Cette visite surprise de M. Zelensky au plus près des affrontements apparaît comme un défi lancé à son homologue russe, Vladimir Poutine, qui, au même moment, remettait des décorations au Kremlin à des soldats et à des dirigeants séparatistes prorusses de l'Est de l'Ukraine.
Le chef de l'Etat ukrainien «a rencontré des militaires, s'est entretenu avec eux» sur place, a déclaré le service de presse de la présidence, sans plus de précisions. Une vidéo diffusée par la chaîne ukrainienne d'Etat Freedom l'a montré se prenant en photo aux côtés de soldats dans un bâtiment et leur donnant des médailles.
«Il me semble que les héros de Bakhmout devraient recevoir ce que tout le monde reçoit. (...) J'aimerais souhaiter qu'il y ait de la lumière, mais la situation est si difficile qu'il y a de la lumière, puis il n'y en a plus», a-t-il dit, faisant allusion aux coupures de courant après les bombardements russes.
Le plus risqué de ses déplacements
M. Zelensky s'est rendu à plusieurs reprises près du front, comme mi-novembre à Kherson, dans le sud, après le retrait des troupes russes, et à Sloviansk, début décembre, à quelques dizaines de kilomètres du front oriental. Cette visite à Bakhmout apparaît toutefois comme le plus risqué de ses déplacements, les forces russes se trouvant aux portes de cette ville.
A lire aussi
Les troupes de Moscou tentent depuis l'été de s'en emparer, en particulier avec l'aide de mercenaires du groupe paramilitaire Wagner. Aujourd'hui ravagée par les combats, Bakhmout était jadis connue pour ses vignobles et ses mines de sel et comptait environ 70'000 habitants avant l'invasion russe déclenchée fin février.
Guerre de tranchées épuisante
Ces derniers mois, cette cité est devenue le lieu de pertes en apparence massives dans les deux camps du fait d'une guerre de tranchées épuisante, de duels d'artillerie lourde et d'assauts frontaux.
Si les soldats russes ont revendiqué la conquête de villages et de zones situées à l'extrémité même de Bakhmout, les forces ukrainiennes semblent contrôler la ville et une partie de ses alentours. «Bakhmout est la forteresse orientale de l'Ukraine», s'est félicitée mardi la vice-ministre de la Défense, Ganna Maliar, après s'être rendue dans cette cité avec M. Zelensky.
Décorations au Kremlin
Vladimir Poutine est pour sa part apparu mardi à la télévision en train de remettre des décorations à des soldats et à des personnalités politiques et économiques russes, à l'intérieur des murs du Kremlin à Moscou. «Notre pays a maintes fois fait face à des défis et défendu sa souveraineté. Aujourd'hui, la Russie est à nouveau confrontée au même défi», a-t-il déclaré après avoir décoré des dirigeants de l'Est séparatiste prorusse de l'Ukraine.
Le président russe ne s'est pas rendu sur le front ni dans les territoires sous occupation russe en Ukraine depuis le début de l'invasion. Il est en revanche apparu début décembre au volant d'une voiture sur le pont de Crimée reliant la Russie à cette péninsule annexée en 2014 ou encore en octobre sur un terrain d'entraînement pour mobilisés.
Le ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgou, s'est quant à lui affiché dimanche dans une vidéo le montrant en train d'inspecter le déploiement des forces russes dans le sud de l'Ukraine. Le ministère n'a pas précisé le lieu exact et la date de cette visite. Après une série de revers militaires russes dans le nord-est et le sud de l'Ukraine, l'essentiel des combats se concentre actuellement dans l'est de ce pays.
Bombardements massifs
La Russie a parallèlement opté à partir d'octobre pour des bombardements massifs sur les infrastructures ukrainiennes, qui causent régulièrement des coupures de courant et d'eau. Lundi, une attaque à l'aide de drones ayant principalement visé Kiev a provoqué de nouvelles interruptions de l'alimentation en électricité et donc du chauffage, en plein hiver.
Vladimir Poutine a admis mardi que la situation était «extrêmement difficile» dans les quatre régions du sud et de l'est de l'Ukraine dont Moscou revendique l'annexion sans les avoir entièrement conquises.
Un gradé de haut rang de l'armée ukrainienne, le général Serguiï Naïev, a pour sa part affirmé voir une «augmentation du niveau de menace» d'une potentielle attaque russe à partir du Bélarus voisin, comme ce fut le cas dans les premiers jours du conflit.
Voyage en Biélorussie
Vladimir Poutine s'est rendu lundi en Biélorussie pour des entretiens avec son homologue et allié Alexandre Loukachenko, tandis que l'armée russe y prend part actuellement à des manœuvres «tactiques».
Le chef de la diplomatie ukrainienne, Dmytro Kouleba, a minimisé l'impact de cette rencontre mardi, estimant qu'il s'agissait d'une simple «danse» politique et qu'"aucune décision essentielle n'a été prise au cours de cette réunion». Il a néanmoins assuré que l'Ukraine était «prête» à tout scénario.
(ATS)