Prise d'otages, tueries de masse, bombardements d'un territoire en état de siège: le déchaînement de violences en Israël et à Gaza a choqué le monde. Cela fait six jours que des centaines de combattants du Hamas se sont infiltrés en Israël pour tuer un millier de civils dans la rue, chez eux ou en pleine rave-party, prendre en otage plus de 150 personnes, semer la terreur sous un déluge de roquettes.
En réponse, Israël a effectué des milliers de frappes pour pilonner le Hamas. Plus de 1200 personnes ont été tuées dans la bande de Gaza. Des experts juridiques ont déclaré à l'AFP que les deux camps pourraient être accusés de crimes de guerre.
Les «crimes de guerre» se définissent comme des violations graves du droit international commises à l'encontre de civils ou de combattants pendant un conflit armé, une «grave violation» des Conventions de Genève de 1949 qui ont établi un cadre juridique pour la guerre après les tribunaux de Nuremberg des responsables nazis.
Plus de 50 atrocités sont définies dans le Statut de Rome, le traité fondateur de la Cour pénale internationale (CPI), parmi lesquelles le meurtre, la torture, le viol, la prise d'otages. Cela comprend également les attaques intentionnelles dirigées contre des biens de caractères civil, qui ne sont pas des «objectifs militaires».
«Il y a des violations des lois de la guerre de la part des deux parties»
Les «crimes contre l'humanité» sont des actes tels que le meurtre, la réduction en esclavage, l'extermination, le viol, la persécution et tous autres actes inhumains, commis «dans le cadre d'une attaque généralisée ou systématique lancée contre toute population civile et en connaissance de cette attaque».
«C'est vraiment terrible, car il y a des violations des lois de la guerre de la part des deux parties», a déclaré Melanie O'Brien, professeure invitée en droit international à l'Université du Minnesota. Concernant le Hamas, elle souligne la prise d'otages massive: «C'est une interdiction générale. Il n'y aucune condition qui peut le justifier (...) C'est un crime de guerre», a-t-elle déclaré à l'AFP.
Pour la ministre française des Affaires étrangères, Catherine Colonna, les attaques du Hamas «s'apparentent» à des crimes contre l'humanité. «Du côté du Hamas, je pense que c'est assez clair. Je veux dire, le meurtre délibéré de civils est un crime de guerre», a déclaré Ben Saul, professeur de droit international à l'Université de Sydney.
Au cours de l'attaque samedi du festival de musique Supernova, dans le désert du Néguev, 270 festivaliers ont été abattus ou brûlés dans leur voiture par des militants du Hamas.
«Sans discernement»
«Du côté israélien, je dirais que le plus clair est la déclaration d'un siège complet, empêchant l'entrée de nourriture, de carburant, d'eau et d'énergie. En termes de responsabilité pénale, la famine est un crime de guerre», a déclaré Ben Saul à l'AFP. Israël a annoncé lundi un «siège complet» de la bande de Gaza, coupant notamment l'approvisionnement en eau, en nourriture et en électricité.
Le droit international exige que les parties à un conflit «autorisent et facilitent le passage rapide et sans entrave de l'aide humanitaire destinée aux civils dans le besoin», a souligné Melanie O'Brien.
En outre, le Hamas et Israël se «bombardent mutuellement sans discernement», pas uniquement le personnel militaire, ce qui constitue également, estime-t-elle, un crime de guerre. La Cour pénale internationale (CPI) a ouvert une enquête officielle en 2021 sur les Territoires Palestiniens, notamment sur des crimes présumés commis par les forces israéliennes, le Hamas et les autres groupes armés palestiniens.
Une déclaration plus ferme nécessaire?
Israël, qui n'est pas membre de la CPI, a refusé de reconnaître sa compétence ou de coopérer à l'enquête, qui porte sur d'éventuels crimes remontant à la guerre de 2014 dans la bande de Gaza. La juridiction a simplement déclaré que son mandat s'appliquerait également à tout crime présumé commis pendant la guerre actuelle.
«Il serait bon que le procureur de la Cour pénale internationale fasse une déclaration plus ferme pour exhorter les parties au conflit à ne pas violer les lois de la guerre et pour dire que les personnes seront poursuivies», a relevé Melanie O'Brien. La situation est compliquée par la qualification de «national» ou d'"international» du conflit et par le statut des territoires palestiniens, a ajouté Ben Saul.
«Le problème avec (la bande de) Gaza est que la moitié des juristes internationaux disent qu'elle est occupée, l'autre moitié dit qu'elle ne l'est pas. Si elle est occupée, c'est un conflit international, la liste complète des crimes de guerre s'applique en vertu du Statut de Rome», a-t-il souligné. «C'est une question juridique importante pour le tribunal, qui reste encore à trancher.»
(AFP)