Parce qu'il critique Poutine
Le Kremlin veut faire taire le père d'un marin du Moskva

Dmitry Shkrebets a perdu son fils dans le naufrage du croiseur russe Moskva. Depuis, il critique ouvertement Vladimir Poutine. La police a perquisitionné son appartement et confisqué son ordinateur. Des représailles qui sont loin d'intimider le père de famille.
Publié: 06.06.2022 à 19:23 heures
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Le matelot Egor Shkrebets se trouvait à bord du Moskva au moment de son naugfrage.
Photo: Twitter / morphett_c
Fabian Vogt

Dmitry Shkrebets n'a pas seulement perdu son fils, Egor, âgé de 20 ans à peine lors du naufrage du croiseur Moskva, le 14 avril. Il a aussi perdu sa foi en Vladimir Poutine.

Avant la guerre, le Russe était un fervent partisan de Vladimir Poutine, raconte-t-il au journal allemand «Bild». Désormais, il critique quotidiennement le chef du Kremlin sur le réseau social VK pour faire part de sa colère et de sa frustration.

Le père de famille partage son désespoir en ligne, notamment vis-à-vis du manque d’information sur les circonstances du naufrage. Les causes de l’accident n’ont pas encore été éclaircies: était-ce le fait d’un bombardement ukrainien? D’une erreur humaine de la part des Russes? Les deux belligérants avancent des versions des faits radicalement différentes.

Son fils n’était pas qu’un conscrit

De son côté, le Kremlin assure qu’une seule personne est morte, que 27 sont portées disparues et que des centaines ont été secourues. L’Ukraine, en revanche, avance que des centaines de personnes seraient décédées.

Vladimir Poutine a, lui, affirmé que seuls des soldats professionnels avaient servi sur le croiseur de guerre, considéré comme la fierté de la flotte russe. Les familles de proches disparus ont toutefois démenti cette déclaration en révélant que leurs enfants ou maris n’étaient que des conscrits. Egor Shkrebets en faisait partie. Il avait été affecté à la cambuse en tant que conscrit, raconte son père, qui ne fait plus confiance aux autorités russes.

Appartement perquisitionné et ordinateur confisqué

D’après Dmitry Shkrebets, les autorités russes l’avaient d’ailleurs dans leur viseur depuis un certain temps déjà. La surveillance a fait place aux actes puisque le père d’Ego a reçu une visite des autorités: la police a perquisitionné son appartement et confisqué son ordinateur.

«Ils me reprochent d’avoir envoyé des alertes à la bombe. C’est un reproche absurde, raconte le patriarche à 'Bild'. Il ne me serait jamais venu à l’idée de faire quelque chose comme ça, et mon innocence peut être facilement prouvée.»

Le père d’Egor n’est pas dupe. Il se doute bien que cette visite cache plus qu’une simple enquête sur une alerte à la bombe présumée. Dmitry Shkrebets fait allusion à la machine de propagande russe qui a pour objectif d’empêcher toute critique de Vladimir Poutine et de la conduite de la guerre par la Russie.

Dans le cas de Dmitry Shkrebets, l’intimidation et la propagande des autorités n’auront pas de prise sur lui, assure-t-il au journal allemand: «Il m’est déjà arrivé la pire chose qui puisse arriver à un père: j’ai perdu mon fils. Je n’ai plus peur de personne. J’écris la vérité et je continuerai à le faire.»

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