Il a maté Prigojine mais...
Les rebelles de Wagner ont ouvert une brèche dans le système Poutine

Le président russe ne pensait sans doute pas pouvoir être défié par son ex-compagnon Evguéni Prigojine. Plus grave pour le maître du Kremlin: l'histoire n'est sans doute pas terminée.
Publié: 27.06.2023 à 08:35 heures
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Evguéni Prigojine, chef du groupe Wagner, a rendu public une intervention de onze minutes ce lundi 26 juin.
Photo: DUKAS
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Richard WerlyJournaliste Blick

Une brèche s’est ouverte ce week-end dans le système Poutine. Laquelle? Difficile à dire. Mais plus personne ne peut contester que le pouvoir russe a été ébranlé par la chevauchée vers Moscou des miliciens Wagner.

En remerciant lundi dans un discours nocturne de six minutes les commandants de l’unité mercenaire pour avoir fait volte-face et regagné leurs bases, Vladimir Poutine a acté l’essentiel. Son ex-compagnon et cuisinier Evguéni Prigojine l’a bel et bien défié devant le monde entier. Des mercenaires russes ont abattu des hélicoptères russes.

Impossible d’imaginer pire humiliation pour l’ancien colonel du KGB, dont toute la carrière a consisté à laver l’affront subi par son ancien pays: l’Union soviétique.

Le «parrain» d’un système politico-mafieux

Cette brèche n’est, pour l’heure, pas identifiable et pas quantifiable. Vladimir Poutine est toujours le président d’une Russie en guerre, dont les forces résistent farouchement à la contre-offensive ukrainienne.

Il demeure aussi le «parrain» d’un système politico-mafieux qui lui doit tout. Mais comment ne pas voir dans la longue intervention audio d’Evguéni Prigojine un nouveau défi? Le patron de Wagner s’est bien gardé, lundi, de dire où il se trouve. Il a passé son temps à répéter qu’il ne voulait pas faire un putsch, tout en affirmant avoir reçu des garanties du président biélorusse sur l’avenir de son groupe.

A l’évidence, cette confession d’Evguéni Prigojine vise à calmer le jeu, voire à sauver sa peau. Reste que les déclarations des deux hommes sont contradictoires. Poutine, lui, affirme qu’une tentative de déstabilisation a bel et bien eu lieu et que le sang a failli couler. Difficile, dès lors, d’imaginer une accalmie. Et encore moins une réconciliation.

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Le système Poutine n’est pas conçu pour supporter les brèches. Basé sur le seul rapport de force, le pouvoir russe ne peut pas tolérer que perdure, sous une forme ou sous une autre, un embryon de dissidence, surtout armée.

La question est donc simple, après la rébellion avortée de Prigojine: ce dernier, isolé et considéré par beaucoup comme politiquement mort, a-t-il disposé de soutiens dans son entreprise putschiste? La popularité apparente des miliciens Wagner, salués à Rostov-sur-le-Don, signifie-t-elle que le pays est prêt à se livrer à un autre maître que son inamovible chef de l’État?

Un socle du pouvoir fissuré

Le simple fait que ces questions circulent, et que leur réponse ne soit pas immédiatement négative, prouve que le socle du pouvoir poutinien est aujourd’hui fissuré. Le Kremlin n’apparaît plus comme une forteresse imprenable. Une guerre des clans russes ne semble plus inimaginable.

En plein conflit en Ukraine, et alors que la Russie compte toujours plusieurs milliers de têtes nucléaires, cette brèche dans le système Poutine démontre, s’il en était besoin, la conséquence fatale de l’assaut du 24 février 2022 contre Kiev: un an et demi plus tard, la peur est entrée au sommet du pouvoir à Moscou.

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