Adam, 3 ans, et sa soeur aînée Cham sont nés le même jour à six ans d'intervalle, le 21 octobre. Ils ont été tués samedi, le jour de leur anniversaire, avec leur mère, dans une frappe israélienne dans la bande de Gaza, raconte leur père à l'AFP.
Ayman Abou Chamalah, un Palestinien de 34 ans, et sa famille ont fui les bombardements israéliens sur Gaza-ville pour se réfugier chez des proches à Rafah, dans le sud du territoire contrôlé par le Hamas. Mais une frappe israélienne sur l'immeuble de plusieurs étages a tué sa femme, ses deux enfants de 3 et 9 ans, deux de ses belles-sœurs et deux de leurs enfants ainsi qu'un cousin et une cousine.
Selon les autorités locales, il y a plus de 2000 enfants parmi les 5791 personnes tuées (bilan le 24 octobre à 13h) dans la bande de Gaza depuis le début des bombardements israéliens menés en représailles aux attaques menées depuis le territoire palestinien par le Hamas. Selon Israël, celles-ci ont fait plus de 1400 morts, en majorité des civils tués le 7 octobre sur son territoire.
Leurs corps étaient déchiquetés et calcinés
Samedi soir, Ayman Abou Chamalah était monté sur le toit de l'immeuble pour s'assurer que les réservoirs d'eau se remplissaient, ayant réussi à se faire livrer de l'eau par citerne après onze jours de coupure. «Je commençais à descendre dans la cage d'escaliers quand la frappe a eu lieu. Si j'étais descendu 30 secondes plus tôt, j'aurais été tué avec eux», raconte-il à l'AFP lundi.
«Le 21 octobre, c'était l'anniversaire de Cham et Adam et c'est devenu le jour de leur martyre. Cela sera un jour très difficile pour moi chaque année», ajoute le père en sanglots, essuyant ses larmes avec ses deux mains. «Ils ont mis le corps déchiqueté de mon fils dans un sac bleu, Cham était calcinée», s'étrangle-t-il.
Sa femme, Dareen Abou Chamalah, 28 ans, était enceinte, au début du neuvième mois de grossesse. Le couple avait déjà choisi un prénom pour le bébé, Mecca. «Ma femme étendait le linge sur le balcon quand la frappe a eu lieu, la déflagration l'a projetée depuis le troisième étage chez les voisins en bas. Je m'attendais à ce qu'elle et le bébé dans son ventre soient morts après une telle chute», poursuit-il.
«Je l'ai trouvée gisant par terre, elle était encore vivante. Je vous jure que ses derniers mots étaient: 'Ayman, sortez Mecca de mon ventre, et prends soin d'elle'», ajoute-il. Il affirme que sa femme était tellement défigurée par l'explosion qu'il a reconnue seulement «par le pantalon qu'elle portait».
Accouchement post-mortem
Dans l'hôpital Abou Youssef al-Najjar où son corps a été transporté, il a «supplié le médecin de la faire accoucher». «Je lui ai dit que c'était sa dernière volonté.»
Les médecins ont réussi à l'accoucher post-mortem par césarienne. La nouveau-née, Mecca, a été ensuite transportée en urgence vers le service pédiatrique de l'hôpital du Croissant-rouge émirati à Rafah où l'AFP a rencontré M. Abou Chamalah.
«La bébé était dans un état très grave en arrivant ici et elle a été immédiatement placée sous respiration. Mais le premier diagnostic n'est pas bon, car le cerveau a été privé d'oxygène entre le moment de la mort de la mère et la naissance», explique à l'AFP le chef des urgences de l'hôpital, Mohammad Salameh. «Il est très probable qu'elle va souffrir de séquelles permanentes», ajoute-t-il.
Dans l'hôpital, le père endeuillé se tient debout devant la couveuse dans laquelle sa fille a été placée. Il éclate en sanglots avant d'être réconforté par un médecin qui le prend dans ses bras.
Sur l'étiquette d'identification collée sur la couveuse, on peut lire: «Bébé de la martyre Dareen Abou Chamalah», avec sa date de naissance, le 21 octobre. Celle aussi de la mort de sa soeur, de son frère et de sa mère.
(AFP)