C’est désormais sur le front du gaz que Vladimir Poutine mène sa bataille contre l’Occident. Cela provoque la crainte d’une grave crise énergétique, notamment en Allemagne. Le chef du Kremlin tenterait-il ainsi de miner le soutien de Berlin à l’Ukraine?
Le groupe gazier russe Gazprom veut réduire davantage les livraisons par le gazoduc Nord Stream 1 en mer Baltique. A partir de mercredi, 20% seulement de la quantité de gaz maximale, c’est-à-dire 33 millions de mètres cubes, s’écouleront chaque jour vers l’Allemagne par le principal gazoduc d’approvisionnement, a fait savoir l’entreprise lundi. Les Russes avancent que des travaux de maintenance d’une autre turbine Siemens sont nécessaires.
Ce n’est que jeudi dernier que les livraisons de gaz ont repris via la principale liaison avec l’Allemagne, après un service de routine qui a duré dix jours.
La prochaine maintenance n’est prévue qu’à l’automne
En juin déjà, Gazprom avait réduit les livraisons via le gazoduc à 40% de la capacité maximale, invoquant l’envoi d’une turbine au Canada pour réparation. Selon «Der Spiegel», Siemens Energy ne peut effectuer les travaux de maintenance qu’au Canada, car les turbines y ont été fabriquées et que c’est là que se trouve le personnel spécialisé. Selon l’entreprise, l’entretien est une opération de routine. Au cours des dix dernières années, il n’y a jamais eu de complications majeures.
Le gouvernement allemand estime que ces manœuvres ne sont qu’un tour de passe-passe du président russe. En effet, aucune maintenance n’était prévue. La prochaine n’est planifiée qu’à l’automne, comme le rapporte «Der Spiegel» en se référant aux directives de Siemens. «Une panne pourrait être compensée techniquement sans qu’il soit nécessaire de réduire les livraisons», affirme le média allemand.
En effet, de grandes quantités de gaz ont pu être livrées par le passé, et ce sans cette turbine. De plus, Gazprom n’a pas fait usage des capacités disponibles sur d’autres routes de gazoducs reliant la Russie à l’Europe, poursuit «Der Spiegel».
La Russie essaie-t-elle de créer un prétexte pour mettre l’Allemagne sous pression? Ces travaux de maintenance semblent en tout cas bien arranger Vladimir Poutine. L'homme fort du Kremlin a déjà annoncé qu’une autre turbine nécessiterait une révision «d’urgence», c’est-à-dire autour de fin juillet.
«C’est une guerre gazière ouverte»
Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, voit dans cette nouvelle réduction des livraisons de gaz russe vers l’Europe un acte de «terreur» dûment planifié par Moscou. «C’est une guerre gazière ouverte que la Russie mène contre l’Europe unie», a-t-il déclaré lundi dans un message vidéo. Au lieu d’envisager la restitution de la turbine à gaz réparée, les sanctions contre la Russie devraient être encore renforcées, avance le président ukrainien.
Les représentants des Etats de l’UE se sont mis d’accord sur un plan d’urgence visant à réduire la consommation de gaz et aider l'Allemagne, très dépendante des approvisionnements venus de l'Est. Il a été officiellement confirmé mardi lors d’une réunion des ministres de l’Energie à Bruxelles. Pour l’instant, l’UE ne peut pas se passer de gaz russe.
(Adaptation par Jessica Chautems, avec ATS)