Élu MCG cherche groupe parlementaire
Mauro Poggia tout seul à Berne? Blick sonde l'ampleur du désespoir

La nouvelle Assemblée fédérale entame sa législature lundi. Problème, le conseiller aux États du Mouvement citoyens genevois (MCG) Mauro Poggia n'a toujours pas de groupe à Berne. Blick a sondé les grands partis: quelqu'un finira-t-il par l'accueillir?
Publié: 04.12.2023 à 17:12 heures
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Dernière mise à jour: 04.12.2023 à 17:49 heures
Homme le mieux élu de Genève, Mauro Poggia (MCG) n'a toujours pas trouvé de groupe parlementaire. (Image d'archives)
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Daniella GorbunovaJournaliste Blick

C’est une «Genferei» qui n’en finit plus. Un groupe parlementaire va-t-il finir par ouvrir ses bras à l’homme le mieux élu du bout du Léman au Conseil des États, Mauro Poggia? La figure de proue du Mouvement citoyens genevois (MCG) n’a toujours pas trouvé avec qui siéger à Berne. Pendant ce temps, la nouvelle Assemblée fédérale entame, ce lundi 4 décembre, sa 52ᵉ législature.

Pour rappel, celui dont le parti n’existe que dans le canton de Genève comptait initialement se rapprocher du Centre, dont il était auparavant membre lorsqu’il s’agissait encore du Parti démocrate-chrétien (PDC). Mais le grand parti orange n’a pas voulu de lui. La faute à des «orientations politiques différentes», d’après le président des centristes Gerhard Pfister. Le fait que les deux élus MCG au National — Roger Golay et Daniel Sormanni — ont d’entrée de jeu choisi de rejoindre l’Union démocratique du centre (UDC) aurait également influencé la décision du parti.

Fort de ce constat, Mauro Poggia a ensuite frappé à la porte du parti agrarien, emboîtant le pas à ses collègues du MCG. Il pourrait, de fait, siéger avec l’UDC sans formellement rejoindre le groupe, nous confiait le principal intéressé le 27 novembre dernier. Mais le parti a rapidement calmé ses ardeurs: aucune décision n’a encore été prise, avait rétorqué dans la foulée Thomas Aeschi, chef du groupe parlementaire de l’UDC.

Les conservateurs devraient statuer officiellement sur le cas Poggia ce mardi 5 décembre en fin de journée, d’après nos informations. En attendant, si l’UDC dit non, le Genevois va-t-il finir orphelin de groupe parlementaire — et donc de commission? Hormis l’UDC et le Centre, a-t-il encore des cartes à jouer auprès des autres grands partis, ou est-il condamné à errer seul sous la Coupole? Blick a sondé l’ampleur du désespoir.

L’UDC ou rien

Pendant la campagne électorale, Mauro Poggia s’est apparenté au Centre, à l’UDC et au Parti libéral-radical (PLR), à Genève. Un de ses alliés finira-t-il par lui faire une place? Contacté, le Centre, qui s’est déjà positionné sur le sort du principal intéressé, n’a pas répondu à nos sollicitations. L’UDC, quant à elle, affirme qu’elle communiquera mardi 5 décembre.

Du côté du PLR, la conseillère nationale Simone de Montmollin est claire: «Mauro Poggia ne peut pas siéger plus au PLR qu’au Centre, glisse-t-elle au bout du fil. Dès lors que les deux élus MCG au National siègent déjà avec l’UDC, la loi sur le Parlement est claire. Par ailleurs, le PLR n’a pas reçu de demande de sa part. S’il ne souhaite pas, ou qu’il n’arrive pas à s’entendre avec le parti agrarien, ma foi, il n’aura pas de groupe.»

Simone De Montmollin, conseillère nationale du Parti libéral-radical (PLR) genevoise.
Photo: keystone-sda.ch

La femme de droite encoche ses flèches: «Ce sont des questions qui étaient connues et qu’il aurait dû éclaircir avant. Tout le monde savait que, s’il est élu, il lui faudrait rejoindre un groupe, à Berne, pour pouvoir siéger en commission. On ne peut pas se faire élire d’abord, puis regarder chez qui on a envie d’aller ensuite: ce n’est pas comme cela que ça marche.»

«Pas des bouche-trous»

Pour mémoire, le MCG se veut un parti «ni de gauche, ni de droite». Ce qui lui fait un point en commun avec les Vert’libéraux, non? Contactée, la conseillère nationale vaudoise Céline Weber ne se montre pas complètement allergique à l’idée. Mais, après l’heure, ce n’est plus l’heure.

Pour elle, le temps des négociations est passé: «Si le MCG venait frapper à notre porte maintenant, après le début de la législature et le refus du Centre d’accueillir Mauro Poggia, nous nous sentirions un peu comme les bouche-trous.» La politicienne complète: «Accueillir Mauro Poggia parmi nous poserait aussi un certain nombre de problèmes. À commencer par le fait que les deux élus MCG au National ont déjà choisi de rejoindre l’UDC…»

Céline Weber, conseillère nationale Vert'libérale vaudoise.
Photo: keystone-sda.ch

Et si ce n’était pas le cas? Si Roger Golay et Daniel Sormanni faisaient demi-tour et voulaient, d’un coup, rejoindre les Vert’libéraux? «Nous devrions alors étudier leurs idées politiques plus en détail. Mais, à vue de nez, j’ai l’impression que chacun de ces deux politiciens a un petit peu son propre programme. Ils ont l’air d’avoir des positionnements assez différents…»

De toute façon, dans la pratique, lier le MCG aux Vert’libéraux serait presque mission impossible, «puisque notre conseillère aux États, Tiana Moser, fait elle-même partie du groupe des Vert-e-s à la Chambre haute». Conséquence? «Il serait difficilement imaginable que Tina Moser et Mauro Poggia forment un groupe à eux seuls, ou que Mauro Poggia se retrouve à siéger avec les Verts comme elle… J’ai donc de la peine à imaginer un scénario dans lequel il nous rejoindrait.»

«Une Genferei qui nous fait honte…»

Sondée à son tour, la conseillère nationale genevoise des Vert-e-s Delphine Klopfenstein Broggini est catégorique: accueillir Mauro Poggia, c’est «complètement exclu». Elle précise: «Mauro Poggia se dit 'ni de gauche ni de droite', mais, au final, il a fait élire deux conseillers nationaux UDC supplémentaires — puisque les deux élus MCG à la Chambre basse ont directement décidé de siéger avec le parti agrarien.»

Delphine Klopfenstein Broggini, conseillère nationale Verte genevoise.
Photo: keystone-sda.ch

La Verte ajoute qu’elle n’est pas surprise par les pérégrinations du MCG: «C’est une immense mascarade, dont Genève va payer le prix. Nous aurions pu, avec la sortante non réélue Lisa Mazzone, avoir la présidence du Conseil des États l’année prochaine. À la place, on a un homme 'ni de gauche ni de droite', ni de nulle part, d’ailleurs. L’un de nos deux élus à la Chambre haute risque de se retrouver sans commission, à la suite d’une 'Genferei' qui nous fait honte…»

Du côté du Parti socialiste (PS), le cochef de groupe aux Chambres, Samuel Bendahan, déclare: «D’après mes informations, il n’a jamais demandé à siéger avec les socialistes. C’est donc une question qui ne s’est jamais posée. Si elle venait un jour à se poser, mon parti en débattrait à l’interne, de façon démocratique.»

Le Vaudois ne cache cependant pas son scepticisme: «Quoi qu’il en soit, nous sommes un parti de gauche. Même s’il est vrai que nous pourrions nous entendre avec Monsieur Poggia sur certains dossiers spécifiques, comme celui de la caisse maladie unique, il ne faut pas oublier qu’il faisait partie de l’alliance de la droite genevoise pour les élections fédérales, face aux candidats de la gauche.»


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