Les critiques et appels à la démission venus de son propre parti, la CDU, pleuvent sur Armin Laschet. Le candidat à la chancellerie voit aussi son principal allié, le parti frère bavarois CSU couper les ponts avec lui.
Le chef de file du SPD «Olaf Scholz a plus de chances de devenir chancelier en ce moment, clairement», a ainsi asséné le dirigeant du parti conservateur bavarois CSU, Markus Söder. Le ministre-président bavarois se démarque ainsi clairement d'Armin Laschet, du parti de la chancelière. Celui-ci entendait toujours jusqu'ici tenter de succéder à Angela Merkel en dépit de la deuxième place obtenue dimanche.
Un mandat illégitime selon ses alliés
«Aucun mandat pour gouverner ne peut être légitimé moralement à partir de ce résultat électoral» obtenu dimanche par les conservateurs, le plus mauvais depuis 1949 aux législatives, a fait valoir Markus Söder, qui avait au printemps l'ambition de briguer la chancellerie, avant de devoir s'effacer au profit d'Armin Laschet, moins populaire que lui. Et Markus Söder de juger qu'une coalition entre les sociaux-démocrates, les Verts et les libéraux du FDP est la «première solution évidente».
Armin Laschet, qui a la réputation de toujours retomber sur ses pieds, comptait tenter de bâtir un attelage avec les Verts et libéraux. Mais sans l'apport du parti bavarois, ce scénario ne tient plus la route. Il voit depuis dimanche ses troupes se retourner contre lui.
Un tribunal contre le candidat?
La première réunion du groupe conservateur au Bundestag, le Parlement allemand, mardi après-midi risque fort de se transformer en tribunal contre le candidat qui incarne l'érosion d'un bloc en baisse de 9 points depuis le précédent scrutin de 2017. Score déjà considéré à l'époque comme décevant.
C'est le ministre-président de la Saxe, Michael Kretschmer, qui a ouvert les hostilités: «Les électeurs nous ont clairement dit 'la CDU n'est pas notre premier choix'. Faire comme si de rien n'était va nous conduire à la ruine», a prévenu le dirigent de ce Land d'ex-RDA, battu dimanche par l'extrême droite.
«Je ne pense pas que nous puissions avoir la prétention de diriger le prochain gouvernement», a renchéri un autre baron du parti, Norbert Röttgen. «Nous avons perdu. Point final», lui a fait écho le chef des jeunes de la CDU, Thilman Kuban.
La pression ne redescend pas
Face à ce vent de fronde, Armin Laschet a dû donner des gages, en admettant que la CDU, un des plus vieux partis européens, au pouvoir depuis 16 ans, avait «besoin de renouveau» à tous les étages.
Son discours sur la future coalition a aussi légèrement évolué, Armin Laschet se cantonnant désormais à dire qu'«aucun parti n'a de mandat clair pour former un gouvernement», pas plus la CDU que le SPD. Mais ces bémols n'ont pas suffi à faire redescendre la pression autour de lui. Au contraire.
Même un des principaux soutiens d'Armin Laschet au sein du parti, l'expérimenté patron de la Hesse Volker Bouffier, a lâché son poulain en reconnaissant que l'union conservatrice ne pouvait avoir «aucune prétention à la responsabilité du gouvernement». Un autre dirigeant régional proche d'Armin Laschet, Daniel Günther, a lui aussi pris ses distances avec un candidat gaffeur qui n'aura pas été un «atout» durant la campagne.
«J'aurais aimé une prise de conscience»
Des députés de base ont eux carrément réclamé la démission d'Armin Laschet, auteur d'une campagne ratée malgré l'implication dans la dernière ligne droite d'Angela Merkel. «J'aurais aimé une prise de conscience. Vous avez perdu, faites preuve de discernement, évitez d'autres dommages à la CDU et démissionnez», l'a enjoint la jeune députée de Rhénanie-Palatinat, Ellen Demuth.
L'opinion publique allemande semble elle avoir tranché, sans ambiguïté. Quelque 58% des citoyens pensent ainsi que la CDU-CSU n'a pas la «légitimité» pour former le prochain gouvernement, selon un sondage Insa pour le quotidien Bild.
Armin Laschet semble cristalliser sur sa personne tous les doutes et mécontentements: 51% veulent qu'il démissionne de la tête du parti moins d'un an après son élection.
(ATS)