Les premiers claquements des carreaux n'ont pas attendu 9h mercredi matin à Martigny. Espagnols, Tchèques, Français: tous répètent leurs gammes avant le coup de départ des Championnats d'Europe. Un peu sur le côté, Sylviane Métairon, a son jeu de boules en mains.
Des passionnés, suisses mais pas que, l'arrêtent régulièrement pour la saluer. Pour cause: le palmarès de la Fribourgeoise est impressionnant. Championne du monde et championne de Suisse. Cette semaine, la laborantine espère bien y ajouter une ligne avec un titre européen: soit en tête-à-tête, soit en tête doublette.
Dans cette dernière catégorie, elle évoluera avec Ludivine Maitre Wicki. Comme les joueuses de football de la Nati, les deux boulistes, qui jouent séparément à l'année, se sont retrouvées plusieurs fois avant de défendre le drapeau pour entraîner les automatismes. Petite variante par rapport aux stars du foot: À la question des ambitions pour le tournoi, Sylviane Métairon troque le traditionnel «on verra match après match» pour un «il faut jouer boule après boule».
La Suisse à table avec les grands
Malgré un titre de championne du monde remporté en 2022 au Danemark, la Fribourgeoise n'est pas exempte de stress. Au contraire: «Être championne du monde, ça rajoute peut-être une pression qui vient de l'extérieur. Les gens attendent beaucoup de toi, alors que, tu as juste été la meilleure un jour à un endroit durant un instant T.»
D'autant plus que la concurrence est rude. En Suisse, les quelques milliers de licenciés doivent batailler avec des nations bien plus grandes comme l'Espagne ou la France. Cette dernière compte plusieurs centaines de milliers de boulistes. Mais avec une championne du monde à sa tête, la Suisse, petite grande nation européenne, n'a pas à rougir.
La pétanque, histoire de famille
Il y a la mère, reine de la pétanque en 2022. Il y a le père, du sud-ouest de la France. Et il y a la fille, Emilie. «Quand elle a eu 13 ans, elle m'a dit: 'Maman, j'aimerais bien jouer, prendre la licence. Ça serait bien que tu prennes la licence avec moi. Comme ça, on pourra jouer toutes les deux', explique Sylviane Métairon. On a fait un tournoi et on a gagné.»
La mère et la fille ont pris leur licence en 2013. Des amicales de pétanques aux grands tournois, Émilie Métairon est aujourd'hui double championne de Suisse. «C'est vraiment un guide pour moi… (pause) un énorme soutien mental aussi», précise la mère de famille.
Son mari Frédérick n'est pas en reste, même si les temps se sont compliqués pour lui. «Ça a été mon sparring-partner pendant toutes ces années. Quand j'ai commencé la pétanque, on a fait un terrain chez nous à Promasens. Au début, il jouait de la main gauche contre moi pour que je le batte.»
Un sport qui ne fait pas (assez) rêver
Être bouliste dans l'équipe nationale de Suisse demande beaucoup d'engagement personnel. Si la fédération prend en charge certains frais, le soutien pour la pétanque en Suisse reste marginal. «Va demander un congé à ton employeur pour un tournoi de pétanque à l'autre bout du monde. Les gens t'imaginent un verre de pastis à la main.»
Une vision un peu réductrice qui ne décourage pas la Fribourgeoise de vivre pleinement sa passion du bouchon. «C'est un sport tellement intense. Vraiment psychologique. Des fois, t'as le palpitant qui est à 150.»
Une excitation qui explique peut-être la popularité de la pétanque dont parle Stéphane Blanchet, président de l'association valaisanne des clubs de pétanque «La pétanque, c'est comme le 'fôte'. Tout le monde en a joué.» Celui qui vient de Sembrancher précise sa pensée: «Je n'ai jamais rencontré quelqu'un qui n'a pas une fois dans sa vie tenu une boule de pétanque dans les mains. Jamais.» Et ce n'est pas cette fin de semaine à Martigny que Stéphane Blanchet risque de rencontrer quelqu'un qui est dans ce cas.