De la fiction à la guerre
Comment ces 5 séries ont anticipé la menace russe

Cela fait près d’un mois que la Russie a lancé une offensive sur l’Ukraine, mais bien plus longtemps que les relations entre Moscou et l’Occident se détériorent. Blick vous conseille cinq séries qui ont abordé ce sujet de manières très différentes.
Publié: 22.03.2022 à 16:43 heures
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Dernière mise à jour: 23.03.2022 à 10:50 heures
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Les deux dernières saisons de la série «Le Bureau des Légendes» se déroulent en Russie.
Photo: canal +
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Margaux BaralonJournaliste Blick

Il semblait loin, le temps où la guerre froide façonnait les fictions, avec par exemple un James Bond constamment occupé à défaire les plans machiavéliques d’agents russes. Pourtant, Moscou est redevenue, depuis une petite dizaine d’années, le grand méchant de nombreuses séries. Voici une petite sélection de cinq d’entre elles qui ont parlé du refroidissement considérable des relations entre la Russie et l’Occident… voire anticipé une invasion.

«Occupied» (Netflix, Prime Video et Arte)

En Norvège, le Premier ministre Jesper Bert est un écologiste convaincu. Alors qu’une grave crise énergétique touche l’Union européenne, il décide de stopper l’extraction et l’exportation de pétrole pour se concentrer sur les énergies renouvelables. Aux abois, la commission européenne donne alors sa bénédiction à la Russie pour qu’elle enlève Jesper Bert et prenne le contrôle des gisements norvégiens.

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Si le scénario d’«Occupied» pouvait paraître abracadabrantesque lors de la sortie de la première saison, en 2015, il possédait en réalité déjà de nombreux éléments passionnants. Au-delà de la dépendance énergétique de l’Union européenne, question récurrente en cas de conflit avec Moscou, la série imaginait une invasion insidieuse de la Russie, économique avant d’être politique, sans char ni bruits de bottes. Celle-ci était largement rendue possible par les divisions au sein de l’UE. La situation est aujourd’hui bien différente en Ukraine mais on retrouve cette difficulté, pour l’organisation internationale, à parler d’une seule voix. Et toujours cette volonté, du côté de Moscou, d’étendre sa sphère d’influence.

«Years and years» (Canal +)

En 2019, la sortie de la série britannique «Years and years» provoquait un petit séisme: cette dystopie imaginait à quoi ressemblerait le monde dans les 15 années à venir par le prisme des Lyons, une famille vivant à Londres. Entre catastrophe climatique, avancées technologiques effrayantes, transhumanisme, krach boursier et montée de l’extrême droite au pouvoir, le tableau faisait plutôt peur. Et la série imaginait aussi une Ukraine tombée aux mains de la Russie.

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Dans «Years and years», comme dans «Occupied», l’invasion est pourtant plus insidieuse que ce qui s’est passé le 24 février dernier. La série britannique raconte que ce sont d’abord des pro-russes qui prennent le pouvoir à Kiev, avant d’inviter Moscou à déployer son armée dans le pays. Un référendum vraisemblablement truqué est organisé, durant lequel 97% des Ukrainiens choisissent de prendre la nationalité russe, tandis que les 3% restants sont traqués et cherchent à fuir. De nouvelles lois russes sont adoptées, notamment pour criminaliser l’homosexualité. La série met ensuite en scène une arrivée massive de réfugiés dans des conditions terribles jusqu’en Angleterre. Des images troublantes aujourd’hui tant la réalité a rejoint la fiction.

«Vigil» (Arte)

Les séries britanniques aiment faire de la Russie l’antagoniste de leurs récits. C’est de nouveau le cas avec «Vigil», fiction produite par la BBC et très réussie, sortie au début de l’année. On y suit Amy Silva, enquêtrice écossaise envoyée en mission dans un sous-marin nucléaire. Un militaire y a été retrouvé mort et la cause accidentelle est rapidement écartée. Voilà la quadragénaire obligée de composer avec un monde d’hommes et sa propre claustrophobie dans un submersible.

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Captivante, la série parvient à mener tambour battant une enquête aux allures de Cluedo tout en questionnant la géopolitique européenne actuelle. Peu à peu, le meurtre du sous-marinier révèle des tensions avec Moscou, qui n’hésite pas à envoyer ses espions au nez et à la barbe du MI5 pour infiltrer les milieux anti-nucléaire et affaiblir la défense britannique.

«Le Bureau des Légendes» (Canal +)

Série acclamée dans le monde entier, «Le Bureau des Légendes» a multiplié les terrains de jeu au fil de ses 5 saisons, de l’Iran à la Syrie en passant par l’Egypte. Mais les aventures de Guillaume Debailly, agent des services secrets français (DGSE) habitué à agir sous couverture, se sont principalement déroulées en Russie dans les deux dernières saisons. L’espion, incarné à l’écran par Mathieu Kassovitz, est en effet recruté par les services secrets russes (FSB) tandis que son ex-collègue Marina Loiseau est chargée par la DGSE d’infiltrer des hackers moscovites.

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Créée par Éric Rochant, «Le Bureau des Légendes» s’est toujours solidement ancrée dans la géopolitique contemporaine. Les saisons 4 et 5 de la série, diffusées respectivement en 2018 et 2020, sont intervenues après l’empoisonnement de l’ancien espion russe Sergueï Skripal, mais surtout les soupçons d’ingérence de la Russie dans l’élection américaine afin de pousser l’élection de Donald Trump. Et c’est précisément lorsqu’elle se penche sur cette guerre invisible menée par ordinateurs interposés que la série est la plus intéressante.

«Les Simpsons» (Disney +)

Les fans des Simpsons le savent, la série est la première à imaginer des situations qui, ensuite, se produisent bel et bien. C’est (presque) le cas dans la neuvième saison, diffusée entre 1997 et 1998. Dans l’épisode 19, Homer Simpson s’engage dans la réserve de la Marine américaine et, fidèle à sa maladresse légendaire, envoie une torpille par erreur puis emmène le sous-marin sur lequel il officie dans les eaux russes. Une crise internationale éclate alors.

Lors d’une séquence absurde à l’ONU, l’ambassadeur russe révèle qu’en réalité, l’URSS est de retour. À Moscou, une parade de carnaval se mue soudain en défilé militaire, des tanks sortent des chars colorés et filent jusqu’à Berlin, qui retrouve son mur. Point d’orgue de cette scène burlesque: Lénine ressuscité s’échappe de son cercueil en promettant d’écraser le capitalisme. Le curseur est évidemment poussé très loin, mais les Simpsons ont toujours l’art de dissimuler sous les rires un propos politique.

Bonus: «Drive to survive» (Netflix)

Ce n’est ni une fiction ni une série qui dépeint la menace militaire russe, mais la dernière saison de «Drive to survive», feuilleton documentaire sur la Formule 1, réserve un quatrième épisode assez fascinant sur l’influence de Moscou jusque dans le monde du sport. On y voit en effet Dmitry Mazepin, oligarque qui a fait fortune dans l’engrais via son groupe Uralchem, actionnaire principal de l’entreprise Uralkali. Or, Uralkali est devenue l’an dernier le principal sponsor de l’écurie américaine Haas, au bord de la faillite. En échange de son soutien financier, Dmitry Mazepin a imposé son fils, Nikita Mazepin, comme pilote.

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Une mainmise financière que la série documente très bien. Dmitry Mazepin se montre interventionniste, allant jusqu’à imposer les couleurs bleu, blanc et rouge de la Russie sur la carrosserie du nouveau bolide de Haas. Alors que Nikita réalise un très mauvais début de saison, son père va jusqu’à menacer l’écurie de retirer son soutien financier si elle ne fournit pas une meilleure voiture à son fils. Cette guerre d’influence est d’autant plus intéressante à voir maintenant qu’après l’invasion russe en Ukraine, le contrat de Nikita Mazepin a été rompu par Haas. Lui et son père, très proche de Vladimir Poutine, ont été placés sur la liste noire de l’Union européenne et leurs avoirs ont été gelés.

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