Les Chinois vont-ils revenir un jour? C'est la question qui taraude les sites touristiques suisses. Pour les chemins de fer de la Jungfrau, par exemple, le nombre de touristes chinois est encore loin des chiffres d'avant la pandémie.
Malgré la force de la marque «Jungfrau» en Chine et de nombreuses activités spéciales, seuls 25% des touristes chinois sont revenus – si l'on se base sur l'année 2019. Cette année, le chemin de fer de la Jungfrau espère atteindre 50 à 60% des valeurs enregistrées en 2019.
De même, à Lucerne, le nombre de visiteurs chinois en 2023 était toujours inférieur de 70% à celui de 2019. En 2024, il devrait être de 65%. «Nous nous attendons à ce que le marché chinois continue à se redresser», déclare-t-on avec un optimisme prudent.
Selon Suisse Tourisme, les visiteurs chinois ont généré l'année dernière un total de 817'000 nuitées dans notre pays. Une baisse de 55,8% par rapport à 2019. A partir de 2025, les anciens chiffres devraient être à nouveau atteints, espère-t-on. Pour l'expert chinois Yong Chen, professeur à l'Ecole hôtelière de Lausanne, un rétablissement complet au niveau d'avant Covid est toutefois loin d'être certain.
Les voyages domestiques sont privilégiés
«En raison du ralentissement de l'économie chinoise, le revenu et la confiance des consommateurs chinois restent à leur niveau le plus bas depuis des décennies, ce qui les empêche de dépenser», explique Yong Chen. A cela s'ajoute le fait que le tourisme chinois à l'étranger a été le plus grand moteur du déficit commercial chinois dans le secteur des services entre 2010 et 2020. En 2019, celui-ci s'élevait à 250 milliards de dollars. En fait, si les touristes dépensaient leur argent à l'intérieur de la Chine, cela augmenterait le PIB du pays.
Le gouvernement chinois ayant pour priorité de promouvoir l'économie, la réglementation du tourisme étranger est donc une option mise en avant. C'est ainsi que la Chine encourage actuellement sa propre population à voyager dans son pays. «Je pense qu'une régionalisation du tourisme chinois est en cours. En fait, davantage de Chinois voyagent dans la région Asie-Pacifique en plus de leurs voyages domestiques», explique Yong Chen.
Parallèlement, le pays s'ouvre de plus en plus aux touristes étrangers. Depuis quelques jours, il est également possible pour les Suisses d'entrer en Chine sans visa pour un séjour allant jusqu'à 15 jours.
Des voyageurs individuels au lieu de groupes?
Autrefois, les Chinois voyageaient en grands groupes. Cette activité devrait fondamentalement changer: «Les voyageurs indépendants pourraient remplacer les groupes de touristes de masse», estime l'expert. Cela s'explique par le fait que les voyages longue distance vers l'Europe ou l'Amérique du Nord, qui restent nettement plus chers qu'avant Covid, ne sont accessibles qu'aux touristes aisés.
Yong Chen pense toutefois que le tourisme chinois à l'étranger aurait atteint un plafond vers 2020, même si le Covid n'était pas survenu: «Cela était dû en grande partie au ralentissement de l'économie chinoise et peut-être aussi à des changements de la structure sociodémographique en Chine, comme le vieillissement de la population.»
Un pouvoir d'achat chinois élevé
Les Chinois représentaient à peine 4% de tous les touristes étrangers dans notre pays lors de l'année record de 2019. Pourquoi sont-ils malgré tout si importants? Parce qu'ils apportent un fort pouvoir d'achat: «Le shopping était l'activité de voyage prédominante des touristes chinois dans les pays développés», explique Yong Chen. Avant la pandémie, les touristes chinois dépensaient en moyenne environ 1800 dollars US par personne sur leur lieu de destination, et bien plus encore en Suisse. La moyenne mondiale, indépendamment du pays d'origine, est de 1000 dollars américains.
En Suisse, l'industrie horlogère (de luxe), ainsi que de nombreux hôtels, restaurants, attractions, prestataires de services de transport et autres en ont profité.