Il y a un an et demi, quiconque aurait prédit les répercussions du scandale environnemental qui avait touché le Blausee (lac bleu) aurait été pris pour un fou. Depuis 2017, année ou des dizaines de milliers de truites sont mortes dans le lac de l’Oberland bernois, l’affaire connait de nombreux rebondissements. Le dernier en date est le suivant: les exploitants du plan d’eau se voient dans l’obligation d’arrêter temporairement et de diminuer drastiquement la production de truites dans leur élevage piscicole. Les propriétaires provoquent même l’émoi en réclamant des sommes considérables à la commune de Kandergrund.
La réduction de l’exploitation a pour origine un litige avec le canton concernant la pollution du ruisseau Fürtbach par de la nourriture et des matières fécales. Le 28 octobre 2021, les autorités avaient ordonné par arrêté à la société de Philipp Hildebrand (Blackrock), André Lüthi (Globetrotter) et Stefan Linder (Swiss Economic Forum) de nettoyer le cours d’eau, ainsi que de travailler selon des normes écologiques plus strictes.
Une réduction nécessaire de 93% de la production
La réponse de Blausee AG a été rendue publique: le respect des exigences environnementales nécessiterait une réduction de 93% du nombre d’animaux dans la zone de la ferme à truites. C’est pourquoi il a été décidé de «fermer la pisciculture jusqu’à nouvel ordre».
Dans la lettre du 7 mars, dont le SonntagsBlick a eu connaissance, on peut lire: «Après un examen approfondi avec des experts et des spécialistes, nous avons dû constater qu’il n’était pas possible de pratiquer un élevage de truites bio au Fürtbach avec les mesures décidées.» Les expéditeurs laissent entrevoir qu’ils effectueront les travaux de nettoyage convenus.
Vidange des étangs
Interrogée, l’entreprise explique: «Les valeurs limites pour le phosphore et l’ammonium ont été abaissées jusqu’à 90% par rapport à l’autorisation existante.» L’entreprise a donc vidé les bassins de l’installation et examine avec des experts «comment respecter à l’avenir les conditions de rejet dans les eaux de surface avec les techniques de filtrage les plus récentes.» Le secteur de la pisciculture du Blausee représente environ 35% de l’activité totale du site.
Pour les propriétaires, la situation financière de leur projet ne s’est pas vraiment améliorée. Face à l’enquête pénale en cours, Linder & Co. se battent sans relâche pour défendre leur version des faits, selon laquelle des dépôts illégaux dans la carrière de Mitholz auraient provoqué la mort des tonnes de truites. La commune d’implantation est désormais dans le collimateur: la Blausee AG a déposé le 1er mars une réquisition de poursuite contre Kandergrund d’un montant de dix millions de francs. Une somme considérable pour cette commune de 800 âmes.
Tout pour éviter la prescription
C’est le rapport de la commission de gestion (CdG) du 10 février qui a mis le feu aux poudres dans cette affaire. Les surveillants parlementaires du canton critiquent le fait que la soi-disant commission des mines de la commune n’a pas suffisamment assumé sa tâche de contrôle dans la carrière. Par leur action, Linder & Co. veulent éviter la prescription de l’affaire.
La partie adverse se montre sereine, mais se sent mise en porte-à-faux. «Lorsque l’on travaille régulièrement ensemble et que l’on dépend les uns des autres, ce genre de choses entame la confiance», déclare le président de la commune Roman Lanz.
Le directeur des travaux publics Christoph Neuhaus (UDC) se trouve depuis longtemps déjà dans le vent contraire des exploitants du Blausee et des médias qui leur sont favorables. Contrairement à ce que certains attendaient, ce n’est pas Christoph Neuhaus qui a été destitué dimanche, mais son adversaire politique: le président de la commission de gestion et socialiste Peter Siegenthaler.
(Adaptation par Lliana Doudot)