«Je suis obligé de garder les bras en bas, sinon j'ai mal. C'est une cata.» Les cernes sont aussi bien présents sous les yeux de Ludovic Vuissoz. «Et encore, je viens de passer 30 minutes à dormir sur un banc, donc ça va mieux. Mais ça va durer quelques jours.» Le Valaisan a fait partie des 1139 courageux qui se sont jetés dans le bassin de la Vaudoise aréna ce week-end, dans le cadre des 24 Heures de natation de Lausanne.
Sur une journée complète, de 14h le samedi à 14h le dimanche, un maximum de nageurs tentent de réaliser le plus grand nombre de traversées. Pour chaque kilomètre nagé, le Lausanne Aquatique reverse un franc en faveur de Léman Hope, une association qui soutient les jeunes en rémission du cancer. Au total pour cette 39e édition, les participants ont rapporté 3200 CHF à Léman Hope.
Deux hernies discales dans sa jeunesse
Ce week-end, Ludovic Vuissoz est donc celui qui a rapporté le plus d'argent à l'association – 56 CHF. Une distance que le Valaisan a parcourue durant 22h30. Pourquoi pas 24 heures? «À ce moment, j'ai appris que la personne juste derrière moi s'était arrêtée, explique-t-il deux heures après être sorti de l'eau. Je me suis alors demandé ce que je devais faire… Comme j'ai des amis et des proches qui sont là, je me suis dit: 'Allons plutôt manger au resto.'» Le nageur de 48 ans, qui n'en est pas à son coup d'essai lors d'une telle manifestation, sait que les deux dernières heures sont les plus difficiles.
Car, déjà vainqueur l'an dernier, le Sierrois d'origine est un habitué de ce format des 24 Heures de natation. Il y participe également à Sion, ville dans laquelle il réside. Mais pourquoi s'inflige-t-il cela? Avant d'y répondre, il faut revenir un peu en arrière. Jeune, Ludovic Vuissoz a pratiqué de nombreux sports: équitation, tennis, hockey, etc. Sauf qu'il contracte deux hernies discales, doit être opéré, et la natation devient l'un des rares sports qu'il peut pratiquer sans douleur. Il se lance à fond là-dedans et nage environ 200 à 250 fois par année, entre 45 et 60 minutes.
La motivation d'un ami décédé
Il tombe dans la marmite et se prend au jeu. Au niveau de la technique, pour tenir aussi longtemps, Ludovic Vuissoz utilise très peu ses jambes – «qui servent plutôt de stabilisateur». Ses bras sont donc forcément douloureux après 22h30 d'effort. Mais ce n'est (presque) pas là que ça importe. «Il n'y a que le côté mental qui entre en jeu», souligne le Valaisan.
À quoi pense-t-il donc lors de sa performance? «Je me demande bien trop souvent ce que je fous là», rigole-t-il. Mais pour se booster, il peut compter sur le soutien de sa famille – qui vient l'encourager et même participer avec lui – comme ses deux enfants ce week-end, Nola (11 ans) et Chris (9 ans). Pour cette édition, Ludovic Vuissoz avait une motivation supplémentaire: «J'ai perdu un ami qui venait tout le temps avec moi, nous confie-t-il. Quand ça n'allait pas trop, je pensais à lui.»
Mais au final, pourquoi donc prendre part à ce genre d'effort? «C'est un cadeau que je m'offre, explique-t-il. C'est un truc incroyable et ce sont des souvenirs qui vont rester pour la vie», répond le nageur valaisan.
«Vous êtes sûr?»
Ce qui est assez cocasse, c'est que si vous croisez Ludovic Vuissoz dans les rues de Sion, vous ne penserez pas forcément que c'est un incroyable athlète, lui qui «a du ventre» comme il le dit. Mais il en rigole et nous raconte une anecdote qui fait sourire et qui se déroule lors de sa première participation aux 24 Heures de Lausanne. «Lorsque j'ai dit à la bénévole que je voulais nager dans la ligne des meilleures, elle m'a regardé de haut en bas et m'a demandé si j'étais sûr de moi», se marre-t-il.
D'ailleurs, il pense que son physique l'aide dans ses exploits, grâce à ses «réserves» comme il les appelle. Dans une eau qui tend à se refroidir pour son corps (mais pas sur le thermomètre) au fil des heures, tout est bon à prendre.
Puis, après sa performance, Ludovic Vuissoz peut enfin aller profiter avec sa famille. Sa femme, Stéphanie, est toujours soulagée de le voir sortir du bassin. «Elle a toujours l'impression que je vais mourir», sourit le Valaisan. Après cet effort, c'est surtout de fatigue qu'il risque de s'écrouler. Mais à la suite d'une bonne nuit de sommeil et de «quelques massages aux épaules», Ludovic Vuissoz pourra retourner à sa vie normale. Toujours proche d'une piscine, par contre.