Si l'on regarde les plateformes de paris, la majorité des joueurs misent sur une victoire de Donald Trump le 5 novembre. Le républicain déborde encore plus de confiance depuis qu'il a définitivement éliminé sa concurrente au sein du parti Nikki Haley de la course à la Maison-Blanche lors du «Super Tuesday». Ses apparitions toujours accompagnées de propos choquants et d'idées populistes impressionnent les Américains, surtout lorsqu'on le compare directement au président sortant Joe Biden, en perte de vitesse.
Les chiffres viennent étayer ces estimations: les sondages de votes en faveur de Trump dépassent depuis des semaines ceux de Biden de 2% et ont atteint début mars 48%. Lors de la campagne électorale d'il y a quatre ans, c'était l'inverse: Biden n'était jamais tombé derrière Trump et avait même pris une avance de 6%. Trump de retour à la Maison-Blanche? Il faut s'attendre à ce scénario.
Dictateur «le premier jour»?
Sa victoire électorale provoquerait un séisme non seulement dans son propre pays, mais aussi dans le monde entier. Jamais un candidat à la présidence américaine ne s'est présenté avec un programme aussi extrême. En raison de la fraude électorale présumée il y a quatre ans, il a carrément appelé à suspendre la Constitution. Et il exige que la Cour suprême donne les pleins pouvoirs au président afin qu'il puisse se débarrasser de ses opposants.
Donald le dictateur? Lui-même s'était déjà exprimé sur le sujet et avait déclaré qu'en cas de victoire électorale, il jouerait au dictateur, au moins «le premier jour». Philipp Adorf, spécialiste des Etats-Unis à l'université de Bonn, le confirme: «Les instruments permettant de limiter les impulsions autocratiques de Trump ont été fortement affaiblis.»
Trump est préparé
Selon Philipp Adorf, Donald Trump aborde un éventuel second mandat, contrairement au premier, avec une stratégie réfléchie. «En 2025, Trump composerait son cabinet avec des personnes qui le soutiendraient pleinement, lui et ses intentions», précise Philipp Adorf. Il prévoit la possibilité de licencier des dizaines de milliers de fonctionnaires fédéraux par le biais d'un décret exécutif et d'accorder ces postes administratifs à des personnes qui garantiraient la mise en œuvre de ses plans. Ses partisans travaillent déjà sur une multitude de décrets exécutifs que l'ancien président pourrait mettre en œuvre dès le premier jour.
Les tribunaux et le Congrès pourraient quand même remettre l'ancien président à sa place. Jusqu'à présent, des juges nommés par Trump lui-même ont toujours tranché contre des plaintes visant son entourage. Mais le républicain se conformerait-il encore, en tant que président, à des jugements qui ne lui conviennent pas? C'est lire dans le marc de café.
Dans un tel cas, les services gouvernementaux correspondants auraient pour mission de mettre en œuvre les décisions de justice. «Mais si Trump équipe l'Etat administratif de personnalités loyales, il est possible que celles-ci fassent également leur possible pour retarder ou même suspendre l'application d'une décision de justice», explique Philipp Adorf.
Au sein du dernier organe de contrôle, le Congrès, il semble que la majorité sera aussi républicaine. A la Chambre des représentants, les républicains partent favoris, selon Philipp Adorf. Au Sénat, le vice-président de Trump pourrait faire pencher la balance en cas d'impasse.
Les députés au garde-à-vous derrière lui
Si pendant le mandat de Trump, les républicains au Congrès avaient formé une sorte d'opposition, notamment sur les questions de politique étrangère, la situation a entre-temps changé. Pour Philipp Adorf, le contexte actuel est tout autre: «Les tendances isolationnistes de Trump sont aujourd'hui largement répandues, même au sein des groupes parlementaires républicains. De manière générale, les députés républicains savent que Trump est fortement populaire au sein de l'électorat et qu'il n'est pas conseillé, politiquement parlant, de s'opposer à lui.» Ainsi, sur les dix républicains qui ont voté en janvier 2021 en faveur d'une nouvelle accusation d'impeachment, seuls deux ont été réélus lors des élections de mi-mandat de 2022.
Mais avant d'en arriver à un «Donald dictateur», il faudra qu'il remporte les élections du 5 novembre. Malgré les sondages et les tendances des paris, un succès est loin d'être assuré. «Je ne le verrais pas comme favori, lance Philipp Adorf. Au plus tard cet été, Trump sera au centre de l'attention. Les électeurs seront alors confrontés quotidiennement à son comportement agressif, clairement impopulaire, et aux problèmes juridiques, de sorte que sa cote de popularité pourrait chuter.»