C'est seulement en été que les frères Jurkovitz peuvent porter le même maillot. Durant la saison régulière, Natan joue à Fribourg Olympic et Thomas évolue sous les couleurs des Lions de Genève. Lorsque qu'il a fondé son équipe de 3x3, l'aîné fribourgeois a demandé à son cadet genevois de le rejoindre.
Depuis l'été dernier, les frères Jurkovitz écument donc les demi-terrains de basket ensemble. Blick les a rencontrés en marge du Challenger de Fribourg, qui avait donc lieu sur leurs terres. Interview croisée.
Vous êtes presque les frères les plus connus du basket-ball suisse.
Natan: Il y a encore les frères Mladjan.
Oui, mais ils sont davantage proches de leur fin de carrière que vous.
Thomas: C'est possible – en tout cas, on est connus vers Fribourg et Genève. Ça fait plaisir à entendre.
C'était un objectif, quand vous avez commencé le basketball, d'y arriver ensemble?
Natan: Jamais.
Thomas: Jamais. Il n'y a pas si longtemps que ça, je disais à Natan: «C'est dingue tout ce qu'on peut faire, et de pouvoir le faire ensemble.» Le faire entre frères, c'est cool.
Quel est votre premier souvenir de l'autre? Que ce soit sportivement ou autre.
Natan: Mon premier souvenir? Ouah, c'est impossible de répondre à cette question. Peut-être quand lui a commencé le basket en 2008. Moi, je faisais encore du foot à cette époque. Je ne voulais plus en faire et le fait qu'il ait poussé ce sport, je me suis dit que j'allais aussi faire le pas. J'ai commencé le basket un peu grâce à lui.
Thomas: C'est dur comme question… Sportivement, je pense que c'était l'été où on allait faire des tournois de volley avec nos parents. On avait fait un tournoi aux Côtes-d'Armor, dans le nord de la France. C'était drôle et ce sont de bons souvenirs.
Du football, du volley… Et finalement, vous êtes tous les deux basketteurs professionnels.
Thomas: Je faisais du football. A l'école primaire, il y avait des gens dans ma classe qui jouaient au basket. A la récréation, tout le monde jouait au football – sauf eux. Je les ai suivis et c'est eux qui m'ont lancé là-dedans. J'ai continué… et je suis toujours là.
Natan, tu voulais le concurrencer quand tu as vu qu'il commençait le basket?
Natan: Non, c'était pas le premier but… (sourire) Mais c'est vite arrivé. On est des compétiteurs, et c'est pour ça qu'on a réussi. On joue les deux dans des excellentes équipes, on se retrouve souvent en play-off et ça va continuer pendant quelque temps je pense.
D'accord, vous êtes des compétiteurs. Mais vous préférez jouer ensemble ou contre?
Thomas: Je préfère jouer contre lui en 5 contre 5 et avec lui en 3 contre 3. En 5 contre 5, c'est le premier à être arrivé au haut niveau et j'ai toujours envie de le battre. Tandis que le 3x3, on l'a commencé ensemble.
Natan: Tout pareil. Pour moi, c'est le meilleur défenseur en Suisse et – comme on joue dans la même position –, on se défend. C'est intéressant de tester son niveau contre lui.
Les jours de match, vous vous charriez parmessage?
Natan: Par stories Instagram interposées… Mais c'est toujours du second degré.
Thomas: On est très proches, on s'appelle souvent. On sait ce que l'autre et son équipe vaut. On est tellement conscient des forces et des faiblesses de l'autre que le trash-talk n'a plus vraiment d'effet.
C'est un avantage ou un désavantage de connaître autant l'autre?
Thomas: C'est un désavantage.
Natan (en même temps): C'est un avantage.
Thomas: Attends, tu as dit que c'était un avantage?
Natan: Ça nous force à être plus forts. Il faut contourner l'autre, tester des trucs nouveaux et ça nous fait progresser.
Thomas: Je pense plutôt que c'est un désavantage car il est très très fort. A chaque fois que je me défends sur lui, je me dis «rah, fait ch*er» (rires). Mais c'est aussi un avantage car je sais ce qu'il fait bien et ce à quoi je dois faire attention quand il joue.
Pendant le match, vous arrivez à vous dire que c'est un adversaire comme un autre? Vous aurez peut-être moins tendance à mettre des coups?
Natan: Je mets des coups de coude à n'importe qui – à mon frère aussi. Il n'y a aucun traitement de faveur ou de défaveur.
Thomas: Je suis même plus content quand mon frère reçoit des coups.
Vous jouez deux fois ensemble durant votre carrière professionnelle. D'abord, en 2018-19 à Fribourg Olympic. Qu'est-ce que ça fait pour vous, deux Fribourgeois, d'arriver dans le club phare du canton, voire de Suisse?
Thomas: Cette année-là, c'était fou car on jouait en Champions League. On voyageait ensemble.
Natan: On était toujours dans la même chambre. En Champions League, il avait le meilleur ratio de points par minute car à chaque fois qu'il rentrait en fin de match, il marquait un panier.
A part la Champions League, vous retenez quoi de cette expérience sur le même banc?
Thomas: Je me souviens qu'on avait une équipe de dingue.
Quand il y a des Olympic - Genève, qui est-ce que vos parents soutiennent?
Natan: En fait, je suis le préféré. Donc ils encouragent Fribourg (sourire).
Thomas: On a grandi à Fribourg. Toute ma jeunesse, on m'a dit que Genève était les méchants et Fribourg les gentils. Quand je suis arrivé au bout du Léman, nos parents m'ont dit qu'ils soutenaient les deux. Je sais que quand je suis sur le terrain, ils encouragent peut-être les deux. Mais quand je suis sur le banc, ils sont un peu plus pour Fribourg.
Ça te va comme ça?
Thomas: Moi je veux surtout gagner. Et si on l'emporte, je sais qu'ils sont contents pour moi.
Les frères Jurkovitz qui rejouent ensemble en 5 contre 5, c'est quelque chose qui vous fait rêver?
Thomas: J'espère qu'un jour on pourra jouer ensemble et gagner des titres.
Natan: Pareil.