Trois révolutions ont eu lieu en 2024. Devant nous. Sous nos yeux. La première révolution nous vient, sans surprise, des Etats-Unis avec le retour au pouvoir de Donald Trump, qui sera investi le 20 janvier prochain.
La seconde est celle que l’Europe nationale populiste est en train de nous enseigner: à savoir le risque d’une transformation profonde de nos démocraties.
Et la troisième? Elle est économique. Elle nous vient, entre autres, de l’Argentine dirigée par le fantasque président à la tronçonneuse, Javier Milei. Il s’agit d’une nouvelle révolution libérale, résolue à mettre à bas une bonne partie de nos appareils étatiques avec l’aide de ce puissant moteur de transformation administrative, financière et sociale qu’est l’Intelligence artificielle.
Lignes de défense
La première révolution de 2024, celle qui a déjà transformé le monde et nos vies, est l’élection triomphale de Donald Trump. Oui, triomphale! Le 47e président des Etats-Unis qui entrera à la Maison Blanche le 20 janvier est, à lui seul, un tremblement de terre. Trump a déjà commencé à mettre en œuvre sa stratégie favorite: celle de la surenchère. Il attaque. Il menace. Il exige. Il insulte le Canada, en le traitant comme un vassal.
Avec quel succès? On le saura vite. Mais sur trois fronts, tout va changer. Le front en Ukraine va sans doute connaître une accalmie négociée entre Trump et Poutine, dont Volodymyr Zelensky bataille pour ne pas être la victime expiatoire. Le front commercial va devenir meurtrier au niveau planétaire. Le front de l’Amérique, enfin, va ressembler vite à une guerre de tranchée. Trump considère que les États-Unis sont assiégés. Il promet de leur rendre leur grandeur. Et pour cela, il n’hésitera pas à camper férocement sur ses lignes de défense: tarifs douaniers, expulsions massives, instrumentalisation de la justice.
National-populisme
La seconde révolution de 2024 concerne l’Europe. Deux rapports majeurs ont dessiné la seule issue possible pour que l’Union européenne (UE) reste un acteur économique mondial de premier plan. Ils ont pour auteurs deux anciens Premiers ministres italiens, Enrico Letta et Mario Draghi. Or, l’on sait déjà que l’Union aura la plus grande peine du monde à suivre leurs recommandations. Son marché intérieur, le plus important au monde, va dès lors demeurer fragmenté.
Dans la plupart des pays membres de l'UE, une révolution nationale-populiste est en cours. Elle se lit dans les urnes. Le 23 février, l’Allemagne sera peut-être secouée rudement, à son tour, par la poussée de l’AFD, le parti d’extrême droite aux relents néonazis.
C’est pourtant avec cette Union européenne que la Suisse vient de conclure ses négociations sur un nouveau paquet d’accords bilatéraux. La donne est redoutable. L’Europe unie n’a jamais été aussi indispensable sur le papier. C’est à elle que va sans doute échoir la responsabilité de la reconstruction de l’Ukraine. Mais les citoyens marquent de plus en plus leurs distances avec leurs votes. Alors, comment concilier ces deux impératifs? 2024 a accouché d’un dilemme insoluble.
Gouverner avec l'AI
Vient la troisième révolution. Elle est économique, libérale, anti-Etat. Observez bien ce qui se passe en Argentine, ce pays d’Amérique latine si riche en ressources naturelles et si politiquement calamiteux depuis des décennies. Son nouveau président, Javier Milei, élu il y a un an, le 10 décembre 2023, est le symbole d’un tsunami qui menace de mettre toutes nos structures étatiques à terre.
Avec l’aide de l’intelligence artificielle, dont Elon Musk entend bien être l’acteur numéro un, le fait de gouverner ne sera plus jamais le même. L’inefficacité chronique de certaines administrations devient inexcusable. Des pans entiers des services publics risquent de disparaître, et Elon Musk va s’y employer aux Etats-Unis, à la tête de son DOGE: ce «Department of Governement Efficiency» nouvellement crée par Donald Trump, dont les contours restent très flous.
Domination d’Israël
Ces trois révolutions ont commencé en 2024. Bien d’autres ont eu lieu. La domination impitoyable d’Israël sur le Proche-Orient, attestée par le repli actuel de l'Iran, l'affaiblissement du Hezbollah libanais et la chute du régime Syrien de Bachar al-Assad, est ainsi le grand résultat des convulsions géopolitiques déclenchées par l’assaut du Hamas, le 7 octobre 2023.
Le risque d’une réhabilitation de Vladimir Poutine par Donald Trump est réel, sur fond de guerre en Ukraine. Les secousses qui font actuellement trembler la Chine, seconde économie mondiale, ont de bonnes raisons de hanter le parti communiste de Xi Jinping.
Mais retenez bien ces trois bouleversements. Trump va casser le baromètre de la mondialisation. L’Europe est à genoux et peine à retrouver son souffle. Le cadre étatique classique risque de se retrouver obsolète, face à des multinationales armées d’une intelligence artificielle transformée en arme de destruction sociale et économique massive.
Oui, nos vies ont changé en 2024! Prêts pour le grand saut, en 2025?