Mardi, un sujet brûlant sera à l’ordre du jour au Palais fédéral. La Commission de l’économie du Conseil national débattra pour la troisième fois de l’abolition de la valeur locative. «La valeur locative correspond au loyer fictif qu’un propriétaire pourrait recevoir à la location de son bien», détaille UBS sur son site internet.
Pour les autorités fiscales, ce montant fictif est perçu comme un revenu. Ce qui est difficilement compréhensible, puisqu’un propriétaire n’a de revenus que s’il loue son bien immobilier. S’il y vit soi-même, il économise simplement le loyer.
Outre le fait que personne ne semble comprendre cette logique fiscale, la valeur locative et les intérêts hypothécaires ont pour conséquence de décourager certains d’acheter leur propre logement. Payer davantage d’impôts peut vite devenir difficile, surtout pour les personnes qui ont des petits revenus comme les retraités.
Une solution équilibrée
La valeur locative devrait donc être supprimée – la majorité des partis s’entend sur ce point. Mais comment? Et à quel but? Et comment s’assurer que les locataires ne soient pas désavantagés fiscalement? Depuis des décennies, les politiciens se cassent les dents sur ces questions.
Dernièrement, c’était au tour du Conseil des États d’avancer une proposition. Il a mis sur la table un texte qui, dans l’ensemble, semble tout à fait raisonnable. La valeur locative des propriétés principales devrait être supprimée (elle devrait toutefois continuer à s’appliquer aux résidences secondaires, car les cantons de montagne sont tributaires des recettes fiscales). En contrepartie, les propriétaires ne pourraient déduire les intérêts passifs plus que de manière très limitée et les dépenses d’entretien ne seront plus déductibles du tout.
Deux fois Noël pour les propriétaires
Face à cette alternative, la Commission de l’économie du Conseil national n’est pas du tout convaincue. Elle s’est attaquée à ce modèle relativement simple et veut offrir le lard et le cochon aux propriétaires. Ainsi, la valeur locative devrait bien être supprimée, ce également pour les résidences secondaires, et les déductions pourraient rester!
La proposition de la Commission a de quoi réjouir les propriétaires. Mais les discussions ne s’arrêtent pas là: les représentants du centre ont présenté une autre variante à la commission.
Selon celle-ci, la valeur locative ne devrait pas être supprimée, mais réduite à 60% du loyer pratiqué sur le marché. Dans ce modèle aussi, les déductions devraient persister. Et même, si les cantons le souhaitent, ils pourraient descendre en dessous de ce seuil des 60% lors du calcul. Les cantons devraient alors garantir aux locataires une déduction fiscale de leur loyer. Ce qui ne fait que compliquer la réforme et augmenter le nombre d’opposants.
L’UDC annonce sa résistance
«La proposition alternative n’a plus rien à voir avec la volonté initiale d’abolir la valeur locative, souligne le chef du groupe UDC Thomas Aeschi. L’UDC n’y donnera pas suite. Il s’agit d’abolir la valeur locative afin de protéger en particulier les retraités qui doivent vendre leur logement parce qu’ils n’ont plus les moyens de payer des impôts.»
Les représentants du PLR devraient également être de cet avis, d’autant plus que, selon les dires, il pourrait même en résulter une charge fiscale plus élevée pour les propriétaires dans certains cas, comme l’auraient démontré les calculs de l’administration fédérale. Interrogé à ce sujet, le président de la commission Leo Müller (centre) ne souhaite pas s’exprimer.
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Les locataires auront probablement le dernier mot
Quoi qu’il en soit, cette variante devrait avoir du mal à passer. La question cruciale reste donc la suivante: le Conseil national va-t-il quand même se rallier au projet du Conseil des Etats lors de la session d’automne?
Si ce n’est pas le cas, une débâcle risque de s’ensuivre dans les urnes. Car si les propriétaires conservent le beurre et l’argent du beurre – c’est-à-dire l’abolition de la valeur locative tout en maintenant les déductions fiscales pour les intérêts passifs et les frais d’entretien – les locataires risquent bien de monter au front avec un référendum. Et comme seuls 40% des Suisses sont propriétaires de leur logement, le non du peuple est assuré.
(Adaptation par Lliana Doudot)