Avis à tous ceux qui, en Suisse comme en France, continuent de ménager la Russie et de soutenir que Vladimir Poutine n’est pas le seul responsable de la guerre en Ukraine: libre à vous de continuer à soutenir le Kremlin, mais ayez le courage d’utiliser les mots justes pour désigner ce qui vient de se passer en Russie.
Réélu avec 87,3% des suffrages à l’issue de trois jours de vote encadrés, verrouillés, sans aucune campagne électorale digne de ce nom et sans opposition crédible, le président russe n’a pas remporté cette victoire dans une démocratie autoritaire. Il ne l’a obtenu qu’à force de répression, de verrouillage des médias, de propagande intensive et d’élimination physique de tous les opposants capables de drainer derrière eux un public, comme l'a prouvé la disparition récente d'Alexeï Navalny. Or cela porte un nom: une dictature. Quelles que soient les images des bureaux de vote et des électeurs présents devant les urnes…
Refaire l’histoire
Vous pouvez, je l’écris à nouveau, soutenir que Poutine est l’homme dont la Russie a besoin. Libre à vous, aussi, de continuer à nous expliquer que l’Ukraine agressée est loin d’être ce pays bien plus libre que son immense voisin. Continuez de refaire l’histoire en vous appuyant sur tel ou tel point pour démontrer que la Russie est dans son bon droit en annexant les territoires d’un pays aux frontières internationales reconnues et que les crimes de guerre commis par ses troupes ne sont que des accidents, voire des manipulations médiatiques.
Une élection Potemkine
Oui, continuez! Notre État de droit vous le permet. Mais cessez de salir le seul mot qui justifie de soutenir le combat de l’Ukraine car les valeurs européennes y sont défiées: Démocratie. Ce qui vient de se dérouler n’est pas une soi-disant «démocratie autoritaire». C’est une élection Potemkine. Un simulacre. Ces 87,3% de Vladimir Poutine sont d’abord humiliants pour tous ceux qui, en Russie, espéraient ces dernières années respirer davantage l’air de la liberté.
Beaucoup de pays dans le monde connaissent des élections du même type. Et cela n’empêche pas les Occidentaux - à commencer par la Suisse protégée par sa neutralité - de commercer avec eux, ou de reconnaître leurs dirigeants qui ont même, parfois, du sang sur les mains. Soit. Posons donc les faits après cette mascarade: Vladimir Poutine est le président réélu de la Russie. Il reste à la fois une menace redoutable et un interlocuteur incontournable pour nos pays européens. Peut-être est-ce même avec lui qu’un jour, des négociations de paix devront être initiées.
Triste comédie électorale
Restent les mots, les images et la vérité des faits. Cette triste comédie électorale montre que l’ancien espion du KGB, patron d’un régime dont les services de sécurité sont le cœur névralgique, n’est en rien crédible pour donner des leçons aux pays libres que nous sommes, dans lesquels chacun peut exprimer son opinion et assumer sa différence, même radicale.
Ceux qui soutiennent encore le maitre plébiscité du Kremlin devraient, dès lors, avoir au moins le courage et l’honnêteté de reconnaître publiquement que si un tel homme prenait, demain, le contrôle de nos démocraties, il n’en resterait rien.
Rien d’autre que le droit de le réélire à 87,3%.