ne veux pas me plaindre, explique Marcel Ottiger. Je veux juste montrer ce qui nous attend tous.» Beaucoup d'emplois seraient sur la sellette. «Chez nous, la plupart du temps, c'est encore du travail manuel.» Les exploitants d'électricité profiteraient de la situation pour se remplir les poches avec l'argent des PME. Au détriment des petites entreprises, soupçonne-t-il.
Plus qu'un simple bistrot
«Toute l'entreprise familiale souffre beaucoup de ces coûts», se désole Marcel Ottiger. Il dirige le restaurant Kreuz - connu au-delà des frontières cantonales pour son légendaire cordon bleu d'un kilo — et la société Ottiger Gastro und Food SA avec son père Werner Ottiger et son grand-père Werner Ottiger. «Le Kreuz est plus qu'un simple bistrot, dit-il fièrement. Mon grand-père a acheté le local en 1976 et a ensuite développé son propre bouillon», raconte-t-il.
Le mélange a ensuite été vendu dans tout le pays. Werner Ottiger senior a ensuite développé un produit après l'autre. Par exemple, des mélanges d'épices pour les frites, le barbecue ou les salades. L'entreprise était florissante. La colère de Marcel Ottiger n'en est que plus grande: «Il est inadmissible que cette histoire familiale à succès menace de s'arrêter à cause des prix élevés de l'électricité.»
250'000 francs de frais
Ses craintes sont tout à fait fondées. «Nous avons dû augmenter les prix, le cœur lourd», s'attriste Marcel Ottiger. Deux gros clients se seraient déjà retirés. «Si cela continue ainsi, nous allons probablement faire faillite à la fin de l'année», craint-il.
Comme il le dit à Blick, il s'est senti mis sous pression et arnaqué par son fournisseur d'électricité CKW. Celui-ci l'a régulièrement contacté pour lui proposer de nouveaux contrats d'électricité. «Je n'ai jamais eu plus de deux heures pour me décider», se souvient le restaurateur. Certaines offres étaient même nettement supérieures au prix auquel Marcel Ottiger a fini par conclure.
Achat sur le marché libre
Blick a confronté le fournisseur d'électricité CKW à cette pratique commerciale. «Nous comprenons que les clients se sentent mis sous pression.» Malheureusement, il ne peut en être autrement avec les prix actuellement très volatils. «Nous achetons l'énergie pour le client au prix du marché.»
Les clients du marché libre ont d'ailleurs profité de prix très bas ces dernières années. La décision de savoir quand et à quel prix acheter l'électricité ne peut pas être prise à la place des acheteurs. «C'est toujours au client de décider.»
Soudain une facture mixte
Mais le fournisseur d'électricité peut tout de même faire un pas vers le client. En effet, après l'intervention de Blick, CKW a contacté les Ottiger, dont les besoins annuels moyens s'élèvent à 300'000 kilowattheures. «Nous aurons maintenant une facture de 2023 à 2026, ce qui répartira les coûts. Nous nous en sortirons mieux», déclare Marcel Ottiger, soulagé. Les coûts d'électricité pour cette année s'élèvent désormais à 140'000 francs — et sont donc clairement inférieurs à ceux du début de l'année. L'entreprise familiale est, pour le moment, sauve.