Les chercheurs sur la paix appellent à la mesure
«L'augmentation des dépenses militaires reflète la détérioration de la situation dans le monde»

L'invasion russe en Ukraine a stimulé le réarmement dans le monde entier. Les dépenses militaires n'ont jamais été aussi élevées. Des chercheurs sur la paix de l'Institut Sipri dévoilent leurs prévisions sur l'évolution de la courbe et mettent en garde.
Publié: 23.04.2024 à 11:57 heures
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Dernière mise à jour: 23.04.2024 à 12:12 heures
Chaque année, les Russes font étalage de leur puissant arsenal militaire.
Photo: AFP
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Guido Felder

L'invasion de la Russie en Ukraine a engendré un véritable réarmement mondial. Les pays s'arment et se réarment. Toujours plus et toujours mieux. Mais cette tendance ne date pas d'hier. Selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), les dépenses militaires ont atteint un niveau record l'année dernière, et ce, pour la neuvième année consécutive.

En 2023, les dépenses dédiées à la défense ont augmenté de 6,8%, pour atteindre 2,44 billions de dollars. Une somme qui représente 30 fois le budget fédéral suisse. Avec un tel montant, il serait possible de soulager la famine dans le monde pendant une centaine d'années. Ou alors, de construire près de 200 fois le tunnel de base du Gothard.

Les champions du monde en matière de dépenses militaires demeurent les États-Unis, qui représentent plus d'un tiers des dépenses mondiales. La Chine et la Russie les talonnent, pays où les dépenses militaires ont augmenté de 24% en un an. Ces dépenses représentent désormais près de 6% du produit intérieur brut (PIB).

En Ukraine, les coûts liés à la défense sont encore plus élevés par rapport au PIB. Dans ce pays déchiré par la guerre, les dépenses militaires représentent 37% du PIB. Entre-temps, onze des 31 pays de l'OTAN ont atteint ou même dépassé leur objectif de 2% fixé par l'Alliance.

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Trouver un équilibre entre dépense sociale et militaire

Le rapport annuel du Sipri sur les dépenses militaires mondiales est considéré comme le recueil de données le plus complet de ce type au monde. Les chiffres relatifs aux dépenses comprennent également les dépenses liées au personnel, aux aides militaires ainsi qu'à la recherche et au développement de l'armée.

Nan Tian, analyste pour l'Institut basé à Stockholm, tire la sonnette d'alarme sur tagesschau.de: «Le fait que les dépenses n'aient jamais été aussi élevées et qu'elles aient augmenté de manière aussi spectaculaire reflète la détérioration de la situation dans le monde.» A défaut de se focaliser sur la diplomatie, les Etats préfèrent miser sur la force militaire. «Ils choisissent des voies qui mènent à l'escalade plutôt qu'à la désescalade. C'est très inquiétant pour le monde entier.»

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Mais pour l'expert, les conséquences de cette priorisation dépassent le domaine de la défense. L'augmentation des investissements dans l'armée privent d'autres domaines importants de financement pourtant essentiels, à commencer par l'environnement et la santé. «Les gouvernements doivent trouver un équilibre: combien doit-on dépenser pour l'armée, et combien pour la sécurité sociale humaine?» Son pronostic reste toutefois sombre. «Il est peu probable que la situation sécuritaire s'améliore en 2024 ou même en 2025», estime Nan Tian. Le spécialiste s'attend plutôt à une nouvelle augmentation des budgets pour l'armée.

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Le monde est malade et il faut le soigner

Pour le directeur du Sipri, Dan Smith, l'augmentation des arsenaux militaires se comprend. Les gouvernements espèrent apporter davantage de sécurité pour leur pays. Mais cette hausse de température est plutôt alarmante: «Le graphique de l'augmentation des dépenses militaires est comme une courbe de fièvre au pied d'un lit d'hôpital: la fièvre monte, et montre à quel point le monde est malade», illustre le directeur, interrogé par Blick.

Pour que cette courbe s'abaisse et que le monde retrouve une meilleure santé, le chercheur sur la paix appelle à la mesure: «Les chefs d'Etat et de gouvernement des grandes puissances doivent reconnaître qu'il y a des limites aux risques.» La menace nucléaire ou encore la destruction de l'environnement et le réchauffement climatique sont notamment considérés comme des risques notables.

Les chefs d'État doivent se réunir pour fixer des limites, comme cela a été fait pendant la guerre froide, par exemple. C'est la seule façon d'éviter le pire et d'avoir une chance de se diriger vers des temps meilleurs. «Il faut commencer par de petits pas, les ambitions plus grandes suivront un peu plus tard», conclut Dan Smith.

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