Propos antivax du Dr Saegesser
«Le comité soumettra cette situation à sa commission de déontologie»

Après s'être dédouanné sur Twitter des thèses antivax du Dr Philippe Saegesser, le Dr Philippe Eggimann, président de la Société vaudoise de médecine, réagit fermement auprès de Blick. Les propos incriminés ne resteront pas sans conséquence, assure-t-il.
Publié: 25.08.2021 à 17:28 heures
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Dernière mise à jour: 26.08.2021 à 17:25 heures
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Antoine HürlimannResponsable du pôle News et Enquêtes

Les thèses antivax tenues par le Dr Saegesser à l’occasion d’une discussion filmée réunissant différentes figures de la complosphère francophone ont ulcéré des professionnels de la santé. Parmi eux, le pharmacien Steve Claude. Ce dernier lutte activement contre la désinformation scientifique sur les réseaux sociaux. Ce Jurassien estimait que la prise de position de la Société vaudoise de médecine (SVM), publiée lundi sur Twitter, n’était pas suffisante.

L’association des médecins vaudois s’était en effet distancée des propos du Dr Saegesser en assurant qu’ils n’engageaient que lui. Et de rappeler que la SVM s’était prononcée à plusieurs reprises en faveur du vaccin et «a activement contribué à l’effort collectif lié à la campagne de vaccination vaudoise». Le président de l’association, le Dr Philippe Eggimann, va désormais plus loin. Il assure à Blick que le comité de la SVM soumettra «cette situation» à sa commission de déontologie.

Toujours au comité de la SVM

Le président confirme par ailleurs que le Dr Saegesser, spécialiste en anesthésie, siège encore «pour quelques mois au sein de notre comité en tant que représentant des médecins salariés des hôpitaux régionaux vaudois, dont il est un récent retraité». Il n’a donc pas vécu la crise sanitaire de l’intérieur de l’hôpital et n’a pas été confronté à la rudesse de la prise en charge de patients Covid, ayant quitté ses fonctions peu avant, poursuit le Dr Philippe Eggimann. «Cela influence probablement son appréciation de la situation et cela aurait dû encore plus l’inciter à la réserve, et reconnaître plutôt l’implication exemplaire, je devrais dire l’abnégation, de ses collègues tant hospitaliers qu’installés. Nous regrettons beaucoup cette rupture de collégialité qu’il a décidé d’afficher.»

La SVM dit déplorer les propos de son collègue «autant sur le fond que sur la forme». En outre, le Dr Philippe Eggimann partage la position de Steve Claude, qui estimait que les thèses du Dr Saegesser sont hautement problématiques puisque sa fonction au sein de l’association des médecins vaudois «accrédite des thèses scientifiquement infondées». «Il y a déjà eu environ 1000 morts du Covid rien que dans le canton de Vaud depuis le début de la pandémie, soit en moyenne environ deux par jour, rappelle-t-il. Avec une surmortalité établie, que le Dr Saegesser refuse d’admettre. Et des décès en Suisse dans toutes les catégories d’âge, même si effectivement beaucoup plus nombreux chez les personnes âgées, qui pratiquement toutes auraient encore pu vivre plusieurs années.»

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Sans parler des complications de type Covid-long, dont on commence à peine à prendre la mesure, insiste le président de la SVM. «On ne peut plus banaliser. A ce jour, la vaccination massive de la population représente à long terme la seule chance de retour à la normalité, à moyen terme de lutte contre des mutations du virus encore plus dangereuses et à court terme de protection des plus fragiles de notre société, sans parler de son économie et de notre mode de vie.» Il rebondit: «Les mesures que nous risquons de subir très prochainement en raison de la 4e vague, celle des non vaccinés, risquent malheureusement très rapidement de nous le rappeler.»

Le Dr Eggimann répond aux allégations du Dr Saegesser

En plus de cette prise de position officielle, le président de la SVM Philippe Eggimann répond point par point aux propos incriminés du Dr. Philippe Saegesser.

Ça fait depuis une année, une année et demie, que je m’interroge beaucoup sur la manière dont cette crise a été traitée et surtout l’absence de bon sens et le déni des valeurs sur lesquelles se base l’exercice de la médecine et de la science.

C’est au contraire le bon sens, le maintien au premier plan des valeurs humanistes et l’évolution des connaissances scientifiques, avec la compréhension des mécanismes de l’infection et de sa propagation et désormais la disposition de vaccins d’une efficacité inégalée à ce jour, qui ont permis déjà de préserver des millions de vies à travers le monde!

Je me suis aussi beaucoup interrogé à l’égard de mes collègues puisque j’ai encore gardé un lien avec un collectif médical qui s’appelle la société vaudoise de médecine qui regroupe 2500 médecins qui travaillent dans le canton de Vaud où j’habite et j’ai été extrêmement choqué par la manière dont le corps médical avait traité des problématiques éthiques. Et c’est vrai que tout de suite, quand on a été confronté à cette crise, on a eu une réquisition de l’hydroxychloroquine par le médecin cantonal, ce qui était totalement inhabituel. D’un jour à l’autre, on a empêché les médecins de prescrire. Fait qui était totalement inconnu avant.

[Après avoir précisé que la SVM comptait 3800 membres et non pas 2500] La liberté thérapeutique (donc de prescription) est effectivement un point très important de la relation médecin-patient à laquelle la SVM est aussi attachée que le Dr Saegesser. Mais l’interdiction temporaire d’en prescrire ne visait qu’à garder des stocks suffisants pour sauver des vies, à l’heure où l’on pensait encore que cette molécule pouvait être efficace et pour traiter les patients qui en reçoivent pour d’autres indications. Dès le 18 juin 2020, les médecins retrouvaient leur entière liberté de prescrire de l’hydrochloroquine. Cette information avait été transmise au corps médical en lui précisant toutefois, qu’en l’absence d’incitation reconnue dans la prévention ou le traitement du Covid-19, les prescripteurs devaient en assumer, comme pour tout autre traitement et/ou prescription, la pleine responsabilité au plan civil et pénal.

Comme vous le savez, l’inefficacité de la Chloroquine a clairement été établie. J’observe que notre collègue a également demandé que le corps médical privilégie ensuite l’utilisation d’ivermectine (démontrée inefficace), puis le zinc et la vitamine D et qu’enfin, on mette l’accent sur de développement de traitements efficaces plutôt que des vaccins pour la prévention. Je m’interroge encore sur la pertinence tant éthique que scientifique de cette démarche.

En ce qui concerne la vaccinologie, on est dans un délire total puisque notamment en ce qui concerne les enfants on est dans un rapport bénéfice risque qui est clairement en défaveur du vaccin. Il ne faut surtout pas faire les vaccins chez les enfants puisqu’ils prennent plus de risques à être vaccinés qu’à attraper la maladie elle-même donc on est dans une folie totale en ce qui concerne la vaccination des jeunes.

Je constate que les faits établis au sujet du développement et de l’efficacité des vaccins contredisent totalement les allégations du Dr Saegesser. Concernant les risques vaccinaux chez les enfants, son affirmation est clairement fausse et mérite un démenti formel. C’est d’ailleurs ce que vient de faire la commission fédérale de vaccination en recommandant d’élargir la vaccination des 12-15 ans sans délai. Elle s’appuie sur une analyse rigoureuse des données disponible qui rejoint celle d’autres groupes d’experts ou agences de régulations au plan tant national qu’international.

Je voulais revenir sur des éléments qui m’ont beaucoup troublé au début de cette crise puisque j’interagissais avec un collectif de médecins qui malheureusement est extrêmement aréactif encore aujourd’hui. Ils ont vraiment beaucoup de peine à avoir un esprit critique vis-à-vis du narratif officiel pour lequel ils gardent un cap absolument déraisonnable.

Avec mes collègues du comité, nous revendiquons fièrement l’absence de réactivité face à la diffusion de contre-vérités de la part de notre collègue. Ces positions relèvent de convictions mystiques non fondées sur une analyse objective et rigoureuse des faits que nous ne partageons pas.

[À propos des études randomisées en double aveugle] On sait malheureusement qu’une bonne partie de ces articles scientifiques sont soumis à la pression notamment des lobbys pharmaceutiques qui financent et on sait qu’il y a une forme de corruption vis-à-vis de cette certitude.

Ces allégations reposent sur la généralisation de quelques exemples connus. Cette vision est problématique en ce qu’elle remet en cause les gigantesques progrès de la médecine réalisés au cours des dernières décennies et qu’elle conduit le Dr Saegesser à lui tourner formellement le dos en incitant d’autres à le faire.

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