Saluts hitlériens et slogans du genre «Les étrangers dehors» ou «L'Allemagne aux Allemands»: les débordements néonazis se multiplient en Allemagne. L'extrémisme de droite étant désormais omniprésent dans le pays, un succès était donc promis au parti «Alternative pour l'Allemagne» (AfD) lors des élections régionales dans le Land de Thuringe, où le parti a obtenu 23,4% des voix lors des dernières élections régionales.
Mais le coprésident de l'AfD en Thuringe, Björn Höcke, d'ordinaire habitué au succès, a dû essuyer un échec cuisant dimanche: la percée attendue de l'AfD dans son fief n'a pas eu lieu. Alexander Marguier, rédacteur en chef du magazine politique allemand Cicero, pense savoir où l'AfD a montré des signes de faiblesse.
Alexander Marguier déclare à Blick: «Le fait que l'AfD n'ait pas pu répondre aux attentes est probablement dû au personnel avec lequel elle s'est présentée. Dans ce domaine, l'Union chrétienne-démocrate (CDU) avait un net avantage avec ses candidats lors des élections directes où la personnalité compte beaucoup.»
Duel à venir au second tour
Dans ce Land de l'Est de l'Allemagne, 1,7 million d'électeurs au total ont pu renouveler des gouvernements et des parlements régionaux. Il fallait également élire 13 des 17 conseillers régionaux de Thuringe – principaux administrateurs d'un district régional qui comprend généralement plusieurs communes.
L'année dernière, l'AfD avait pu fêter son premier administrateur de district en Thuringe. Dimanche, il n'y a pas eu d'autres candidats AfD élus – pas encore. La décision sera prise lors des élections secondaires du 9 juin, où les candidats de la CDU et de l'AfD s'affronteront dans plusieurs localités. Dans le district de Hildburghausen, Tommy Frenck, un néonazi, a même réussi à se qualifier pour le second tour.
Même l'autre coprésident de parti, Stefan Möller, a dû essuyer un revers. Lors des élections à la mairie d'Erfurt, la capitale du Land, il n'a obtenu que 20% des voix et ne sera donc même pas présent au second tour.
Autre fait marquant: la gauche, le Parti social-démocrate (SPD) et les Vert-e-s, qui forment le gouvernement du Land, ont perdu des points. Même le BSW, une alliance de gauche radicale, n'a pas réussi à décoller.
Même le RN s'est distancé
Alexander Marguier dresse le bilan: «Ces résultats électoraux sont un coup de frein pour Björn Höcke. Ils montrent que l'AfD n'est pas inarrêtable». S'ajoute à cela le fait que l'AfD, divisée, s'est scindée en deux camps à Saalfeld-Rudolstadt, lesquels se sont affrontés. Pour notre spécialiste, il est clair qu'avec de meilleurs candidats et le soutien d'autres partis, la CDU remportera le second tour.
Ces élections s'apparentent beaucoup à une répétition avant les élections régionales du 1er septembre. Alexander Marguier pense que l'AfD aura à nouveau un succès plus important que celui qu'elle a obtenu lors des élections locales. «Les élections régionales sont plus portées sur les partis que sur des personnalités.» Il est toutefois difficile de faire des pronostics, car le contexte actuel peut donner de l'élan à l'AfD mais aussi lui nuire, comme le montrent aujourd'hui les accusations d'espionnage et de corruption.
Les récents scandales concernant l'AfD sont même parvenus aux oreilles du Rassemblement national de Marine Le Pen, qui a pris ses distances avec le parti allemand. L'AfD a été exclue du groupe populiste de droite de l'UE, Identité et démocratie.
Se référant à ces affaires gênantes, le politologue de Bochum Oliver W. Lembcke a déclaré à l'agence de presse allemande DPA, à propos des élections en Thuringe: «L'AfD s'est plantée de la sorte, car elle a donné la pire image possible ces dernières semaines.»