Contre une Suisse à 10 millions
Beat Jans veut couper l'herbe sous le pied de l'UDC sur l'immigration

Le Conseil fédéral veut couper l'herbe sous le pied de l'initiative de l'UDC sur l'immigration en proposant un train de mesures. Il prévoit notamment des règles plus strictes en matière d'asile ou une meilleure utilisation du potentiel de main-d'œuvre locale.
Publié: 29.01.2025 à 16:37 heures
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Dernière mise à jour: 30.01.2025 à 08:08 heures
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Le ministre de la Migration Beat Jans veut mettre à terre l'initiative de l'UDC.
Photo: Philippe Rossier
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Ruedi Studer

L’UDC veut stopper la croissance démographique en Suisse et éviter que le seuil des dix millions d'habitants soit atteint avec sa dernière initiative sur l'immigration – quitte à remettre en cause la libre circulation des personnes avec l’Union européenne et donc les accords bilatéraux. Le Conseil fédéral rejette cette initiative sans proposer de contre-projet. Il refuse toute idée de contingents ou de plafonds pour l’immigration en provenance de l’UE.

Mais il ne compte pas rester inactif. La question de l’immigration préoccupe la population, d’autant plus que la Suisse a enregistré un nouveau record d’immigration l’année dernière et a dépassé la barre des neuf millions d’habitants. L’initiative de l’UDC pourrait donc séduire une partie des électeurs.

Un ensemble de mesures en réponse

Plutôt qu’un contre-projet, le Conseil fédéral veut désamorcer l’initiative de l’UDC en proposant un paquet de mesures d’accompagnement. En juin dernier, le ministre socialiste de l’immigration, Beat Jans, a été chargé d’élaborer un tel plan. Une première version a été présentée en novembre à ses collègues du Conseil fédéral.

Ce dernier a finalement opté pour une version allégée, dont voici les principaux points:

  • Le droit d'asile doit être durci sur plusieurs points. Ainsi, les demandes d’asile pourraient être classées plus rapidement lorsque les requérants disparaissent ou refusent de coopérer. En outre, les admissions provisoires feront l’objet de contrôles plus réguliers pour évaluer si elles peuvent être levées. Parallèlement, le Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM) est déjà en train d'élaborer et de mettre en œuvre une série de nouvelles mesures afin que les personnes qui ont commis des délits en Suisse ne puissent pas profiter du droit d'asile et des étrangers.
  • Le potentiel de la main-d'œuvre locale doit être mieux exploité. Ainsi, les personnes qui ont immigré dans le cadre du regroupement familial doivent notamment être intégrées plus fortement et plus rapidement dans le marché du travail. Cela concerne surtout les femmes. En outre, les demandeurs d'emploi plus âgés doivent être soutenus de manière plus ciblée lors de leur retour sur le marché du travail. Des allocations d'innovation aux cantons et des allocations d'initiation au travail de l'AC pour les demandeurs d'emploi ne percevant pas d'indemnités journalières sont également à l'étude.
  • Il est également prévu de renforcer la «Lex Koller». Diverses adaptations permettront de réglementer plus strictement les conditions auxquelles les personnes résidant à l'étranger peuvent acheter et conserver des biens immobiliers en Suisse. L'acquisition de logements de vacances sera également examinée.
  • Les fonds destinés à la promotion de la place économique et donc du tourisme seront examinés à la loupe.
  • Les améliorations dans le domaine de la location et du logement ont été controversées au sein du Conseil fédéral. Seuls des fonds d'encouragement supplémentaires pour les logements à loyer modéré ont été maintenus. Le fonds de roulement pour la construction de logements d'utilité publique sera prolongé à partir de 2030 et augmenté de 150 millions de francs.

Mesures de politique sociale supprimées

A l'origine, Beat Jans voulait ficeler un paquet beaucoup plus important, qui prévoyait également des mesures de politique sociale. Les syndicats demandaient que la population participe aux bénéfices que les entreprises réalisent grâce à l'immigration. Mais ces revendications ont été rejetées par la majorité bourgeoise.

Ainsi, les mesures suivantes ont été retirées du paquet :

  • Il n'y aura pas d'augmentation des allocations familiales. Il était question de 50 francs supplémentaires par enfant et par mois.
  • La protection contre le licenciement des travailleurs âgés ne sera pas améliorée.
  • L'idée d'un fonds national pour la formation professionnelle a été enterrée.
  • La franchise AVS pour les personnes qui travaillent au-delà de l'âge de la retraite ne sera pas augmentée.

Beat Jans s'est heurté à une résistance particulière de la part des conseillers fédéraux UDC et PLR. Ceux-ci ont bloqué de nombreuses propositions. Les hommes de l'UDC Guy Parmelin et Albert Rösti sont peu enclins à mettre des bâtons dans les roues de leur propre initiative.

Et les concessions faites aux syndicats ont également déplu aux PLR Karin Keller-Sutter et Ignazio Cassis. Karin Keller-Sutter a insisté sur la neutralité budgétaire, c'est-à-dire que tout ce qui coûte a du mal à passer. Au lieu de cela, elle a insisté pour que Beat Jans ajoute des mesures de durcissement en matière d'asile au paquet.

Discussions au Parlement

Mais même le paquet allégé est encore loin d'être dans la poche. Ainsi, des voix s'élèvent au sein de l'administration pour considérer le paquet de mesures comme une «politique de pansement» qui n'a que peu d'effet. L'électorat ne se laissera guère influencer par ces mesures.

Certaines mesures devraient également faire l'objet de débats houleux au Parlement. Même la question fondamentale de savoir si les mesures d'accompagnement sont vraiment nécessaires. Il est également envisageable que le Parlement mise sur son propre contre-projet.

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