Alors qu'elle se balade dans les rayons de la Migros de Montreux, ouverte le dimanche, le 18 août, Yasmine* constate une chose étrange dans le frigo des produits végé'. Dans ses mains, deux paquets du même produit, les Triangles de légumes de la gamme V-Love. Sauf que, sur l'un des emballages, on peut lire le Nutri-score A. Alors que, sur l'autre, c'est la lettre B qui s'affiche.
Quésaco? Quel est le bon? Yasime termine son shopping dominical en partageant son étonnement avec ses followers sur Instagram: elle poste une image des deux produits côte-à-côte. Et commente: «Les Nutri-scores de la Migros c'est pas une science exacte à priori.»
On a posé la question au géant orange. Qui rétorque que B est (désormais) le bon score, pour ce produit, comme on peut le lire dans le catalogue en ligne. Et ces différences d'évaluation sont en fait... normales, nous explique-t-on. Puis, de toute façon, le groupe est sur le point de se débarrasser de ces lettres colorées, qui ne font pas exactement consensus.
Outil made in France, le Nutri-score a fait son petit chemin dans sept pays européens. Il a débarqué en Suisse en 2019, et évalue désormais les qualités nutritionnelles de milliers de produits vendus dans notre pays.
Avec une échelle allant de A (très bien) à E (valeur la plus basse), le Nutri-score vise surtout à aider à choisir, parmi des produits identiques, celui qui est le plus sain, en fonction de ses composants.
Mais le A vert foncé ne signifie pas forcément que l’aliment peut être consommé sans modération. Et, inversement, le E rouge n’a pas valeur d’interdiction, rappelle la Confédération.
Outil made in France, le Nutri-score a fait son petit chemin dans sept pays européens. Il a débarqué en Suisse en 2019, et évalue désormais les qualités nutritionnelles de milliers de produits vendus dans notre pays.
Avec une échelle allant de A (très bien) à E (valeur la plus basse), le Nutri-score vise surtout à aider à choisir, parmi des produits identiques, celui qui est le plus sain, en fonction de ses composants.
Mais le A vert foncé ne signifie pas forcément que l’aliment peut être consommé sans modération. Et, inversement, le E rouge n’a pas valeur d’interdiction, rappelle la Confédération.
Une révision du Nutri-score
Contacté, Tristan Cerf, le porte-parole de Migros, n'est en fait pas surpris par le post de Yasmine. Il nous explique que le Nutri-score réévalue ses produits à intervalles réguliers: «Certains produits ont en effet connu une nouvelle note. Celle-ci est visible en rayon au fur et à mesure des réimpressions de l'emballage.»
Quid de la confusion des consommateurs? «Pour des raisons évidentes de durabilité, aucun emballage déjà imprimé n'est jeté, rétorque le communicant. Donc, en fonction des stocks disponibles, l'apparition d'une nouvelle note sur un produit peut être reportée de plusieurs mois. Mais le produit mentionné n'a pas changé. La recette est la même, tout comme sa qualité», rassure-t-il.
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Qu'est-ce qui a changé, alors? Le nouveau score serait «plus strict» que le précédent. À savoir, comme titraient nos confrères de «24 heures» à l'annonce du changement en janvier 2024: «Le Nutri-score durcit le ton envers le sucre, le sel et le gras.»
Ce qui explique que les Triangles de légumes soient passés de A à B par exemple. Et on risque d'en voir encore, des paquets confondants, car les producteurs ont deux ans pour adapter leurs emballages.
Peu importe, Migros jette l'éponge
A, B, C, D, E... De toute façon, Migros va se débarrasser de ce Nutri-score, apprenait-on en mai 2024. Quelle est la cause de ce rétropédalage, alors que l'échelle, d'origine française et utilisée dans sept pays d'Europe, n'a été insaturée sur les emballages du groupe qu'en 2021?
Une question de coûts: «L'expérience acquise depuis son lancement, il y a trois ans, a montré que les avantages du Nutri-score pour la clientèle sont trop faibles par rapport aux coûts élevés. Même après plusieurs années, le Nutri-Score est trop peu connu et souvent mal compris, ce qui ne justifie pas le coût élevé des adaptations d'emballages.»
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Un argumentaire qui fait sauter au plafond la Fédération romande des consommateurs (FRC). Rebecca Eggenberger, chargée du dossier au sein de l'association, monte au créneau: «En faisant marche arrière sur le Nutri-Score, en réalité, la Migros fait passer la rentabilité avant la santé de ses clients, à mon avis sous la pression de certains lobbys, comme celui des produits du terroir — par exemple celui du fromage— qui trouvent que ce score ne leur rend pas service.»
Les consommateurs moins bien renseignés?
Le Nutri-score ne serait-il pas en effet trop complexe à saisir, au final? Reprenons l'exemple du fromage: il n'est pas forcément mauvais pour la santé, et pourtant, il est souvent dans l'orange ou le rouge, sur l'échelle des couleurs.
Pour Rebecca Eggenberger, c'est dommage, de brandir l'argument du «trop compliqué»: «Évidemment qu'on ne peut pas comparer le Nutri-Score d'une huile d'olive avec celui d'un steak de légumes, pour prendre un autre exemple. Et même si davantage d'information devrait être donnée sur la manière d'utiliser ce score, il présente de gros avantages: c'est une aide au choix comme il n'en existe pas d'autre en Suisse, et ce score est mis à jour régulièrement, tous les cinq ans.»
Pour rappel, le Nutri-score est également attaqué à Berne: après être passée aux États, une motion pour «mettre un terme à l'emploi problématique du Nutri-score» a également été accepté à la chambre basse en mars 2024. D'après «Le Temps», des élus — principalement de droite — reprochent à l'échelle d'être «réductrice», et surtout de pénaliser les «produits naturels ou typiquement suisses», car elle ne prendrait «pas assez en compte le degré de transformation des produits, la présence d’additifs, la méthode de production et la provenance», par exemple.
À gauche, au contraire, on déplore le fait de «torpiller» un outil qui «vise en priorité à faire le tri au moment de l’achat entre les produits (ultra)transformés d’une même catégorie», comme l'affirmait Sophie Michaud Gigon (Les Vert-e-s, VD), secrétaire générale de la Fédération romande des consommateurs, dans les colonnes de nos confrères.
*Nom connu de la rédaction