La semaine prochaine, le conseiller fédéral Beat Jans se rendra en Tunisie. Notre ministre de l'asile s'entretiendra également avec son homologue nord-africain sur la pression migratoire croissante. Faute de perspectives, de plus en plus de Tunisiens veulent partir, vers l'Europe et vers la Suisse.
Ceux qui parviennent jusqu'à nous déposent une demande d'asile. Selon les statistiques fédérales, 99% d'entre elles sont rejetées. Mais l'expulsion est compliquée, coûteuse et – parce qu'il y a toujours de nouveaux arrivants – une impasse. Certains d'entre eux commettent des délits mineurs pendant leur bref séjour chez nous, afin d'obtenir un peu d'argent pour eux et pour leur famille restée dans leur pays d'origine. Un exemple: en 2023, la majorité des vols de voitures, qui ont doublé en 2023, ont été commis par des délinquants originaires du Maghreb.
La série de Blick sur la Tunisie
Des fonds de développement pour une démocratie en voie d'abolition
Blick a voulu se faire une idée en se rendant dans l'un des pays d'origine des migrants qui tentent leur chance chez nous. Notre journaliste Samuel Schumacher a rencontré de jeunes hommes qui racontent sans détour comment ils se réjouissent de venir en Suisse, car même les prisons y sont meilleures que leur vie dans leur pays. Un passeur témoigne en outre sur son commerce lucratif avec ses compatriotes, qui paient jusqu'à 2000 francs pour la dangereuse traversée de la Méditerranée (plus de six mois de salaire) – au risque d'y laisser la vie.
La Suisse a dépensé 101 millions de francs pour la Tunisie au cours des quatre dernières années. Pour renforcer la démocratie et promouvoir l'économie. Dans le même temps, le président tunisien a mis à mal cette même démocratie. Il a dissous le Parlement, licencié des juges, arrêté des opposants et modifié la Constitution afin de pouvoir gouverner avec un pouvoir illimité.
Des millions de fonds de développement suisses pour renforcer une démocratie qui est en même temps abolie – comment cela peut-il aller de pair? Que fait exactement la Tunisie avec les millions de la Suisse pour «promouvoir la démocratie»? Que fait le gouvernement tunisien contre l'exode massif de son propre peuple en direction de l'Europe?
Autant de sujets que devra aborder Beat Jans lors de sa visite en Tunisie. Et pour le conseiller fédéral PS lui-même, la question centrale depuis le début de son mandat en début d'année est la suivante: qu'est-ce que la Suisse peut faire de plus contre l'immigration illégale incontrôlée de personnes qui n'ont aucune chance d'obtenir l'asile?
L'amélioration des accords de réadmission, entre autres avec la Tunisie, en fait partie. Les fonds d'aide au développement comme moyen de pression. Mais cela n'est rien d'autre qu'une politique d'arrangements sommaires.
Nouvelle recette: expulser les migrants vers le Rwanda
Nos voisins européens l'ont compris. Ils envisagent des moyens plus rigoureux. La nouvelle recette s'appelle la solution des pays tiers. Les regards sont tournés vers les Britanniques, qui veulent expulser les premiers demandeurs d'asile vers le Rwanda à partir de juillet. Le Royaume-Uni a conclu un accord avec ce pays d'Afrique de l'Est. Ceux qui entrent illégalement en Grande-Bretagne seront conduits au Rwanda, considéré comme un pays tiers sûr. En contrepartie, le Rwanda va recevoir beaucoup d'argent.
L'objectif: la dissuasion. L'espoir: beaucoup moins de personnes osent entreprendre le voyage vers le nord, qui met leur vie en danger, car elles savent qu'elles finiront par atterrir au Rwanda.
Dans l'UE, une politique d'asile cohérente n'est plus une question de parti. Même les pays gouvernés par la gauche ont amorcé un changement de cap radical. L'Allemagne, sous la direction du chancelier SPD Olaf Scholz et de sa ministre de l'Intérieur SPD Nancy Faeser, a renforcé les contrôles aux frontières. Les procédures d'asile en dehors de l'Europe ne sont plus donc taboues dans le débat allemand. Le gouvernement social-démocrate danois a lui décidé d'envoyer des détenus en attente d'expulsion en prison au Kosovo. Le royaume nordique souhaite adopter un modèle de renvoi vers les pays tiers calqué sur celui des Britanniques.
Il n'y en a pas trop, mais ce sont les mauvais qui arrivent
Ruud Koopman, professeur hollandais renommé dans le domaine de la migration, recommande également cette solution à la Suisse. «Le modèle britannique est également intéressant pour la Suisse», a-t-il déclaré cette semaine dans une interview pour la NZZ. La Suisse réduirait drastiquement son pouvoir d'attraction sur les demandeurs d'asile si elle disait clairement: «Vous avez un droit à la protection, mais celui-ci n'est pas réalisé en Suisse, mais dans un pays tiers.»
Mais Ruud Koop Koopman estime que la Suisse devrait en contrepartie augmenter l'accueil humanitaire des réfugiés dont le pays a besoin. L'expert l'assure: «Le problème n'est pas que nous avons trop d'immigration, mais une immigration de mauvaise qualité», les petits délinquants tunisiens, par exemple.
Le monde à l'envers pour l'UDC et la gauche
Les partis aiment cuisiner leur propre soupe avec le thème délicat de la migration. Les migrants sont soit diabolisés (par la droite), soit glorifiés (par la gauche). Mais à l'heure du changement d'époque en matière de politique d'asile, les dogmes idéologiques perdent de plus en plus leur légitimité.
Quelle ironie: l'UDC devrait applaudir l'UE, qu'elle méprise tant, pour avoir serré la vis de l'asile plus vite et plus fort que la Suisse. Et la gauche ne sait plus où donner de la tête lorsque ses amis de parti dans toute l'Europe laissent derrière eux leurs anciennes positions en matière de politique des réfugiés.
Nous attendons avec impatience de voir où le voyage de Beat Jans, social-démocrate pragmatique et européen enthousiaste, nous mènera encore.