Des couleuvres à Zurich!
Les serpents sont-ils en train d'envahir les lacs suisses?

La population de serpents explose dans les lacs suisses. Un spécialiste de l'environnement explique ce phénomène et revient sur les bonnes pratiques à adopter face à certaines espèces.
Publié: 05.07.2023 à 14:02 heures
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Dernière mise à jour: 05.07.2023 à 14:12 heures
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La couleuvre à collier est naturellement présente dans les lacs suisses.
Photo: imago/imagebroker
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Katja Richard

Alerte rouge au lac de Zurich, depuis qu'une vidéo a dévoilé deux couleuvres tachetées en train de se battre pour un poisson à Herrliberg! Le cas est pourtant loin d'être anodin: ces reptiles se multiplient dans nos eaux. La population de couleuvres tachetées a par exemple augmenté massivement autour du lac de Zurich au cours des vingt dernières années.

Selon le naturaliste et spécialiste de la protection des reptiles Manuel Frei, le phénomène n'a rien de surprenant: «A l'origine, la vipère n'était présente qu'au sud des Alpes, dans le Tessin, le Misox et le Puschlav», explique-t-il. «Jusqu'à ce qu'elle soit relâchée par des particuliers dans les années 1990.»

Résultat: on trouve de plus en plus de couleuvres tachetées près des cours d'eau, car les conditions y sont idéales: «Elles n'ont pas de concurrence quand elles chassent le poisson», indique Manuel Frei.

La couleuvre à échelons, quant à elle, se concentre sur les pierres des rives pour se réchauffer. On rencontre néanmoins plus rarement la couleuvre à collier, naturellement présente dans nos lacs, mais qui se tient plutôt dans les zones riveraines naturelles avec des roseaux ou des roselières.

La couleuvre à collier est naturellement présente dans nos lacs, elle préfère les rives naturelles.
Photo: Manuel Frei

Menaces d'extinction

Manuel Frei voit d'un œil critique l'hystérie collective autour des serpents du lac de Zurich: «Dès qu'un serpent est filmé et qu'il atterrit sur la Toile et dans les médias, l'excitation est à son comble», dit-il. Mais le problème n'est pas la recrudescence de serpents: «Il y a simplement de plus en plus de gens sur les rives des lacs et nous empiétons à vue d'œil sur leur espace vital.»

Plutôt que d'avoir peur des serpents, il recommande de les protéger. Neuf variétés de serpents figurent en effet sur la liste rouge des espèces menacées en Suisse. Leur survie est aujourd'hui compromise par l'agriculture et l'urbanisation.

L'herpétologue Manuel Frei est spécialisé dans la protection des reptiles et des amphibiens.
Photo: Manuel Frei

«On peut se réjouir quand on voit un serpent. Ils sont craintifs et disparaissent aussitôt que nous apparaissons», confie Manuel Frei.

De plus, seules deux espèces sont venimeuses, la vipère aspic et la vipère péliade. «Mais elles ne sont pas présentes sur le Plateau et une rencontre est extrêmement rare», rassure le naturaliste. Les statistiques lui donnent en effet raison: aucune personne n'est morte d'une morsure depuis 1961 en Suisse.

Ils ne mordent pas, mais...

Gare toutefois à ne pas toucher une couleuvre à collier ou une couleuvre tachetée repérée au bord d'un lac. «Elles ne mordent pas, mais peuvent émettre des sécrétions malodorantes», explique Manuel Frei.

Ce dernier préconise plutôt d'observer les animaux de loin. Il ajoute: «Les serpents sont considérés comme froids et insensibles. Mais si vous avez déjà observé des serpents en train de s'accoupler, vous découvrirez qu'ils sont très tendres et délicats entre eux», poursuit-il.

La couleuvre tachetée a également été introduite sur le lac Léman et concurrence l'habitat de la couleuvre vipérine qui y est installée
Photo: Shutterstock

Mais qu'en est-il de la propagation de la couleuvre tachetée dans d'autres lacs suisses? Selon Jörg Gemsch, de l'Office de l'agriculture et des forêts à Lucerne, aucun rapport n'est disponible sur le sujet.

On note toutefois une augmentation plus importante de la population de serpents sur les lacs de Brienz et de Bienne. Selon Jörg Gemsch, l'augmentation de la population de couleuvres tachetée au bord du lac Léman est également problématique. En effet, elles menacent l'habitat de la couleuvre vipérine, qui s'y trouve déjà et qui est elle-même «menacée d'extinction», affirme-t-il.

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