La journée avait commencé par une longue et belle procession, le long de la forêt jouxtant le stade de Cologne, où entre 10'000 et 12'000 fidèles de la Nati, selon les estimations de la police locale, s'étaient rejoint pour communier au son de «'s Berner Oberland isch schön» et autre «Sierra madre», autant de chants entonnés quasiment religieusement, dans l'espérance d'un bon début d'Euro pour la Nati.
Ce cortège impressionnant s'est déplacé en direction du stade sous le regard attentif des autorités et a vécu une après-midi de rêve jusqu'au bout, grâce au talent de Granit Xhaka et de ses coéquipiers, mais aussi (et surtout?) à celui de Murat Yakin. Même si la deuxième période a été beaucoup moins bien maîtrisée que la première, la Suisse a entamé son Euro en battant logiquement la Hongrie, ce samedi, ce qui n'était pas une formalité, loin de là, mais qui a été accompli avec la manière.
Si les supporters de la Nati ont largement fait le boulot en tribunes, cela a donc également été le cas des joueurs et du staff, puisque le visage qu'a montré l'équipe de Suisse sur le terrain a été extrêmement séduisant en première période et que les trois points ont été au rendez-vous en fin de match, ce qui n'avait rien d'évident avant la partie au vu du climat de scepticisme ayant accompagné la fin des qualifications pour cet Euro. Au final, la Nati s'est imposée 3-1 grâce à des réussites de Kwadwo Duah et de Michel Aebischer en première période et du revenant Breel Embolo, dans les arrêts de jeu de la deuxième période, alors que les Hongrois étaient revenus à une longueur.
L'entrée en lice dans une phase finale représente d'ailleurs toujours une part d'inconnu, encore plus avec cette équipe de Suisse capable du meilleur comme du pire, à l'image de ce qu'elle a montré en fin d'année dernière. Murat Yakin, de plus, n'avait pas choisi la facilité en décidant de s'offrir encore une incertitude supplémentaire en titularisation Michel Aebischer au poste de piston gauche et Kwadwdo Duah à celui d'avant-centre, en lieu et place de Zeki Amdouni. Un double pari extrêmement risqué, mais qui s'est avéré très largement payant et ce d'entrée de jeu!
L'intuition gagnante de Murat Yakin
Il n'a en effet fallu que douze minutes à la Nati pour éteindre tous les doutes grâce à un but de... Kwadwo Duah sur une ouverture lumineuse de Michel Aebischer! Cette réussite, d'abord annulée pour un hors-jeu présumé de l'avant-centre bernois, puis validée grâce à la VAR, est venue donner raison à Murat Yakin et soulager l'équipe de Suisse, et son formidable public, d'un énorme poids! Toute la pression d'un début de compétition a pu s'envoler, les choix de Murat Yakin étaient validés et c'est la Hongrie qui plongeait dans le doute face à cette Nati libérée.
Ruben Vargas s'est créé une énorme occasion, quasi dans la foulée, mais l'épaule de Peter Gulacsi a offert un sursis à la Hongrie, laquelle était complètement étouffée par la maîtrise suisse à mi-terrain. Granit Xhaka régnait en maître sur la partie, et, les rares fois où Dominik Szoboszlai, complètement éteint, trouvait l'un ou l'autre espace, Manuel Akanji surgissait pour rappeler à quel point il était un défenseur de haut niveau. Oui, les cadres de l'équipe de Suisse ont répondu présent ce samedi, et comment!
La merveille de frappe enroulée de Michel Aebischer pour le 2-0
La Nati a d'ailleurs doublé la mise au meilleur moment, juste avant la pause, grâce à une frappe enroulée de Michel Aebischer, pour donner encore plus raison à Murat Yakin! Le Fribourgeois, dont la titularisation a surpris absolument tout le monde, encore plus au poste de piston gauche, a été le grand monsieur de cette première période. Dan Ndoye, lui, a été prié d'occuper le poste de milieu offensif droit, reléguant Xherdan Shaqiri sur le banc en ce début de partie. 2-0, score à la pause, un avantage amplement mérité pour les Suisses.
La première vraie, et énorme, frayeur pour la Suisse est intervenue à la 62e lorsque Barnabas Varga, seul face à Yann Sommer, n'a pas réussi à cadrer son coup de tête. Cette occasion-là avait le poids d'un but et intervenait au cœur d'un petit temps faible pour la Nati, laquelle était pourtant bien revenue des vestiaires. Disons-le ainsi: durant 60 minutes, la Suisse était largement au-dessus, mais ce moment d'inattention, couplé à un peu de relâchement, a semé le doute dans les esprits suisses, ce qu'est venu confirmer le but du 2-1 (64e), Michel Aebischer se faisant passer devant au deuxième poteau par le même Barnabas Varga.
Un passage à vide à l'heure de jeu
Conscient que la Nati pouvait perdre tout le bénéfice de sa brillante première période, Murat Yakin a alors immédiatement réagi en faisant entrer Leonidas Stergiou pour Silvan Widmer (averti d'entrée de match) et Zeki Amdouni pour Kwadwdo Duah lequel disparaissait au fur et à mesure des minutes passées sur la pelouse.
La Suisse s'est alors reconcentrée, s'est créée une belle occasion en rupture par Dan Ndoye (70e), puis de la tête par Fabian Schär sur le corner ayant suivi (71e). Le sélectionneur a alors choisi ce moment pour faire entrer Breel Embolo, lequel est venu s'installer en pointe, Zeki Amdouni glissant en soutien. La Nati a alors gagné en maîtrise, mais, avec son seul but d'avance, ne pouvait plus être sûre de rien.
L'entrée de l'attaquant de l'AS Monaco a cependant fait beaucoup de bien, puisqu'elle a permis à la Suisse de garder le ballon, alors que les Hongrois tentaient de faire mal à chaque récupération, et le travail de corps du Bâlois a permis de gagner de précieux mètres et de nombreuses secondes essentielles à ce stade de la partie. Au final, la Nati est même passée plus près du 3-1 que du 2-2, grâce notamment à une tête de Granit Xhaka sur un corner provoqué par une frappe de Vincent Sierro, entré en jeu pour les dernières minutes, et aussi par un face à face mal maîtrisé par Fabian Rieder, entré en jeu en même temps que le Valaisan.
Ce fameux but de la libération a d'ailleurs fini par tomber à la 93e grâce à Breel Embolo lui-même, auteur d'un subtil lob sur Peter Gulasci pour permettre aux supporters et aux joueurs de la Nati de mieux respirer et de pouvoir célébrer cette victoire amplement méritée.
Suisse-Ecosse mercredi à Cologne pour valider la qualification
Voilà donc la Nati en position idéale dans ce groupe, puisque l'Allemagne et elle comptent toutes deux trois points. La prochaine journée mettra aux prises l'Allemagne à la Hongrie et la Suisse à l'Ecosse, mercredi à Cologne. Avec un point, la Suisse sera assurée de filer en 8es. Mais même avec une défaite, le coup serait encore largement jouable au vu du format de la compétition qui qualifie les quatre meilleurs troisièmes des six groupes. Mais ce samedi après-midi, au vu de la prestation enthousiasmant de Granit Xhaka et de ses coéquipiers, ce n'est pas exactement l'idée.